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CÔTE D'IVOIRE

Des lycéens ivoiriens saccagent un collège... pour partir plus tôt en vacances

Devant le lycée général d'Agboville, des élèves ont décidé de ne pas faire cours, à la veille des vacances scolaires. Capture d'écran de la vidéo ci-dessous.
Devant le lycée général d'Agboville, des élèves ont décidé de ne pas faire cours, à la veille des vacances scolaires. Capture d'écran de la vidéo ci-dessous.
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Des collégiens et des professeurs ont été violemment pris à partie par des élèves d’un autre lycée d’Agboville, à une heure au nord d’Abidjan. Cela peut paraître surprenant mais cette pratique est récurrente dans cette ville à l’approche des vacances scolaires, selon des professeurs et élèves qui se disent fatigués.

Jeudi 17 mars, plusieurs dizaines d’élèves du lycée généraliste d’Agboville ont agressé les élèves et les professeurs du Collège d'enseignement technique voisin (CETA), l’équivalent d’un lycée technique. La raison de leur attaque peut paraître saugrenue : à l’approche des vacances scolaires, censées durer du 19 mars au 10 avril, les lycéens ont décidé de quitter les bancs du lycée en masse jeudi, et de ne pas assister aux cours. Ils se sont ensuite dirigés vers le collège adjacent pour inciter les collégiens à les suivre.

Les collégiens et leurs professeurs ne souhaitant pas se joindre à eux, les lycéens en colère ont lancé la bagarre, jetant des pierres et faisant 10 blessés, principalement des filles âgées de 15 à 20 ans, selon la direction du collège contactée par France 24. Des portes ont été cassées, des vitres brisées et deux motos d’enseignants endommagées.

Photos envoyées par des Observateurs à Agboville. Des portes, des vitres, mais aussi des motos d'enseignants ont été endommagées. Dix élèves ont été blessées ou on fait des crises d'angoisse après l'incident.

"Les lycéens nous ont accusé de faire cours alors que la Côte d’Ivoire était ‘en deuil national’ après les événements de Grand Bassam"

Lookman est professeur au Céta, l’établissement attaqué par les lycéens.

Nous étions en cours, lorsque nous avons entendu des coups de sifflets se rapprocher de plus en plus. Mes élèves et moi sommes sortis pour voir ce qu’il se passait, et nous avons vu une horde de jeunes se diriger vers nous et nous dire : "Il n’y a pas cours, dehors !" Certains avaient des bâtons qu'ils tapaient sur les vitres, nous avions très peur.

Dans la vidéo filmée par notre Observateur, des lycéens viennent de sortir de leur établissement. Notre Observateur est ensuite pris à parti par ces élèves qui souhaitent faire sortir les élèves du CET d'Agboville.

Professeurs et élèves ont tenté de s’opposer, et j’ai commencé à filmer avec mon téléphone, mais les lycéens ont essayé de s’en prendre à moi. Mes élèves ont voulu me protéger, et c’est à ce moment qu’il y a eu des jets de pierre qui ont blessé des jeunes filles.

J’ai entendu certains lycéens dire "vous ne pouvez pas faire cours, on est en deuil "[la Côte d’Ivoire avait décrété lundi trois jours de deuil après les attaques de Grand Bassam survenue dimanche, et une marche était organisée jeudi en mémoire des victimes, Ndlr], une excuse grotesque pour nous faire culpabiliser et se donner du crédit. Les cours n’ont donc pas eu lieu vendredi, et nous allons attendre lundi pour évaluer les dégâts. "

Des scènes récurrentes à Agboville à l’approche des vacances scolaires

L’événement peut paraître exceptionnel, il est en réalité récurrent à Agboville. Contactés par France 24, plusieurs collégiens disent "subir" la situation à chaque approche de périodes de vacances et ne pas oser s’opposer. L’un d’entre eux nous explique : "Si on intervient ouvertement, on sait qu’on est ‘grillé’ à Agboville, et qu’il faudra peut-être aller étudier dans une autre commune. On espère que ces derniers débordements vont attirer l’attention des autorités, et que ça va cesser."

Le censeur du Céta, intermédiaire entre la direction et les professeurs, confirme également qu’il connaît les mêmes remous impliquant ce lycée à l’approche de chaque vacances :

"On se sent impuissants face à ces hordes de jeunes lycéens. En général, on essaie de discuter avec eux pour calmer la situation. Mais là, les collégiens et les professeurs n’ont pas voulu obtempérer, et ça a débordé. Je suis ici depuis deux ans, et à chaque approche de congés, c’est la même chose. Jeudi, il n’y avait que deux policiers pour encadrer tout ce monde. Nous demandons aux autorités de déployer des forces de l’ordre supplémentaires à l’approche des vacances scolaires."

Le ministère de l'Education nationale "tente de trouver des solutions" à des incidents récents similaires

Contacté par France 24, Mea Kouadio, responsable des lycées et collèges au sein du ministère de l’Éducation nationale, en déplacement à l’étranger, dit ne pas avoir encore eu connaissance des incidents d’Agboville.

Il explique que des incidents similaires ont eu lieu à Noël dernier, et que le ministère "tente de trouver des solutions avec les parents d’élèves pour éviter que ça se reproduise". Il y a un an, nos Observateurs rapportaient un incident opposant des lycéens grévistes tentant d’obliger des non-grévistes à quitter leur établissement.

Selon Mea Kouadio, un arrêté a été signé par le ministère au mois de janvier prévoyant de sensibiliser les élèves de collèges et lycée au "projet pédagogique de leur lycée" avec pour slogan "un jour perdu ne se rattrape pas". Il assure que la mesure sera mise en place dès la rentrée académique prochaine.

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