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Politique

Présidentielle : Duflot, cette pauvre petite victime que Hollande aurait tuée

Son parti est moribond. Elle ne dispose pas des parrainages suffisants pour se présenter en 2017. A qui la faute ? A François Hollande, pardi!
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Cécile Duflot, 3 février 2016
Cécile Duflot se présente en victime du chef de l'Etat
Matthieu Alexandre /AFP

Dans le registre «Hollande m’a tuée», Cécile Duflot est aujourd’hui à son meilleur. Alors que le congrès de son parti s’ouvre samedi à Saint Ouen sous de tristes auspices, pas un seul jour ne se passe sans qu’elle offre une nouvelle preuve des intentions homicides de l’Elysée à son endroit. Les écolos se meurent et leur chef de file affiche ses blessures. Tout cela est dit comme un lourd secret qu’on livre presqu’à regret tant il est douloureux. C’est que la victime est encore sous le choc. Jamais elle n’aurait pu imaginer pareille agression.

Pensez donc! Une tentative d’assassinat ourdie par un Président claquemuré dans son palais et dont l’unique obsession est de se venger de tous ceux qui ont eu l’audace de vouloir lui résister. Comment imaginer des mœurs aussi noires ? Comment croire que de telles pratiques puissent encore exister dans un pays civilisé, à l’aube du troisième millénaire?

Sacrée Cécile ! Lorsqu’on enseignera un jour l’art de la tragédie-comédie dans les écoles de la politique, c’est elle qu’il faudra convoquer en premier. Vous vous tirez une balle dans le pied ? Eh bien venez maintenant expliquer qu’on a voulu vous flinguer ! Ce numéro-là exige une parfaite maîtrise de soi. Pas de cris, pas de râles, juste une pointe d’indignation dans la voix. Pour être plainte, la prétendue victime doit être blessée sans avoir l’air abattue. Pour être soutenue, il faut qu’elle mette en scène sa douleur et sa détermination à la fois. Mourir, en politique, est un exercice de style réservé aux très grands acteurs du circuit. Dans sa génération, Cécile Duflot est, à l’évidence, l’un d’entre eux.

Elle ne pardonne pas à Hollande de lui avoir résisté

C’est qu’il en faut en effet du talent pour faire passer pour un traquenard ce qu’il n’est au fond qu’un combat perdu. Depuis qu’elle a rompu avec François Hollande en sortant du gouvernement, en mars 2014, Cécile Duflot est entrée en guerre. C’est son droit. Elle était l’alliée de référence. Elle est devenue d’un jour à l’autre le procureur implacable d’un quinquennat placé, à ses yeux, sous le signe du renoncement. Pourquoi pas! Elle a pris son risque. C’est tout à son honneur! Elle s’est plantée. Ça arrive ! La voilà qui explique désormais que son échec est de la responsabilité de celui qu’elle a voulu défier. C’est pour le moins original !

Au fond, Cécile Duflot ne pardonne pas à François Hollande de lui avoir résisté. Elle se comporte comme une compétitrice qui n’accepte pas d’avoir perdu. C’est comme si, dans une élection, elle faisait grief au vainqueur de l’avoir emporté. Il y a quand même quelque chose de tordu - et d’ailleurs assez révélateur en termes de tempérament - dans ce raisonnement qui repose sur l’idée qu’en politique, tous les coups sont permis, sauf celui de se défendre et qui suggère surtout que la défaite ne peut être que le fruit de la trahison.

François Hollande a sans doute beaucoup de défauts. Mais il est quand même un peu farce de le décrire, un jour, comme un petit bouchon, incapable de la moindre constance, pour le transformer, le lendemain, en un nouveau Machiavel. Plus il est faible, plus son avenir paraît compromis et plus on l’imagine en train de tirer les ficelles, en coulisse. Dès qu’une tête tombe – y compris dans la presse… - c’est sa responsabilité qui est pointée du doigt. S’agissant de Cécile Duflot, il est urgent de décevoir les complotistes de tous poils. Si la tête est tombée, c’est qu’elle ne tenait plus qu’à un fil.

A jouer sur tous les tableaux EELV s'est tué

Le seul grief qu’on pourrait d’ailleurs faire au Président est d’avoir voulu la sauver plus longtemps que de raison. Il serait amusant que Cécile Duflot publie l’ensemble des textos que lui a adressé François Hollande depuis quelques années. Il y a fort à parier qu’on y trouverait plus de mots doux que de menaces, plus de «Cécile, reviens» que de «Cécile, prends garde à toi».

François Hollande est un conciliateur dans l’âme qui a toujours préféré la pêche à la ligne à l’art de la chasse. A ceux qui, au PS ou à Matignon, le pressaient de tirer l’échelle, il expliquait, il y a encore peu, que son unique ambition était de ramener au bercail l’ensemble du troupeau écolo. C’est faute de mieux qu’il s’est résolu à faire entrer au gouvernement, en février dernier, la secrétaire nationale d’EELV et les présidents des deux groupes parlementaires. Pour le prix de Cosse, de Placé et de Pompili, il aurait volontiers acheté – est-ce le bon mot ? – un seul baril de Duflot.

Aujourd’hui, celui-ci ne vaut plus rien. A qui la faute? EELV est au bord du dépôt de bilan. Ses militants désertent en masse. Il n’ont été que trois milles à se déplacer lors du vote des motions de Saint Ouen. A force de jouer sur tous les tableaux à la fois, leurs élus locaux ont été laminés lors des dernières élections locales. Ils ne sont plus désormais assez nombreux pour parrainer avec succès l’un des leurs, lors de la prochaine présidentielle de 2017. Vu le score qui est promis à Cécile Duflot au cas où elle parviendrait finalement à se présenter - 2%, tout bien pesé -, il n’est d’ailleurs pas sûr que le jeu en vaille la chandelle.

Imaginer un instant que l’Elysée soit responsable d’une telle déconfiture est une belle plaisanterie. Cécile Duflot est trop roublarde, dans son malheur, pour ne pas le savoir. On lui fera la grâce de croire ici qu’elle ne l’entretient pas par hasard. Bientôt, c’est écrit, elle expliquera que François Hollande et lui seul l’a empêchée de défendre, en 2017, ses couleurs et son projet. Il est même possible qu’elle justifie ainsi son ralliement à une candidature venue d’autres horizons. Là encore pourquoi pas. Mais était-il vraiment nécessaire de se donner tant de mal pour en arriver là ?

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