Discriminations à l'embauche : le gouvernement lance une campagne de testing

 

ILLUSTRATION. Atelier CV à l'espace public multimédia de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis).
ILLUSTRATION. Atelier CV à l'espace public multimédia de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). (LP/Ph.Lavieille)

    Les ministères s'inspirent du monde associatif. Le gouvernement va lancer une campagne de testing pour savoir si les candidats à l'embauche portant un nom à consonance arabe sont victimes de discrimination à l'embauche.

    , l'opération débutera dans une dizaine de jours, pour trois mois.

    Début février,

    , Emmanuel Macron

    . Le but était double : «Mieux connaître et évaluer quelles sont les discriminations dans notre pays», qui ont «un coût pour les jeunes», mais aussi «pour les entreprises, qui n'améliorent pas leur performance, leur compétitivité, parce qu'elles se privent d'une part de la société française».

    A l'initiative du groupe de dialogue sur les discriminations, vingt à cinquante entreprises de plus de mille salariés vont ainsi anonymement être mises à l'épreuve, en recevant, pour certaines annonces, deux CV avec un profil de qualifications et d'expériences identiques mais deux noms différents.

    Pour quelles conséquences ? Le testing est habituellement opéré par des associations qui veulent attirer l'attention des responsables politiques ou économiques sur des discriminations persistantes. La conclusion de leur opération est généralement remise publiquement entre les mains du ministre concerné, afin qu'il envisage des actions ou des corrections. Cette fois, le gouvernement inverse les rôles. Il avait annoncé cette initiative en mai dernier,

    , une réforme jamais entrée en vigueur.

    Le résultat de cette campagne sera donné en septembre et il risque d'être sans surprise. On sait depuis une étude de 2007 notamment qu'en Île-de-France, un candidat avec un prénom à consonance française doit envoyer, en moyenne, trois fois moins de CV pour décrocher un job comme serveur ou comptable (1) qu'un candidat de nationalité française avec un nom à consonance marocaine. Quand le candidat est de nationalité marocaine, c'est quinze fois plus.

    En 2013, l'Observatoire national des zones urbaines sensibles (2) avait effectué le même type d'enquête, en adressant deux CV identiques de candidats à des postes dans la restauration. Ceux domiciliés à Paris avaient deux fois plus de chances de décrocher un entretien que ceux domiciliés en Seine-Saint-Denis. Ce testing prouvait aussi que, pour la Seine-Saint-Denis, les recruteurs s'arrêtaient au code postal 93 sans regarder si les candidats venaient d'une cité de Bondy ou de La Courneuve ou d'un quartier pavillonnaire du Pré-Saint-Gervais. Alors que dans Paris, l'effet « quartier » ne compte absolument pas.

    En mai dernier, en enterrant le CV anonyme, le ministre du Travail d'alors, François Rebsamen (PS), avait aussi annoncé une étude sur le coût économique de la discrimination.

    (1) Étude réalisée en 2006 par le Centre d'étude des politiques économiques de l'université d'Evry-Val d'Essonne. Sur deux mois, 2 112 CV avaient été envoyés pour des postes de serveur ou de comptable en Île-de-France. A consulter ici
    (2) Effets de quartier, discrimination territoriale et accès à l'emploi, ONZUS, juin 2013. A consulter ici.

    b>VIDEO. Rebsamen ne publiera pas le décret généralisant le CV anonyme