Patrick Buisson a survécu au changement de gouvernance à TF1. D'après nos informations, le mandat de l'ex-conseiller de Nicolas Sarkozy, 66 ans, à la tête de la chaîne Histoire, propriété du groupe audiovisuel, vient d'être renouvelé pour un an. La décision, prise depuis plusieurs semaines, a été formalisée le 11 avril lors d'une assemblée générale de la société éditrice d'Histoire. Contacté par Libération, le groupe TF1 a confirmé l'information.

C'est une petite surprise. Peu avant la prise de fonction de Gilles Pélisson, qui a remplacé Nonce Paolini comme patron de TF1 le 18 février, la Lettre de l'audiovisuel écrivait que le nouveau boss s'était résolu à se débarrasser de l'encombrant M. Buisson. Directeur général d'Histoire depuis 2007, celui-ci a été mis en examen en juillet pour «recel de délit favoritisme», «détournement de fonds publics par un particulier» et «abus de biens sociaux» dans l'affaire des sondages de l'Elysée. L'homme est également en disgrâce auprès son ancien mentor politique, Nicolas Sarkozy, depuis qu'on a appris, en mars 2014, qu'il avait secrètement enregistré des conversations privées de l'ex-chef de l'Etat et de son entourage.

Pas de quoi, visiblement, lui faire perdre la confiance de Martin Bouygues, le premier actionnaire du groupe audiovisuel. Il faut dire que la chaîne Histoire, un actif plutôt confidentiel dans la galaxie TF1, est une affaire rentable. En 2014, elle a dégagé un résultat de 1,1 million d'euros pour à peine 5 millions d'euros de chiffre d'affaires. Soit une marge supérieure à 20%, qui remonte intégralement à la maison mère. Encouragée par ses résultats, TF1 a racheté l'an dernier la part du capital (20%) de la chaîne détenue jusque-là par l'Américain Discovery.

Peut-être Martin Bouygues préfère-t-il aussi éviter de fâcher Patrick Buisson. D'après un article du Monde de mars 2014, l'ex-journaliste de Minute et Valeurs actuelles, tête pensante de la «droitisation» de Sarkozy en 2012, a aussi enregistré des conversations avec Martin Bouygues… Selon la légende, c'est d'ailleurs l'ancien président de la République qui a demandé en 2007 au milliardaire, un ami personnel, de placer Buisson à Histoire, pour le remercier de sa contribution à sa victoire électorale.

Cette semaine, l'antenne de la chaîne Histoire est dévolue à une «spéciale guerre d'Algérie», avec des programmes dédiés tous les soirs. Cela n'a pas échappé au quotidien algérien El Watan, qui regrette le ton globalement nostalgique des émissions et débats. «A côté des documentaires sur la guerre d'Algérie à découvrir, car tout le cheminement de la colonisation à l'indépendance y est exposé, la chaîne entend malheureusement réécrire l'histoire en faisant croire que l'Algérie coloniale était une félicité pour tous et qu'elle n'aurait jamais dû prendre fin», écrivait le journal le 10 avril, la veille de la reconduction de Patrick Buisson à Histoire.