Un Pakistanais raconte les tortures et sa fuite après 5 ans de captivité

AFP

Les riverains se regroupent devant le restaurant où Shahbaz Taseer, fils du gouverneur libéral du Pendjab Salman Taseer, a été retrouvé par les forces de sécurité après sa libération le 8 mars 2016 à Quetta au Pakistan
Les riverains se regroupent devant le restaurant où Shahbaz Taseer, fils du gouverneur libéral du Pendjab Salman Taseer, a été retrouvé par les forces de sécurité après sa libération le 8 mars 2016 à Quetta au Pakistan © AFP/Archives

Temps de lecture : 3 min

Fouetté, tailladé et enterré vivant: un Pakistanais, otage de groupes islamistes pendant près de 5 ans, a dévoilé mardi les tortures subies avant sa fuite et son retour quasi-miraculeux parmi les siens au début de l'année.

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Shahbaz Taseer, fils d'une grande figure politique pakistanaise, le gouverneur libéral du Pendjab Salman Taseer, avait été kidnappé le 26 août 2011 à Lahore, grande ville du centre du Pakistan. Le rapt avait eu lieu quelques mois à peine après l'assassinat de son père par un extrémiste.

Dans ses toutes premières interviews depuis sa réapparition le 8 mars, le trentenaire évoque notamment les sévices infligés par ses ravisseurs, selon lui des extrémistes islamistes ouzbeks.

"Pendant un an, j'ai été torturé, pour ces vidéos hollywoodiennes extravagantes destinées à ma famille, afin de faire pression sur eux et sur le gouvernement", a-t-il raconté au micro de la chaîne CNN.

"Ils m'ont tailladé le dos avec des lames, mettant du sel sur les plaies. Ils m'ont cousu la bouche, et m'ont affamé", poursuit-il.

"Ils m'ont arraché les ongles des mains et des pieds" a-t-il précisé au service ourdouphone de la BBC, ajoutant avoir été enterré vivant plusieurs jours d'affilée.

Outre ces mauvais traitements, M. Taseer dit avoir fait l'objet de fréquents transferts d'un lieu à l'autre, entre les zones tribales du Nord-ouest du Pakistan, et l'Afghanistan voisin.

"J'ai eu beaucoup de chance de survivre à deux frappes de drones (américains, NDLR). Lors d'un raid aérien, je me trouvais à moins de 100 mètres de là où la bombe est tombée," indique encore M. Taseer à la BBC.

- "Victoire personnelle" -

Décrivant sa survie comme une "victoire personnelle", il dit avoir "passé quatre ans et demi à penser qu'(il) ne reverrait pas les gens qu'(il) aimait".

Photographie, transmise par les services de presse pakistanais ISPR le 9 mars 2016, de Shahbaz Taseer à Quetta au Pakistan © Inter Services Public Relations ISPR/AFP/Archives
Photographie, transmise par les services de presse pakistanais ISPR le 9 mars 2016, de Shahbaz Taseer à Quetta au Pakistan © Inter Services Public Relations ISPR/AFP/Archives

Selon Shahbaz Taseer, ses geôliers voulaient l'échanger contre de l'argent et 25 extrémistes emprisonnés.

Une source au sein du mouvement taliban avait affirmé au moment de sa libération qu'une rançon de jusqu'à 2 milliards de roupies (environ 17 millions d'euros) avait été exigée pour relâcher Shahbaz Taseer.

Mais l'intéressé assure qu'il n'y a eu ni rançon ni échange, alimentant un flot de spéculations autour de ce qui est apparu comme un retour quasi-miraculeux.

Le jeune homme dit avoir été capturé et emprisonné par des talibans afghans à l'issue d'affrontements en 2015 entre ces derniers et des membres du Mouvement islamique d'Ouzbékistan (IMU), qui le détenaient jusqu'alors.

Les talibans "refusaient de croire que j'avais été kidnappé, ils m'accusaient d'être un Ouzbek", explique Shahbaz Taseer, indiquant avoir été "condamné à la prison" par les insurgés.

Il dit avoir alors reçu l'aide d'un taliban pour s'échapper, quittant sa prison d'Uruzgan en Afghanistan le 29 février, et marchant jusqu'au Baloutchistan, au sud-ouest du Pakistan, d'où il a finalement pu téléphoner à sa mère depuis un restaurant le 8 mars.

Peu après son retour, il avait captivé les internautes en livrant sur Twitter, via le mot dièse #AskST, des bribes de son épreuve et ses joies après avoir retrouvé son épouse. Mais il était resté avare de détails sur le déroulement de sa captivité.

Shahbaz Taseer a été retrouvé une semaine après la pendaison de l'assassin de son père, le gouverneur Salman Taseer, tué parce qu'il s'était déclaré favorable à une réforme de la loi sur le blasphème.

L'assassinat de Salman Taseer a fait de lui une icône des réformateurs, et sa famille s'est retrouvée dans le viseur des islamistes armés orchestrant les violences au Pakistan depuis 2004.

Son meurtrier, Mumtaz Qadri, qui était l'un de ses gardes du corps, est quant à lui devenu un héros des ultra-conservateurs, et des centaines de milliers de ses partisans ont manifesté après son exécution.

Un autre trentenaire enlevé il y a plusieurs années, Ali Haider Gilani, fils de l'ancien chef du gouvernement pakistanais Yousaf Raza Gilani, a été retrouvé et libéré en Afghanistan, lors d'une opération antiterroriste américano-afghane la semaine dernière.

17/05/2016 13:58:04 -  Islamabad (AFP) -  © 2016 AFP