Le Parlement européen réticent sur le contrôle des armes à feu

La Commission européenne veut compliquer l’achat d’armes à feu et justifie sa décision en invoquant les attentats de Paris. Mais le Parlement doute de l’efficacité d’une telle mesure. Un article d’EURACTIV Allemagne.

Interdiction totale des armes semi-automatiques, forte réglementation des révolvers à blanc, règles plus strictes pour les musées et collectionneurs et échange d’informations plus étroit entre les autorités de sécurité sont quelques-unes des propositions contenues dans le nouveau paquet de mesures présenté par la Commission en novembre dernier. Le paquet est en train d’être examiné par le Parlement européen.

De nombreux eurodéputés considèrent toutefois que le projet de loi est trop ambitieux et qu’il menace les musées et les tireurs sportifs.

Le 15 mars, la commission parlementaire en charge du marché interne s’est réunie pour débattre de la proposition et écouté l’avis des experts externes. Le paquet a suscité peu d’enthousiasme chez les élus, qui estiment que l’objectif premier de la Commission, qui est de combattre le terrorisme et les criminels, ne sera rempli.

« Cette proposition n’est pas une réponse aux actes terroristes », a critiqué Othmar Karas (PPE), qui, comme d’autres eurodéputés, pense qu’elle ne fait que restreindre davantage le marché des armes légales au lieu de s’attaquer au marché noir. « Les propriétaires d’armes à feu possédant un permis sont très inquiets », a ajouté Othmar Karas.

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Un point central de la réforme concerne les armes neutralisées, c’est-à-dire désactivées. Les États membres ont des critères différents pour ce qui constitue ou ne constitue pas une arme neutralisée : un vide juridique que beaucoup de criminels ont exploité afin d’importer des armes qui ont été légèrement modifiées pour sembler neutralisées.

La nouvelle règlementation vise à combler ce vide juridique. Selon Jean-Claude Juncker, les différences entre États membres devraient être harmonisées pour que les armes anciennes soient désactivées de façon permanente.

Reste à savoir s’il s’agit d’une réponse sensée aux attentats de Paris. On ne sait toujours pas si les armes utilisées lors des attaques de janvier et de novembre étaient des armes à feu neutralisées ou des armes introduites dans l’UE en contrebande depuis les zones de combat.

Par ailleurs, il n’y a pas de preuve que des normes communes sur la neutralisation limiteraient la vente illégale d’armes à feu. Même si des éléments cruciaux sont abimés ou trop vieux, il existe toujours la possibilité de se procurer de nouveaux composants sur le marché noir.

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En résumé, le débat tourne autour du fait que les eurodéputés estiment que le problème réside dans la circulation illégale des armes dans l’espace Schengen et non pas dans le commerce licite des armes. Quoi qu’il en soit, la question est dans les radars des responsables de la sécurité depuis longtemps et la lutte contre les trafiquants et leur commerce d’armes illégales aux frontières de l’UE se poursuit.

Pour les spécialistes, trouver les individus qui commercialisent des armes légères à la frontière revient à chercher une aiguille dans une botte de foin. Et les eurodéputés soulignent le fait que la proposition de la Commission ne fait rien pour empêcher cela. La présidente de la Commission marché interne, Vicky Ford, estime que l’exécutif a « mal rédigé » cette proposition. Si le Parlement venait à l’approuver sans amendements, elle aurait de « graves conséquences sur les musées, les collectionneurs, les historiens et les réservistes dans de nombreux pays », a-t-elle ajouté.

Le Parlement souhaite présenter son propre rapport sur le contrôle des armes et sur la manière dont combattre efficacement le marché illégal des armes à feu à Europe.

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