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Toosheh, une nouvelle technologie pour contourner la censure en Iran

Ce logiciel utilise le réseau satellitaire pour transférer vidéos, textes et logiciels sans passer par le réseau filaire, lent et censuré.

Par  (Téhéran, correspondance)

Publié le 01 avril 2016 à 16h50, modifié le 04 avril 2016 à 08h17

Temps de Lecture 3 min.

Le logo du logiciel Toosheh.

« Accéder au site souhaité est impossible. Cliquez ici si vous voulez faire recours contre cette décision. » Les Iraniens ont l’habitude de voir ce message s’afficher sur leur écran d’ordinateur lorsqu’ils cherchent à aller sur YouTube ou sur les réseaux sociaux populaires dont Facebook et Twitter. La liste des contenus bloqués sur la Toile iranienne, allant des sites d’informations, aux sites parlant de la mode, en passant par les pages publiant de paroles de chansons, ne cesse de s’allonger. Cette situation a poussé les Iraniens à utiliser très massivement différents logiciels pour contourner la censure, notamment les réseaux privés virtuels (VPN).

La vitesse de la connexion à Internet constitue une autre difficulté pour les internautes iraniens – 82 % d’une population de 79 millions – car elle peut descendre tellement bas que certains sites, même non-censurés, mettent une éternité à se charger. Cette situation est plus fréquente au moment des événements politiques, par exemple élections ou protestations, notamment celles survenues a la suite de la réélection controversée, en juin 2009, de Mahmoud Ahmadinejad (2005-2013). Tout cela fait que surfer sur Internet en Iran reste une expérience unique, relevant parfois du parcours du combattant.

Contournement de la censure… et des lenteurs du réseau

Or, depuis le début du mois de mars, une nouvelle technologie, nommée Toosheh, a suscité l’espoir chez les Iraniens pour un accès plus facile et plus rapide aux contenus censurés. Il s’agit d’une nouvelle plateforme qui propose des contenus numériques, non pas via Internet mais avec les équipements pour capter les chaînes satellites, un ordinateur et une clé USB qu’on branche sur le récepteur satellite. Grâce à Toosheh, désormais les Iraniens peuvent tous les jours télécharger un 1 Gb de contenus : sites d’informations bloqués en Iran, livres censurés, vidéos des chanteurs iraniens vivant à l’étranger, podcasts, tutoriels et mêmes des logiciels anti-filtrage.

En Iran, bien que la disposition des équipements pour capter les chaînes satellites (parabole et récepteur) soit interdite et passible d’une amende entre 25 et 125 euros, au moins 70 % des Iraniens ont accès à ces chaînes.

« L’idée de Toosheh [qui signifie « c’est dedans », en persan familier] est née lorsque, en 2005, pendant un mois, je me suis contenté d’un accès à Internet par ligne commutée [la technologie précédant le haut débit], explique l’Irano-Américain Mehdi Yahyanejad, à la tête de l’équipe de Toosheh. C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte de l’expérience frustrante des gens qui n’ont pas d’Internet rapide. Ce manque a, à mon sens, créé un décalage culturel entre les Iraniens, qui, d’ailleurs, ne peuvent pas trop voyager à l’étranger, et le reste du monde. »

Pour pouvoir recevoir les contenus de Toosheh, il faut d’abord télécharger et installer sur l’ordinateur son logiciel, accessible sur Internet. Ensuite, il faut chercher les références de la chaîne Toosheh sur le satellite YahSat, qui diffuse également des chaînes de divertissement, en langue persane et très populaires en Iran, comme Manoto, diffusé depuis Londres. Un choix fait par l’équipe de Toosheh, basée aux États-Unis, qui souhaite un maximum d’accessibilité de ses contenus auprès des Iraniens. « En plus, la position du satellite YahSat est telle que brouiller ses ondes [l’une des méthodes de l’Etat iranien pour se battre contre les chaînes satellites] est presque impossible », explique Mehdi Yahyanejad, aussi chercheur à l’Université de Californie du Sud.

Contenus gratuits

Autre privilège de Toosheh : les contenus sont offerts gratuitement alors que le prix d’Internet est très élevé en Iran ; chaque gigaoctet de données coûte à peu près 1,30 euro, alors que le salaire mensuel moyen est de 250 euros.

Les contenus de Toosheh sont choisis en fonction de l’intérêt des internautes iraniens. « Nous avons déjà effectué trois sondages auprès de centaines d’Iraniens pour savoir ce qu’ils veulent, souligne Mehdi Yahyanejad. De plus, notre équipe suit de nombreux Iraniens sur les réseaux sociaux, notamment Twitter, pour connaître ce qu’ils aiment et ce qu’ils partagent avec les autres. »

Pour télécharger les contenus de Toosheh, mis à jour de manière quotidienne, il faut entre une et deux heures. Toosheh affirme s’acquitter des droits d’auteur pour tous les fichiers proposés alors que l’Iran n’est pas signataire de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques.

Lancé début mars et gratuit, le service compte pour l’instant 25 000 téléchargements du logiciel et l’équipe a reçu des milliers d’emails, ce qui est surprenant vu le peu de couverture médiatique qu’a reçu Toosheh. Si aujourd’hui choisir entre les contenus proposés n’est pas possible, l’équipe travaille afin d’ajouter cette option.

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« L’étape d’après sera de pouvoir brancher directement le téléphone portable sur le récepteur et obtenir les contenus sans qu’il n’y ait besoin ni de clé USB, ni d’ordinateur », explique Mehdi Yahyanejad. Aujourd’hui, 40 millions d’Iraniens ont au moins un smartphone, alors que nombreux sont ceux qui n’ont pas d’ordinateur.

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