Entre montagnes et mers
Courrier Expat

Les nouveaux agriculteurs hongkongais

O Veg à Yuen Lung

Les jeunes Hongkongais se découvrent une âme de paysan. Ils se forment à l’agriculture biologique et tentent de recoloniser des terrains laissés en friche ou de s’installer dans les hauteurs, sur les toits des gratte-ciels, où poussent à merveille tomates, courges, salades et herbes aromatiques.

Le territoire  hongkongais couvre plus de 1 100 kilomètres carrés, mais la partie urbanisée n’occupe que 25 % du territoire, alors que ses parcs naturels et réserves en occupent environ 40 %. C’est donc, contrairement aux idées reçues, une ville située dans un nid de verdure. Il faut évidement inclure de nombreuses îles montagneuses, ce qui fait qu’il reste aujourd’hui peu d’espaces pour l’agriculture. Celle-ci a d’ailleurs été en partie abandonnée lors de la modernisation de Hong Kong et de nombreux terrains sont laissés en friche ou, pire, loués par leurs propriétaires comme dépôts de conteneurs et parkings qui défigurent le paysage. Il reste quelques maraîchers, qui fournissent la cité, mais il faut savoir que seulement 3 % des légumes consommés à Hong Kong sont produits localement.

De jeunes agriculteurs souvent en rébellion contre la vie urbaine

Pourtant, ces dix dernières années, beaucoup de choses ont changé. Les Hongkongais, méfiants notamment envers les produits venus de Chine, suite aux nombreux scandales tels que lait à la mélanine, faux œufs, huile frelatée ou viande artificielle, se soucient d’une nourriture naturelle et saine. Cela a encouragé la naissance d’une nouvelle tendance, celle de l’agriculture biologique avec, dans les Nouveaux Territoires, la création d’une centaine de fermes tenues en majorité par de jeunes agriculteurs au départ amateurs, qui se sont professionnalisés petit à petit.  Ils produisent les nombreuses variétés de légumes chinois et des fruits tels que fraises, bananes, papayes… Dans le nord des  Nouveaux Territoires, des rizières ont fait leur réapparition après quatre décennies d’absence en utilisant les techniques de l’agriculture biologique. Certains, comme Steve et Oriel, créateurs de O Veg, proposent même, sur réservation, une excellente cuisine végétarienne très sophistiquée dans un cadre original.

Ces jeunes agriculteurs sont souvent en rébellion contre la vie urbaine sous haute pression de Hong Kong, qui a toujours mis en avant l’argent et la compétition, et cherchent une autre façon de vivre, plus près de la nature. Mais ils doivent souvent se battre contre les promoteurs immobiliers et le gouvernement, souvent avides de terrains pour de nouveaux développements aux profits immédiats. Leur combat est donc aussi un combat de société. Ils sont cependant de plus en plus soutenus par la population et les mouvements écologiques et de protection du patrimoine de Hong Kong.

Trois cents jardiniers amateurs font pousser des tomates sur les toits de City Farm

Osbert Lam est un photographe et un saxophoniste bien connu. Il travaillait dans la publicité, mais depuis quelques années, après avoir fondé  une famille, il a commencé à chercher une forme de vie à ses yeux plus gratifiante et à se passionner pour le jardinage. Il a installé des boîtes ou paniers de terreau sur un toit d’immeuble et a cultivé ses propres légumes. Puis, devant le succès de sa récolte et l’intérêt de ses voisins, il a voulu faire partager sa passion. Son idée était  simple : permettre à chacun de produire ses propres légumes tout en découvrant le plaisir du jardinage en famille. Il a créé City Farm avec son épouse. City Farm loue actuellement trois toits d’immeubles industriels dans les quartiers de Quarry Bay, Kwun Tong et Tsuen Wan, équipés de boîtes de culture et loue ces boîtes de 19 à 22 euros pièce par mois (de 175 à 250 dollars de Hong Kong) à des jardiniers amateurs qui veulent cultiver leurs légumes ou familiariser leurs enfants avec l’agriculture comme loisir éducationnel.

Osbert  fournit en parallèle des cours d’initiation au jardinage. Un succès ! City Farm accueille maintenant plus de 300 jardiniers, emploie 8 personnes à plein temps et six à mi-temps. Il n’est pas le seul. La culture sur toit se développe de plus en plus, vu le grand nombre d’immeubles industriels aux toits vides. Cette agriculture reste fragile car non encore encadrée par les lois hongkongaises. Mais, pour Osbert, elle constitue un atout pour le futur : c’est une agriculture de proximité et elle est viable financièrement.

Les marchés biologiques se multiplient

De nombreux marchés ont vu le jour dans les différents quartiers de Hong Kong, notamment les dimanches, sur l’île de Hong Kong, à Island East Tai Koo Place, au Central Star Ferry Pier (quai n° 7), dans les Nouveaux Territoires à Tai Po Farmers Market et à Tuen Mun, mais de nombreux réseaux s’organisent par quartier et les fermes biologiques prennent les commandes sur Internet et assurent la livraison. Les Hongkongais mangent donc de mieux en mieux, d’autant plus que de nombreux restaurants se fournissent aussi dans ces fermes. On trouve facilement sur Internet tous les renseignements sur ces fermes, marchés et restaurants.