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Notre-Dame-des-Landes

Conférence environnementale, le gouvernement entre discours creux et hypocrisie

La quatrième et dernière conférence environnementale du quinquennat d’Hollande a commencé lundi 25 avril. Loi de transition énergétique sans effet faute de feuille de route, fermeture de centrales nucléaires renvoyée en 2018, refus de laisser entrer des membres de la société civile pourtant invités…

-  Paris, reportage

La première conférence promettait « l’excellence environnementale », la dernière aura consacré la « supercherie ». Pour la quatrième et dernière conférence environnementale de son quinquennat, ouverte lundi 24 avril au matin, François Hollande n’a pas dérogé à la règle : de « fausses » annonces pour maquiller une ambition écologique en berne.

À l’Élysée, où une grande partie du gouvernement était réunie aux côtés d’élus et de représentants associatifs, il fut beaucoup question de la COP21, trois jours après la signature officielle de l’accord de Paris à New-York, au siège des Nations unies. Un sujet sur lequel « on peut être fiers collectivement », a jugé le président de la République : « Dans l’Histoire, il sera toujours dit que c’est à Paris que s’est fait cet accord. »

François Hollande et sa ministre de l’Environnement, Ségolène Royale, lundi 25 avril, à l’Élysée.

Un accord dont la loi de transition énergétique (LTE), promulguée l’été dernier, se voulait une traduction concrète en France. Sauf que son principal outil, la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), n’est toujours pas en place. Attendue pour début mars, la PPE avait finalement été repoussée une énième fois à juillet. « Le projet de PPE sera soumis à consultation d’ici au 1er juillet pour une adoption à l’automne », a ainsi déclaré le président de la République, qui a par ailleurs promis la publication avant l’été des décrets d’application de la loi de transition — près des trois quarts sont attendus

« Fermer des centrales n’est pas une décision qui s’improvise »

Censée établir la feuille de route énergétique des prochaines années, la PPE capote sur la question du nucléaire, dont la LTE prévoit la réduction à 50 % dans le mix énergétique en 2025. À ce sujet, François Hollande s’est fendu d’une nouvelle promesse : le décret d’abrogation de l’autorisation d’exploiter Fessenheim sera signé cette année. « EDF devra proposer la fermeture de certaines centrales et la prolongation d’autres », a assuré le chef de l’État, précisant que « fermer des centrales n’est pas une décision qui s’improvise, elle doit se faire selon un calendrier précis ». En l’occurrence, ce calendrier mène à… 2018, après le premier avis de l’ASN.

Autre objectif : « La France s’engagera unilatéralement à donner un prix-plancher au carbone », a assuré M. Hollande. Pour préparer cette décision, une mission a été confiée il y a quelques jours à Pascal Canfin, Alain Grandjean et Gérard Mestrallet afin d’établir des propositions « sur la mise en place d’un prix du carbone permettant d’orienter les investissements des citoyens, des élus, des entreprises vers les projets et les produits les plus favorables au climat ».

Cet engagement ne convainc pas Lorelei Limousin, chargée des politiques de transport au Réseau action climat : « Il a été beaucoup question du signal prix carbone dans le discours, mais à côté, le gouvernement n’assume pas ses responsabilités face à la baisse des prix du pétrole. Résultat, la consommation de carburant fossile est repartie à la hausse. Pour compenser cela, le taux de la composante carbone devrait être revalorisé à 40 euros la tonne de CO2. Et les exonérations qui bénéficient aux secteurs polluants devraient être progressivement supprimées. »

« Un délit de communication ? »

Le chef de l’État était attendu sur un autre sujet : Notre-Dame-des-Landes. Malgré la récente sortie de la ministre de l’Environnement sur le « surdimensionnement » du projet, le calendrier n’a aucunement été remis en cause. Il y aura bien une première consultation locale, le 26 juin prochain, dans le département de la Loire-Atlantique, avec « des informations transmises aux électeurs [qui seront] les plus objectives possibles, par le biais de l’autorité indépendante qu’est la CNDP [Commission nationale du débat public] ». À l’issue du vote, « le gouvernement prendra ses responsabilités pour suivre ou arrêter le projet », a dit François Hollande.

Les opposants à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ont été privés de conférence, malgré leurs invitations.

Pendant ce discours, à proximité de l’Élysée, des responsables des Amis de la Terre ainsi que des militants opposés aux grands projets inutiles se voyaient interdire l’entrée, malgré leurs invitations officielles à la conférence d’ouverture. Leur tort : avoir manifesté leur opposition au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes au moyen de banderoles et d’un déguisement d’avion en carton. « Un délit de communication ? » interroge Florent Compain, président des Amis de la Terre, qui fut tenu encerclé pendant près d’une heure par des policiers, aux côtés de figures de la lutte comme Françoise Verchère, François de Beaulieu ou Daniel Ibanez.

« Les autorités n’arrêtent pas de parler de démocratie et de dialogue environnemental, mais il faut le faire dans la transparence ! » regrette ainsi M. Compain. Et ce sont les Amis de la Terre et Reporterre qui ont assuré la publicité des discussions de la Conférence, en direct en vidéo et de manière certes imparfaite.


Compléments d’info :

-  le discours de clôture de Ségolène Royal et le dossier officiel de la Conférence

-  Manuel Valls affirme que « ce gouvernement est le plus écologique qui ait jamais existé ».

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