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Réfugiés : la grande hypocrisie des Européens vis-à-vis de la Turquie

L’Europe est mal à l’aise avec l’idée d’une coopération étroite avec la Turquie sur les réfugiés.

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La chancelière allemande, dont le pays a déjà accueilli plus d’un million de migrants et demandeurs d’asile, est montée en première ligne pour tenter de résoudre cet imbroglio

Par Catherine Chatignoux

Publié le 18 mars 2016 à 15:36

La mise en place d’une coopération étroite entre l’Europe et la Turquie sur la question des réfugiés pose de multiples questions. Pas seulement juridiques et logistiques, politiques et morales aussi. On a vu lors du sommet de Bruxelles, des dirigeants européens gênés aux entournures, appeler la main sur le coeur à ne pas brader les valeurs européennes en pactisant avec un gouvernement turc islamo-conservateur de plus en plus islamiste et de plus en plus conservateur.

La chancelière allemande, dont le pays a déjà accueilli plus d’un million de migrants et demandeurs d’asile, est montée en première ligne pour tenter de résoudre cet imbroglio mais elle s’est vu reprocher par certains de ses partenaires d’agir en solo et de chercher à leur imposer une solution radicale consistant à confier à Ankara la réadmission et la prise en charge de la totalité des migrants partis des côtes turques et débarqués sur les îles grecques.

Cette stratégie a pourtant une réelle cohérence et va bien au-delà d’une simple défausse de l’Europe sur son voisin oriental. La réadmission des migrants en Turquie doit permettre non seulement de casser l’activité honteuse des passeurs qui profite de la détresse de ces êtres humains mais aussi d’épargner la vie de centaines d’entre eux en leur évitant une traversée périlleuse de la mer Egée.

L’accord avec la Turquie mettra un terme au spectacle désolant de ces colonnes humaines traversant les Balkans et de ces milliers de familles pataugeant dans la boue des camps installés dans l’urgence entre la Grèce et la Macédoine. Mais la séquence ne s’arrête pas là. L’idée d’Angela Merkel est de constituer parallèlement un corridor humanitaire sûr et ordonné entre la Turquie et l’Europe avec pour objectif d’accueillir potentiellement des centaines de milliers de réfugiés. Il s’agit, au nom du pragmatisme, de bousculer certaines valeurs pour en défendre d’autres. Car Angela Merkel depuis le début ne démord pas de sa ligne: l’accueil des réfugiés est un devoir, pas une option. L’implication de la Turquie est un moyen, pas une fin.

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Quelle alternative ?

Y a t-il une alternative ? Ceux qui s’offusquent de ce pacte avec l’inquiétant pouvoir turc sont les mêmes qui, depuis des mois, bloquent leurs frontières et torpillent toute solution européenne à cette crise. L’Autriche qui s’indigne des dérives démocratiques de la Turquie a été la première à filtrer les migrants et à les contingenter. Elle a contraint ainsi ses voisins des Balkans à faire de même, bloquant au bout de la chaîne tout passage à la frontière greco-macédonienne.

L’Europe peut-elle longtemps offrir le spectacle affligeant des barbelés installés sur ses frontières intérieures et faire de la Grèce un vaste camp de réfugiés désespérés ? ll y a une grande hypocrisie dans ces -apparentes- tergiversations à coopérer avec Ankara. Car tous les dirigeants européens rêvent secrètement d’un accord avec la Turquie qui pourrait régler enfin la crise migratoire et stopper les dégâts qu’elle provoque dans les opinions publiques.

La solution turque n’est pas glorieuse mais elle est la meilleure possible compte tenu du niveau actuel de solidarité des pays européens qui est proche du néant.

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