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« Il n'y a ni reniement, ni renoncement » sur la loi famille, selon Bertinotti

Entretien. La ministre chargée de la famille explique au « Monde » les raisons du report de son projet de loi annoncé, lundi, par Matignon.

Propos recueillis par  (Berlin, correspondant)

Publié le 05 février 2014 à 08h29, modifié le 05 février 2014 à 10h18

Temps de Lecture 5 min.

Dominique Bertinotti lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale le 4 février.

Ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, Dominique Bertinotti avait annoncé, le 16 janvier, que son projet de loi sur la famille, à l'origine programmé pour le printemps 2013, serait présenté en conseil des ministres en avril. Moins de trois semaines plus tard, lundi 3 février, Matignon a affirmé que cela n'interviendrait finalement pas cette année.

Après l'annonce du report du projet de loi sur la famille, comment pouvez-vous accepter ces reculades successives ? Pourquoi ne démissionnez-vous pas ? D'ailleurs, y avez-vous songé ?

Dominique Bertinotti : Non, je n'y ai jamais songé. Je fais de la politique depuis suffisamment longtemps pour savoir qu'elle n'est pas un long fleuve tranquille et que ce n'est pas forcément en claquant la porte quand les choses sont difficiles que l'on arrive à ses fins. Pour moi, dans cette affaire, l'essentiel est que le gouvernement garde son cap. Or c'est le cas. Le premier ministre l'a bien dit hier à l'Assemblée nationale : évoquant les réformes prévues dans le projet de loi sur la famille, « le travail va se poursuivre et sera mené à bon port », a-t-il dit. Nous gardons donc le cap, même s'il faudra peut-être emprunter d'autres chemins que ceux prévus à l'origine.

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Vous faites référence à l'idée, évoquée mardi par plusieurs députés socialistes, de propositions de loi qui pourraient reprendre les principales dispositions de votre projet de loi ?

Je constate que, d'ores et déjà, des parlementaires réfléchissent à la façon dont eux-mêmes pourraient faire avancer les choses sous forme de proposition de loi. C'est une idée. Rien n'est arrêté. L'essentiel est qu'il y a ni reniement ni renoncement.

En annonçant le report de la loi famille au lendemain de nouvelles manifestations organisées par les opposants au mariage gay, n'envoyez-vous pas un signal politique désastreux ? Désormais tous ceux qui combattent le gouvernement vont se dire qu'il suffit de défiler dans la rue pour le faire plier…

Je comprends que l'on puisse voir les choses ainsi mais, objectivement, la situation était devenue très compliquée. Chaque fois que le gouvernement répétait que ni la procréation médicalement assistée (PMA) ni la gestation pour autrui (GPA) ne figureraient dans le projet de loi, l'opposition rétorquait en disant que la majorité parlementaire allait de toute façon introduire l'une et l'autre par voie d'amendements. A cause de cette focalisation totalement infondée sur la PMA et la GPA, il nous a été impossible d'expliquer sereinement ce que contenait le projet de loi famille. La spirale de la désinformation était devenue telle qu'il fallait sortir de cette situation absurde.

Il y a un an, pendant l'examen du projet de loi sur le mariage gay, l'opposition agitait déjà le chiffon rouge de la PMA et de la GPA. Cela ne vous a pourtant pas empêché de tenir bon…

En effet, la loi a été adoptée et, un an après, force est de constater que, n'en déplaise à ses opposants, l'ordre social n'est pas bouleversé... Mais on ne peut pas non plus continuer éternellement avec des manifestations, chaque semaine, qui diffusent de fausses informations et remettent en cause la légitimité du pouvoir démocratique. Tout cela crée un climat malsain et délétère qui ne peut pas durer. Au moment où le président de la République lance le « pacte de responsabilité », où l'accent est mis sur la lutte contre le chômage et la nécessité de doper la croissance, il faut absolument recréer un climat de confiance. Or celui-ci ne peut pas naître sur un terreau de contestation permanente.

Sur Canal +, mardi soir, vous avez appelé à une « mobilisation citoyenne », en expliquant que « ça s'appelle aussi la démocratie que d'avoir des manifestants dans les rues ». Qu'avez-vous voulu dire ?

Je pense que ceux qui veulent faire avancer les choses doivent davantage se faire entendre. L'année dernière, pendant le débat sur le mariage pour tous, les opposants se sont fait davantage entendre. Face à la mobilisation de la droite réactionnaire, je souhaite aujourd'hui un sursaut d'une France généreuse et ouverte. Cela ne veut pas forcément dire qu'il faut répondre aux manifestations par des contre-manifestations. Mais il faut désormais une vraie mobilisation, sur les réseaux sociaux, par des tribunes dans la presse… Bref, il faut que l'opinion publique se mobilise.

Etes-vous toujours favorable à la PMA ?

La question de la PMA se reposera forcément un jour ou l'autre dans la mesure où elle se pratique dans d'autres pays proches de nous, comme la Belgique ou l'Espagne. Mais ça n'est pas le sujet aujourd'hui. En tant que ministre, je veux me concentrer sur d'autres points : la médiation, l'adoption, le statut de beau parent, etc. Ce sont des questions qui ne sont ni de gauche ni de droite et qui concernent toutes les familles.

Lire le suivi de la promesse : PMA, GPA : du report... à l'abandon ?


Le débat autorisé, mais surveillé

L'objectif du gouvernement, en retirant la réforme Bertinotti, était « d'avoir sur les questions de famille un débat apaisé » , a expliqué, mercredi, Alain Vidalies, le ministre des relations avec le Parlement sur iTélé. « Nous travaillons sur une loi famille qui concerne la vie quotidienne des Français », des « choses très simples », « qui concernent des centaines de milliers de Français », a-t-il dit en évoquant le statut des beaux-parents ou la médiation familiale. « Le Parlement, ce qui est normal, va reprendre l'initiative », a-t-il dit. Il a laissé entendre qu'une de ces dispositions – l'accès aux origines pour les enfants nés sous X – pourrait faire partie d'un projet de loi ultérieur. Quant à la PMA, « personne ne peut dire que ce débat est fini pour l'éternité ». Il a redit l'opposition du gouvernement à la gestation pour autrui : pas de GPA, « ni aujourd'hui, ni demain ».

Marisol Touraine, la ministre de la santé, n'a pas non plus fermé la porte à des propositions de loi sur la famille après le report du projet de loi. « S'il y a des propositions de loi, de toute façon, cela relève de la seule décision du groupe socialiste (...) il y a une marge d'autonomie complète qui est laissée aux parlementaires », a dit la ministre sur RFI. Elle a toutefois réaffirmé que le gouvernement ne souhaitait pas « voir apparaître des discussions » sur la procréation médicalement assistée (PMA) et la gestation pour autrui (GPA).

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