Une barrière de corail menacée par un projet portuaire en Floride
« Il y a un risque que les quelques coraux restants dans cette région soient très endommagés par l’approfondissement du port, prévient le petit-fils du célèbre océanographe français Jacques-Yves Cousteau. Ce serait une tragédie, et considérant qu’il y a probablement du corail +corne de cerf+ ici, ce serait carrément un crime fédéral. »
Les coraux « corne de cerf » et « corne d’élan » sont catalogués comme espèces « menacées » et 98 % d’entre eux ont disparu, selon l’organisation non gouvernementale Miami Waterkeeper.
Les barrières de corail offrent des habitats importants aux poissons, constituent une protection contre les tempêtes pour les côtes, et attirent de nombreux touristes avides de belles plongées.
Mais environ 80 % des récifs sur les côtes de Floride sont morts depuis les années 1970 en raison de maladies, de tempêtes, du changement climatique ou du débordement des égouts.
« On perd ces coraux plus rapidement qu’on n’arrive à comprendre comment les sauver », regrette Rachel Silverstein, directrice de Miami Waterkeeper.
Un projet pour creuser les fonds marins près de Port Everglades a été présenté au Congrès en janvier, un plan à 313 millions de dollars pour approfondir et élargir un canal creusé il y a près d’un siècle.
Le port est l’un des plus actifs des États-Unis pour les cargos, un véritable carrefour pour les biens en provenance d’Europe, de la Méditerranée, de l’Amérique du Sud et des Caraïbes. C’est également l’un des plus gros ports de croisière de Floride.
Compensations insuffisantes
Un projet identique a vu le port de Miami s’agrandir, les travaux s’étalant sur deux ans, jusqu’au mois d’août dernier. Plus de 100 hectares de coraux sont morts à cette occasion, asphyxiés par des dépôts de sédiments.
« Aucun corail n’était censé être tué à cause de ces sédiments », pointe Mme Silverstein.
Miami Waterkeeper et d’autres groupes de défense de l’environnement ont déposé une plainte contre le corps des ingénieurs de l’armée, qui chapeaute le projet, pour mise en danger d’une espèce menacée.
Et même si elle n’espère pas leur faire renoncer aux travaux, Rachel Silverstein aimerait au moins que les mêmes erreurs ne se répètent pas : « Nous voulons une meilleure protection de ces récifs durant les travaux d’expansion du port », dit-elle.
Dimanche, des plongeurs ont commencé à photographier des parties du récif qui seront directement affectées, dans le but de faire le point sur la santé des coraux, avant et après les travaux.
Selon le projet, le corps des ingénieurs de l’armée prévoit d’installer 4,8 hectares d’habitat artificiel pour des coraux, pour compenser le retrait de 4 hectares de récifs. Promesse a également été faite de déplacer 12.000 colonies de gros coraux avant le début des travaux.
Le corps des ingénieurs de l’armée, qui n’a pas répondu aux sollicitations de l’AFP, prévoit également d’autres compensations éventuelles en cas de dommages indirects causés par les outils de dragage.
Mais tout cela est insuffisant pour Philippe Cousteau, aujourd’hui installé en Californie mais qui a passé quatre ans de sa vie en Floride. « Les gens doivent demander qu’ils fassent un meilleur boulot, lance-t-il. Il reste si peu de ces coraux aux États-Unis et à travers le monde que nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger les derniers. »