Sarkozy durement sermonné par Obama : "La Libye est plongée dans le chaos"

Sarkozy durement sermonné par Obama : "La Libye est plongée dans le chaos" En fin de mandat, Barack Obama libère plus volontiers sa parole. Il est revenu dans une interview sur l'intervention en Libye en 2011, en critiquant l'action de Nicolas Sarkozy et de David Cameron.

[Mis à jour le 11 mars 2016 à 9h08] L'intervention de la coalition conduite par la France et le Royaume-Uni en Libye en 2011 était-elle suffisamment coordonnée et préparée ? Cinq ans après les raids aériens soutenus in fine par les forces de l'Otan, Barack Obama constate que "la Libye est plongée dans le chaos". Pour la première fois, le président américain assure même publiquement que les leaders européens ont dans l'actuel marasme géopolitique du pays une lourde responsabilité : "Lorsque je me demande pourquoi cela a mal tourné, je réalise que j'étais convaincu que les Européens – étant donné la proximité de la Libye – seraient plus impliqués dans le suivi", clame aujourd'hui celui qui quittera la Maison Blanche dans 10 mois.

Ces propos, le président américain les a tenus en conscience, il les a même probablement relus et approuvés avant qu'ils ne soient publiés dans l'interview exclusive de The Atlantic. Ses critiques sont donc pour le moins pesées. Et à l'endroit de Nicolas Sarkozy, qui fut à l'initiative de l'intervention militaire en Libye, les mots semblent scrupuleusement choisis : selon Barack Obama, le chef de l'Etat français "voulait claironner ses succès dans la campagne aérienne, alors que nous avions détruit toutes les défenses anti-aériennes", tandis que le Premier ministre britannique, David Cameron était lui "distrait par d'autres choses".

Nicolas Sarkozy "se donnait le beau rôle"

Si Barack Obama semble régler ses comptes, c'est qu'à l'heure du bilan, le président américain doit de plus en plus justifier les choix opérés en matière de politique internationale durant ses deux mandats. Jamais le chef de l'Etat américain n'avait été si critique au sujet de la coalition menée par les Européens en Lybie. Pourtant, l'intitiative de Nicolas Sarkozy dans le dossier a plusieurs fois été ciblée par l'administration américaine. Comme le révélait alors le Canard Enchaîné, un rapport de 466 pages du think tank "Rand", commandé par le général Breedlove, à l'époque vice-chef d'état-major de l'US Air Force et commandant suprême des forces alliées de l'Otan aujourd'hui, décrivait par le menu, à l'été 2015, comment les Alliés de l'Otan s'étaient coordonnés - et mutuellement appréciés. Selon la Rand, qui consacre un chapitre à la gestion de la crise par la France, "il existait chez Nicolas Sarkozy la volonté de démontrer que les Européens étaient capables de gérer (sic) une crise, à un moment où les Etats-Unis semblaient réticents à tout engagement". Un expert militaire américain considère sans détour que le président français s'est inscrit dans "une romance historique où il se donnait le beau rôle".

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