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Amérique du Nord

Les femmes interdites d'accès à un club de Harvard pour ne pas être violées

L'université d'Harvard sous la neige (image d'illustration)

L'université d'Harvard sous la neige (image d'illustration) - Maddie Meyer-Getty Images-AFP

Un club exclusivement masculin de l'université de Harvard, aux Etats-Unis, a justifié sa politique de non-mixité de manière surprenante. L'affaire a suscité un tollé et le président du groupe des anciens a dû démissionner.

Pas de femmes… pour leur éviter qu'elles soient violées. C'est, en substance, l'argumentation donnée par un club très sélect de l'université de Harvard, aux Etats-Unis, pour justifier l'interdiction faite aux jeunes filles d'en devenir membres.

Le Porcellian est l'un des plus anciens clubs de ce célèbre établissement d'enseignement supérieur de Cambridge, dans le Massachusetts. Il n'intègre depuis sa création en 1791 que l'élite, de jeunes hommes issus de familles riches et influentes. L'ancien président Theodore Roosevelt en fut un. Mais jamais aucune femme.

"En contradiction avec les aspirations de la société"

Une politique qui contrarie le président de cette université. Car depuis 1984, son règlement stipule que tous les clubs créés sur le campus doivent impérativement être mixtes, rapporte The New York Times.

Dans The Harvard Crimson, un journal étudiant, le doyen de Harvard Rakesh Khurana a déclaré qu'il était grand temps de faire place au changement.

"L'université a depuis de nombreux mois clairement indiqué que les comportements et les attitudes adoptées par les organisations sociales non-mixtes du Harvard College sont en contradiction avec les aspirations de la société du XXIe siècle auxquelles nos étudiants contribuent."

"Augmenter le risque d'inconduite sexuelle"

Le club avait jusqu'à vendredi dernier pour se mettre en conformité avec le règlement. Deux jours avant la date limite, un de ses représentants a expliqué, dans le même journal étudiant, qu'il ne plierait pas. Et a justifié cette non-mixité: si les femmes sont interdites d'entrée, c'est tout simplement pour ne pas qu'elles soient agressées sexuellement. 

"Forcer les organisations du même sexe à accepter des membres du sexe opposé pourrait potentiellement augmenter, et non diminuer, le risque d'inconduite sexuelle", a estimé Charles Storey, président du groupe des anciens du Porcellian Club.

Le Porcellian, un "bouc émissaire"

Selon lui, le Porcellian est un "bouc émissaire" du rapport March, publié début mars. Cette étude, réalisée sur les agressions sexuelles à Harvard, tend à prouver que les clubs non-mixtes et indépendants participeraient au contraire à la prolifération des agressions sexuelles sur le campus. Ainsi, près d'une femme interrogée sur deux a déclaré avoir déjà été victime de "contact sexuel non-consenti" lors des événements organisés par ces clubs.

Une déclaration qui a sans surprise suscité l'indignation. "Au lieu de blâmer les femmes, vous pourriez mettre l'accent sur l'enseignement aux membres de votre club de ne pas agresser sexuellement les gens", a déclaré sur Twitter la représentante démocrate du Massachusetts, Katherine Clark.

Un compte Twitter caricatural dénonce le sexisme de ce club, et se présente comme "une parodie du plus ancien et du plus ouvertement misogyne club de Harvard. Si le compte est une plaisanterie, les règles ne le sont PAS." A l'exemple de cette publication, qui tourne en dérision les justifications du club à la non admission de femmes en son sein: "Nombre total de femmes admises dans le club jusqu'à présent : 0. Nombre total de femmes agressées dans le club jusqu'à présent : 0."

Ou encore ce tweet "Avis aux membres : veuillez donner votre réponse à la cérémonie de printemps. A titre d'information : ni femme, enfant, poisson rouge ou tout autre être faible et sans défense ne sont acceptés."

Face au tollé, Charles Storey a présenté ses excuses. Et démissionné. "Je vous ai écoutés et j'ai longuement réfléchi à ce que j'avais fait. En disant plus tôt que mes propos avaient été mal interprétés, je n'ai pas pris toute mes responsabilités. Je le fais maintenant. J'ai eu tort. Je n'ai pas d'excuse."

A Harvard, six clubs n'ouvrent toujours pas leurs portes aux femmes.

Céline Hussonnois Alaya