Compétitivité : l’euro (fort) m’a tué ?
Le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, veut se lancer dans une croisade contre l’euro fort. La survalorisation de notre monnaie, notamment par rapport au dollar, serait l’une des causes de notre faible compétitivité, selon lui. Une affirmation juste qui ne doit cependant pas nous empêcher de travailler les autres fondamentaux de la compétitivité.
Thibaut De Jaegher
À quoi bon ? À quoi bon faire tous ces efforts de compétitivité si c’est pour les voir réduits à néant par l’euro ? En France depuis longtemps, mais aussi en Allemagne tout récemment, des voix s’élèvent pour dénoncer le niveau de change de la monnaie européenne. "Nos efforts historiques de baisse du coût du travail sont dévorés par les 10 % d’appréciation de l’euro", affirmait ainsi le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg dans un entretien récent aux Échos.
La tirade du ministre reprend un vieux refrain des industriels français, notamment de l’aéronautique. De longue date, ils se plaignent de cette monnaie trop forte pour exporter des produits à des prix compétitifs. Tout le monde a entendu parler du théorème de Louis Gallois. L’actuel commissaire général aux investissements et ancien président d’Airbus group (ex-EADS) aimait à rappeler que "quand l’euro s’apprécie de 10 centimes par rapport au dollar, le résultat d’exploitation d’Airbus group, baisse de 1 milliard d’euros". De son côté, le conseil d’analyse économique estime qu’une dépréciation de 10 % de la monnaie unique augmenterait de 0,6 % le PIB de la France au bout d’un an. La direction du Trésor, plus optimiste, estime que cela pourrait générer 1,2 % de PIB et libérer 150 000 emplois.
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60% de nos echanges se font en euro
La compétitivité ne serait donc qu’une simple histoire de parité monétaire ? Il suffirait en somme de dévaluer (un peu) l’euro pour relancer (fortement) notre appareil productif… et voir notre déficit commercial se résorber ? C’est évidemment un raisonnement un peu court, pour au moins trois raisons :
1. La zone euro est notre premier débouché. Il ne faut pas oublier que notre première zone d’export est l’Europe. De ce fait, une grande partie de nos échanges (60 %) se fait avec des pays de la zone euro, par définition insensibles aux effets de change.
2. Nos premiers concurrents vivent en zone euro. Que cela nous plaise ou non, de nombreux pays se jouent très bien de cet euro fort. L’Allemagne qui brille à l’export, ou l’Espagne qui se redresse brillamment, subissent la même contrainte que nous. Euro fort ou pas, nous serons vis-à-vis d’eux toujours sur la même ligne de départ.
3. Euro fort mais pouvoir d’achat élevé. C’est peut-être anecdotique mais un euro fort nous permet aussi d’acheter à bon prix, produits et matières premières.
Il serait contre-productif et dangereux de focaliser la question de la compétitivité sur la seule question des taux de change. La performance relative de la France reste médiocre par rapport à ses voisins et elle le sera tout autant que l’euro s’apprécie ou non. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas travailler le volet monétaire de la compétitivité. Au contraire !
Thibaut De Jaegher
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