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Inondations : comment les sinistrés seront-ils indemnisés ?

Les personnes touchées par les inondations et les crues doivent rapidement contacter leur assureur pour déclarer les sinistres. La facture risque d’être lourde.

Par  et

Publié le 02 juin 2016 à 12h24, modifié le 04 juin 2016 à 11h13

Temps de Lecture 4 min.

A Onzain le 2 juin.

L’épisode pluvieux et les crues de la Seine et de ses affluents n’ont pas cessé, vendredi 3 juin, mais les assureurs ont déjà recueilli des dizaines de milliers de déclarations de sinistre et commencent à estimer le prix des réparations. A titre de comparaison, les inondations qui avaient frappé les Alpes-Maritimes en octobre 2015 (causant la mort de vingt personnes) avaient coûté 605 millions d’euros en dommages, selon l’Association française de l’assurance, l’AFA. « Cette somme pourrait être supérieure dans le cas présent, estime Bernard Spitz, le président de l’AFA. Car, à la différence des inondations de 2015 dans le Midi, circonscrites et violentes, les zones touchées sont cette fois étendues et l’épisode dure depuis plusieurs jours. »

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Le coût des intempéries actuelles « devrait en être assez proche », pense Joaquim Pinheiro, directeur général sinistres chez Covéa (GMF, MAAF, MMA). Depuis le 27 mai, le groupe a reçu 16 000 déclarations : 7 000 dues aux inondations, 7 000 liées à la grêle du week-end des 28 et 29 mai et 2 000 pour dommages électriques. Chez Allianz, le nombre de coups de fil a bondi de 60 % depuis le début de la semaine. La MAIF estime que le nombre définitif de dossiers sera au moins deux fois plus élevé que celui d’octobre 2015.

Les inondations donnent souvent lieu à des dommages significatifs. « Si l’eau stagne plusieurs heures ou plusieurs jours, cela peut rendre un véhicule totalement irréparable », avertit Jean-Francois Sutter, directeur de l’indemnisation chez Allianz France. Dans les habitations, les dégâts se limitent rarement au mobilier et aux effets personnels. L’eau peut infiltrer la structure du bâtiment, les murs porteurs, les installations électriques. « Les objets peuvent être souillés du fait de l’eau, il faut nettoyer les murs et les sols. Les travaux sont plus lourds si l’eau a stagné longtemps, avec de la maçonnerie, de la plâtrerie… Il ne suffit pas d’une couche de peinture. Ce sont des dossiers au coût unitaire très élevé. »

Etat de catastrophe naturelle

Les sinistres ne seront pas tous remboursés. Pour les véhicules, il faut disposer d’une assurance tous risques et non au tiers. Pour les maisons et bâtiments, certains contrats ne prévoient de remboursement que si l’état de catastrophe naturelle est déclaré sur la commune. Ce régime prévoit alors une franchise réglementaire de 380 euros pour les particuliers et de 1 140 euros pour les entreprises. Les maires doivent faire une demande formelle auprès du préfet du département, puis lui-même auprès du ministère de l’intérieur.

« Toutes les procédures de catastrophe naturelle doivent être engagées pour que nous puissions les mettre en œuvre dès le conseil des ministres de mercredi prochain », a déclaré Manuel Valls, jeudi 2 juin, à Nemours. En déplacement le lendemain dans l’Essonne, le premier ministre a ajouté que le gouvernement réunirait lundi 6 juin les représentants des assureurs pour accélérer la prise en charge des dossiers des sinistrés. Restent les installations publiques, non couvertes par les compagnies d’assurance privées, car l’Etat est son propre assureur. Or « les catastrophes naturelles sont très coûteuses pour la collectivité, avec la mobilisation des services de secours, les voiries et bâtiments publics endommagés », explique M. Sutter.

Sur ce point, le premier ministre a évoqué le déblocage du fonds de soutien pour les collectivités territoriales touchées. De son côté, la présidente du conseil régional d’Ile-de-France, Valérie Pécresse (Les Républicains), va proposer la mise en place d’un fonds d’urgence d’un million d’euros pour les communes d’Ile-de-France sinistrées, a indiqué, mercredi, la région. Le conseil départemental de Seine-et-Marne, territoire particulièrement affecté, envisage, lui, de débloquer 600 000 euros d’aides.

Facette d’un problème plus vaste

Quelle qu’en soit l’ampleur, cette réponse conjoncturelle n’est qu’une facette d’un problème bien plus vaste : le coût engendré par les catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes. Allianz active désormais son plan d’urgence cinq à dix fois par an, contre deux à cinq fois par an il y a une dizaine d’années. Chez Axa, le poids des catastrophes naturelles dans la prime habitation des maisons est passé de moins de 20 % en 2000 à 29 % en 2015.

Cette dimension va croissant à en juger par l’étude « Changement climatique et assurance » publiée par l’AFA fin 2015, à l’occasion de la conférence de Paris sur le climat (COP21). Le coût des dégâts liés aux aléas naturels devrait s’élever à 92 milliards d’euros en France d’ici à 2040, contre 44 milliards d’euros pour les vingt-cinq dernières années, selon les projections des fédérations d’assureurs. L’augmentation de ce coût s’explique en grande partie par la hausse globale du niveau de richesse des Français, le changement climatique apparaissant comme le deuxième facteur explicatif.

Développer les plans de sauvegarde

Ces vingt-cinq dernières années, les inondations ont représenté 16 milliards d’euros d’indemnisations par les assureurs français ; ces sommes devraient atteindre 34 milliards entre aujourd’hui et 2040. Dans le livre blanc adossé à l’étude, l’AFA formule plusieurs préconisations pour mieux faire face aux aléas naturels. « Il faut entreprendre un travail éducatif et mener des campagnes de prévention des risques naturels, expose Bernard Spitz. Il importe aussi de compléter notre système réglementaire en généralisant, notamment, les plans communaux de sauvegarde [PCS] », qui recensent les risques majeurs à l’échelle locale et identifient les moyens d’y répondre.

« Les PCS sont une pièce maîtresse dans le diagnostic de vulnérabilité auquel doivent se livrer les collectivités locales, confirme Stéphanie Bidault, la directrice du Centre européen de prévention du risque d’inondation (Cepri). Il faut développer ces outils organisationnels, par ailleurs peu onéreux. » En 2014, une étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur la gestion des risques d’inondation de la Seine en Ile-de-France concluait déjà à « un certain retard de financement de la prévention de ce risque majeur » par rapport à d’autres régions ou bassins versants.

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