L’association militante L214 avait publié mercredi 25 mai des images, tournées en avril, montrant des poules entassées dans des cages à perte de vue, une prolifération de poux et d’asticots, ainsi que des cadavres en état de décomposition avancée et des accumulations de fiente.

Les réactions s’étaient enchaînées : Matines, numéro un des œufs en France et propriété du groupe Avril, avait décidé de ne plus s’approvisionner auprès de l’élevage défaillant, Intermarché renonçant de son côté à vendre sa production.

Vider et nettoyer les bâtiments sous trois semaines

Le ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, avait assuré qu’il fermerait l’établissement si nécessaire, comme le réclamait L214, qui avait été informé par des membres du personnel qui ont joué le rôle de lanceurs d’alerte.

Sa collègue de l’Environnement, Ségolène Royal, avait exigé une inspection et une décision « dans la journée » au préfet de l’Ain. C’est finalement deux jours plus tard que le préfet a ordonné de vider et nettoyer les bâtiments sous trois semaines.

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Un élevage en difficulté économique

« Cet élevage est en très grande difficulté économique, avec un nombre d’employés devenu insuffisant pour remplir correctement les tâches quotidiennes d’un élevage. L’activité ne peut plus être assurée dans le respect des normes environnementales », justifie le préfet Laurent Touvet.

« Les 300 000 poules présentes dans l’établissement (200 000 poules pondeuses adultes et 100 000 poulettes) seront abattues ou vendues à des tiers » pour être transformées en farine pour l’alimentation animale, a précisé le préfet.

Le Gaec du Perrat, situé à Chaleins, près de Villars-lès-Dombes, pourra ensuite « repartir sur des bases saines » ou procéder à une liquidation judiciaire, ce qui semble plus « vraisemblable » compte tenu de ses difficultés économiques, a-t-il ajouté. Le Tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse avait nommé un administrateur depuis mars.

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Abattage ou adoption ?

« Je vais abattre mes poules et mes poulettes car mes fournisseurs me lâchent, je n’ai plus de quoi nourrir mes bêtes. Je vais aussi devoir arrêter l’élevage porcin qui ne représente que 30 % de mon chiffre d’affaires », a déclaré Dominic Raphoz, cogérant du Gaec ajoutant cependant que la piste de la liquidation n’était pas encore décidée.

« On est juste horrifié et on est en train d’organiser une chaîne de solidarité avec les autres associations pour récupérer ces animaux », a réagi de son côté Brigitte Gothière, cofondatrice de L214.

Le personnel dans l’incertitude

L’établissement emploie une vingtaine de personnes dont l’avenir reste incertain. Plus tôt dans la journée, la CGT s’était inquiétée des répercussions sociales de la vidéo, pointant l’irresponsabilité de l’association de s’en prendre à une filière qui connaît déjà des difficultés.

La préfecture promet pour sa part d’être « vigilante à ce que les animaux continuent d’être entretenus dans des conditions compatibles avec leurs besoins physiologiques » jusqu’à leur évacuation. L’Etat assure aussi qu’il sera « vigilant aux possibilités de réembaucher localement les employés de l’exploitation ».

L’action de L214

L’association L214, basée à Lyon et fondée par un couple « vegan » – qui ne mange ni viande, ni œufs, ni lait – a déjà obtenu la fermeture de deux abattoirs en France après avoir diffusé d’autres vidéos.

Elle attire ici une nouvelle fois l’attention sur les dérives de l’élevage industriel à l’heure où les exploitations ne cessent de grossir comme le symbolise la ferme dite des 1 000 vaches en Picardie.