Alimentation - Viande : vous avez dit halal ?

REPORTAGE. Plongée dans l'univers du halal à quelques jours de la 3e édition des Journées consacrées aux produits respectant ses critères.

Par Founé Diarra

Alimentation - Viande : vous avez dit halal ?
Alimentation - Viande : vous avez dit halal ? © Journées du Halal

Temps de lecture : 5 min

« 100 % de la viande vendue en Ile-de-France est halal. Et ce, à l'insu des consommateurs , affirmait Marine Le Pen, en 2012, lors de la campagne présidentielle. Une illustration du fait qu'en France la question de la viande halal fait bien débat dans le public et dans l'enceinte politique. Dans le domaine alimentaire, là où le halal est le plus visible, la demande de la population musulmane de l'Hexagone, qui veut être en adéquation avec son éthique religieuse, est croissante. Voilà qui a conduit des professionnels de la filière halal de répondre à l'appel de Lynda Ayadi qui organise, depuis 2014, Les Journées du halal. But visé par cette directrice de l'agence Heaven Strategy : informer, discuter et instaurer le dialogue entre les consommateurs et les professionnels.

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Une filière peu connue

« Les scandales à répétition sur le faux halal, les polémiques politiques sur la circulation de la viande halal au sein du circuit conventionnel, le manque de confiance des consommateurs vis-à-vis des professionnels et des marques nous ont poussés à mener une réflexion pour répondre, d'une pierre deux coups, à ces problématiques », explique Lynda Ayadi. Aujourd'hui, le business de la filière halal est souvent évoqué, mais peu en connaissent vraiment les coulisses. Quelques chiffres : à l'échelle planétaire, le marché du halal représente environ 700 milliards de dollars de chiffre d'affaires par an et, d'ici à 2025, ce chiffre va quasiment tripler.

Visite à l'abattoir de Bondy...

De quoi susciter notre curiosité et nous conduire à rencontrer certains des professionnels du halal.  C'est au fond d'une cour à Bondy que nous entrons dans une boucherie halal. Ici, les clients peuvent directement acheter leurs volailles. La frontière entre la boucherie et l'abattoir est mince. Un sas délimite les deux endroits distincts. Le temps d'un après-midi, M'Bark Elouargui, gérant de l'abattoir, endosse le rôle de guide, comme plusieurs de ses collègues. « C'est un abattage manuel et nous travaillons avec des producteurs d'Ile-de-France et de province », précise-t-il. La vue du sang révulse une des personnes qui nous accompagne. « Il faut du temps avant que la volaille ne se vide », lui indique M'Bark Elouargui, qui nous montre le bout de la chaîne d'abattage où les bouchers procèdent au déplumage de la volaille.

... en famille

Salima, venue avec ses deux enfants, apprécie en famille. « Je suis venue avec mes enfants pour leur montrer ce qu'est qu'un abattoir. C'est important qu'ils sachent comment une volaille est sacrifiée », dit-elle, profitant de cette journée d'information. « Nous voulons montrer aux consommateurs, musulmans ou non, comment nous travaillons, car, ces dernières années, beaucoup de propos virulents ont été prononcés sur le halal », déplore-t-il devant Sana, une jeune institutrice qui déguste son hot-dog. « L'initiative est super intéressante et cela nous permet, à nous clients, de voir un peu comment s'organisent la filière du halal et la traçabilité des produits », se réjouit la jeune femme

Détour par les services de certification AVS

De Bondy, direction Saint-Denis. Le cadre est beaucoup plus solennel dans les bureaux de l'organisme de certification halal AVS (À votre service). L'abattage traditionnel, la pratique de l'électronarcose et l'impact du faux halal – mais pas que – sont des thèmes sur lesquels les dirigeants et les employés de la structure discutent.

AVS met un point d'honneur à avoir, constamment, la présence d'un contrôleur au moment de la mise à mort des bêtes. « Nous avons mis au point une traçabilité qui nous est propre, avec des codes qui changent toutes les semaines. Cette façon de faire nous permet de reconnaître et d'identifier les produits que nous avons, en amont, certifiés et contrôlés halal, et que l'on peut retrouver facilement dans les commerces au détail. Cette façon de procéder garantit aux consommateurs musulmans que ce qui est caractérisé comme halal l'est réellement », précise Fouad Imarraine, de l'organisme certificateur. Et, pour enfoncer le clou de l'authenticité du halal, le voilà qui explique l'importance du témoignage « qui est un gage de qualité qui s'inscrit dans le cahier des charges d'AVS ».


Halal et bio : la compatibilité organisée 

« Je rêve qu'enfin le bio soit accessible à tous, femmes, enfants, familles ». Voilà ce qu'on a pu entendre dans un spot publicitaire d'une célèbre enseigne française de grande distribution. « Patrick, le bio est la portée de tous, ça existe déjà », entend-on dans la réplique. Oui, sauf qu'à une époque... le bio pour les musulmans désireux de consommer des produits carnés, ce n'était pas possible. Désormais, c'est de l'histoire ancienne ! Aujourd'hui, des sociétés spécialisées comme Bionoor ou Biolal existent. Et il faut également composer avec les jumeaux, Karim et Slim Loumi, deux amoureux de la viande qui ont su allier principe religieux et alimentation saine en ouvrant la première boucherie bio et halal de France, qu'ils ont baptisée Les Jumeaux. Elle se trouve aux Lilas, dans la banlieue parisienne.

Payer la qualité

Mamadou, accompagné de ses deux amis, se dit satisfait de trouver une viande halal de qualité, à l'instar de ce qu'il a pu goûter à Londres. « Depuis que j'ai découvert Les Jumeaux, je viens tout le temps. Ce qui est bien avec ces bouchers, c'est qu'ils donnent des suggestions sur quel type de viande prendre, comment la cuire. Ils prennent le temps de nous conseiller », déclare-t-il. « Cela nous permet de savoir ce qu'il y a dans nos assiettes, en tout cas ce qu'on achète ici, de voir un peu ce qui justifie le prix parce que, par rapport au commerce de base, c'est quasiment le triple », dit un client.

« Les consommateurs ainsi que les professionnels nous ont fait part de leur grande satisfaction », s'enthousiasme Lynda Ayadi, qui entend bien aborder la troisième édition des Journées du halal avec le même souci de clarté et de transparence. « Ce n'est pas un salon », explique-t-elle. « Ce sont des journées portes ouvertes avec des ateliers divers et des tables gourmandes », poursuit-elle. Ce sera du 12 au 15 mai prochain, en région parisienne.