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Les banques françaises font un tiers de leurs bénéfices dans des pays à fiscalité avantageuse

Extrait du rapport CCFD-Terre Solidaire paru en mars 2016.

LE SCAN ÉCO - Un rapport récent a analysé les activités des cinq plus grandes banques françaises dans des pays à la fiscalité très avantageuses à partir de données inédites publiées dans leurs rapports annuels de 2015.

C'est tout nouveau: les banques françaises et européennes sont désormais tenues de rendre publiques des informations sur leurs activités dans tous les territoires où elles sont présentes. Les données des cinq plus grandes banques françaises ont été analysées par le CCFD-Terre Solidaire, Oxfam France et le Secours Catholique.

• Un tiers des bénéfices dans les paradis fiscaux

«À l'international, alors que les banques françaises réalisent un tiers de leurs bénéfices dans les ‘paradis fiscaux', ceux-ci ne représentent qu'un quart de leurs activités internationales déclarées, qu'un cinquième de leurs impôts et seulement un sixième de leurs employés», écrivent les auteurs du rapport publié il y a trois semaines. La définition de «paradis fiscal» est très large dans cette étude: certains pays considérés, comme le Luxembourg ou la Belgique, proposent une fiscalité avantageuse aux entreprises (de manière légale), mais ne figurent pas sur la fameuse liste noire de l'OCDE des paradis fiscaux non coopératifs.

Malgré tout, cette étude extrait des chiffres qui témoignent de la déconnexion entre les territoires où les banques ont des activités et des salariés et ceux où elles dégagent des bénéfices.

Extrait du rapport CCFD-Terre Solidaire paru en mars 2016.

Avec plus d'1,7 milliard d'euros de bénéfices enregistrés, le Luxembourg est la destination privilégiée des banques françaises parmi les 34 pays bénéficiant d'une fiscalité avantageuse dans lesquels elles sont implantées. En Europe, la Belgique (1,66 milliard), l'Irlande (272 millions), et les Pays-Bas (189 millions), et en Asie, Hong-Kong (436 millions) et Singapour (346 millions) sont au premier plan de la stratégie des groupes français à l'international.

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• Les enseignements à retenir des nouvelles données exploitables

Les députés français ont été les premiers à introduire un «reporting» pays par pays pour les banques françaises dans la loi bancaire de 2013, ce qui a alors facilité l'adoption par l'Union européenne d'exigences identiques pour toutes les banques européennes. Après un premier exercice partiel de transparence en 2014 où seules trois informations étaient requises, les banques françaises ont publié pour la première fois en 2015 l'ensemble des informations: leurs filiales, bénéfices, chiffre d'affaires, nombre d'employés, impôts payés et subventions reçues dans chacun des pays dans lesquels elles ont une activité.

Extrait du rapport CCFD-Terre Solidaire paru en mars 2016.

• La Société générale, banque la plus rentable dans les pays à fiscalité avantageuse

La Société générale est la banque pour laquelle «l'écart de profitabilité entre les «paradis fiscaux» et les autres pays est le plus important: à volume d'activité égal, ses activités dans les paradis fiscaux rapportent quatre fois plus que dans les autres pays», apprend-on dans le rapport. «Si l'on compare avec la France, l'écart se creuse davantage: pour un même niveau de production, les activités du Crédit Agricole et de la Société Générale sont respectivement 19 fois et 16 fois plus rentables dans ces pays qu'en France.

Extrait du rapport CCFD-Terre Solidaire paru en mars 2016.

En Irlande, les activités de la Société générale dégagent 18 fois plus de bénéfices que dans les autres pays et six fois plus qu'en France.

• Que font les banques dans ces pays

- Les banques peuvent tout d'abord transférer artificiellement leurs bénéfices d'une filiale vers une autre située dans des pays à fiscalité moindre pour réduire leurs propres impôts. Cette technique, mise en évidence par de récents scandales (Ikea, Mc Donald's, etc.), est largement utilisée par les entreprises multinationales: elle leur permet de réduire leur assiette imposable dans les pays où a lieu l'essentiel de leur activité.

- Les banques peuvent également servir d'intermédiaires et faciliter l'évasion fiscale de leurs clients, particuliers ou entreprises, grâce aux services qu'elles offrent dans les paradis fiscaux, comme l'ont notamment montré les scandales UBS et HSBC.

- L'opacité qui règne dans les paradis fiscaux peut permettre aux banques de contourner leurs obligations réglementaires et d'y mener des activités hautement lucratives ou des activités spéculatives et risquées sans lien avec l'économie réelle.

«L'enjeu est désormais d'étendre cette obligation à l'ensemble des secteurs économiques. La multiplication des scandales d'évasion fiscale touchant les grandes multinationales démontre que ce n'est pas une pratique isolée à un secteur et qu'il y a urgence à agir», commentent les auteurs de l'étude. Pierre Moscovici, commissaire européen, est confiant: «Je peux vous dire que cela verra le jour, car ça me paraît aller tout simplement dans le sens de l'histoire. Et on ne résiste pas à ce vent-là.»

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