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Immunothérapie : le marché va s’ouvrir à d’autres acteurs

A Chicago, le maître mot du congrès sur le cancer aura été « combinaisons ». Un seul produit suffira rarement à stimuler le système immunitaire. Les laboratoires vont devoir s’allier entre eux.

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C’est le tout début de l’aventure avec des possibilités de combinaisons quasi infinies et comme seules limitations le coût des traitements et la capacité de les administrer aux bons patients.

Par Catherine Ducruet

Publié le 8 juin 2016 à 20:30

La défaite du cancer n’est pas pour demain. L’an dernier, les résultats spectaculaires des produits d’immunothérapie de BMS et de Merck dans le traitement du cancer du poumon ou du mélanome avaient été vus comme la promesse d’un traitement universel. Car le système immunitaire sur lequel s’appuie cette nouvelle approche agit sur l’ensemble du corps.Mais l’édition 2016 de l’American Society of Clincal Oncology (Asco), qui a drainé jusqu’à ce mardi plus de 35.000 personnes à Chicago, a montré à quel point il est difficile d’obtenir des résultats positifs pour des larges populations de patients. Pour restaurer l’efficacité du système immunitaire et dominer un marché évalué à 34 milliards de dollars en 2024, il faudra plus que la première génération de produits comme le Yervoy (BMS), l’Opdivo (BMS), le Keytruda (Merck) ou le Tecentriq (Roche). Ces molécules, dénommées « inhibiteurs de points de contrôle », autorisent le système immunitaire à attaquer une tumeur. C’est pourquoi le maître mot du congrès 2016 de l’Asco aura été « combinaisons ».

la prise en charge d’un cancer se limite rarement à un médicament

L’idée des combinaisons n’est pas en soi nouvelle. Aujourd’hui, déjà, la prise en charge d’un cancer se limite rarement à un seul médicament. « Mais, ici, l’idée c’est qu’associer deux molécules va permettre de potentialiser et pas seulement d’additionner les efficacités », explique Fouad Namouni, responsable du développement en oncologie chez BMS. La réponse immunitaire comprend en effet une série d’étapes. Le plus souvent, il ne suffira pas de redonner à la cellule cancéreuse son statut d’« ennemie » pour les lymphocytes (bras armé du système immunitaire). Il faudra d’abord que ceux-ci aient été mis en alerte à distance puis qu’ils arrivent à son contact. William Pao, directeur de la recherche en oncologie de Roche, classe les tumeurs en trois catégories : les tumeurs inflammatoires, c’est-à-dire déjà envahies par les lymphocytes, sur lesquelles les « inhibiteurs de point de contrôle », seuls ont une efficacité, les tumeurs où les lymphocytes sont maintenus en périphérie et celles où ils sont absents. « Ces deux derniers types de tumeurs nécessiteront des combinaisons », explique-t-il.

Une réhabilitation des chimiothérapies

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D’où une certaine réhabilitation des chimiothérapies. « Nous avons réalisé un essai de phase I-II associant notre Tecentriq avec une chimiothérapie au paclitaxel dans les cancers du sein insensibles aux traitements ciblés, car ces tumeurs sont faiblement visibles par le système immunitaire », observe Daniel Chen, directeur du développement en immunothérapie de Roche. La radiothérapie est aussi testée dans cette optique au MD Anderson (Texas) par Merck pour accroître l’efficacité de son Keytruda dans différentes tumeurs résistantes. Quant à AstraZeneca il travaille sur une approche de chimiothérapie ciblée dénommée DDR. Ces différentes approches (non exhaustives) ont pour point commun, en provoquant la destruction de cellules malignes, de rendre la tumeur plus visible et de déclencher la réponse immunitaire.

Approche personnalisée

Mais, dans certains cas, cela ne suffira pas encore. « Il faut aussi que les lymphocytes puissent pénétrer dans la tumeur », explique William Pao. Or, il reste encore beaucoup à apprendre sur l’écosystème local de la tumeur, d’autant que chaque tumeur crée son propre microenvironnement. D’où la nécessité d’une approche personnalisée basée sur les profils moléculaires. On n’est donc qu’au tout début de l’aventure avec des possibilités de combinaisons quasi infinies avec comme seules limitations le coût des traitements et la capacité de les administrer aux bons patients.

Le français Nanobiotix prend le train de l’immunothérapie

La start-up française Nanobiotix qui développe des nanoparticules cristallines injectées directement dans la tumeur et activées à distance par la radiothérapie, compte tirer parti des nouvelles combinaisons qui pourraient associer radiothérapie aux traitements d’immunothérapie. Des études chez l’animal ont montré que son produit NBTXR3, associé à la radiothérapie, augmentait la visibilité de la tumeur pour le système immunitaire davantage que la radiothérapie seule. Nanobiotix attend cet été les résultats de la première étude de phase III du NBTXR3 dans les tumeurs malignes des tissus mous, préalable indispensable au marquage CE. Son utilisation en association avec l’immunothérapie ajouterait une nouvelle corde à son arc. Reste à convaincre un des ténors du domaine pour lancer un essai clinique.

« Il y a des opportunités pour d’autres acteurs »

Du côté des industriels, BMS, Merck, Roche et bientôt AstraZeneca vont être incontournables sur le marché de la cancérologie car, avec leurs inhibiteurs de « check-points », ils détiennent la pièce maîtresse de ces associations, crédibilisant ainsi les prévisions de revenus les plus optimistes : 10 milliards de dollars par an pour Opdivo et 7 milliards pour Keytruda. Pour autant, estime Dan Robert, analyste de GlobalData, « il y a des opportunités pour d’autres acteurs ». Surtout si comme AbbVie ou Janssen, ils ont des produits susceptibles d’entrer dans des combinaisons. Avec à la clef une multiplication des accords entre grands laboratoires et biotech. En effet, rares sont ceux qui, comme AstraZeneca, ont en oncologie des approches suffisamment diverses pour réaliser eux-mêmes leurs propres combinaisons.

Catherine Ducruet

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