2016 pourrait bien établir un nouveau record: celui de la concentration de dioxyde de carbone (CO2) dans l'atmosphère. Selon les dernières mesures des scientifiques, ce gaz à effet de serre devrait dépasser les 0,04% dans l'atmosphère (400 ppm) cette année. C'est notamment ce qu'indique le Met Office, le service national britannique de météorologie, qui a analysé les taux enregistrés en haut du volcan Mauna Loa, sur l'île d'Hawaï, dans une étude publiée dans le journal Nature Climat Change.

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Si le dépassement de ce seuil symbolique ne va pas bouleverser d'un seul coup le climat, les chercheurs soulignent tout de même que la dernière fois que le taux de CO2 était régulièrement au-dessus de 400ppm, c'était il y a trois à cinq millions d'années. Avant que l'Homme n'existe. "On ne s'attend pas à ce que quelque chose se produise soudainement. Mais c'est un excellent marqueur qui nous rappelle notre influence permanente sur le climat", indique le professeur Richard Betts du Met Office, interrogé par la BBC.

0,04% de CO2 sur l'île dont l'air est le plus pur au monde

Pour les scientifiques britanniques, outre l'Homme, le phénomène climatique El Niño est également responsable de la situation. Celui-ci a particulièrement réchauffé et asséché les tropiques ces derniers mois. Les forêts ont donc eu du mal à absorber le CO2 déjà présent dans l'atmosphère, et de gigantesques feux de forêts se sont déclenchés partout sur la planète, augmentant encore le taux de gaz carbonique dans l'air. En clair: la concentration de CO2 dans l'atmosphère ne risque pas de redescendre lors des mois à venir, estiment-ils.

L'observatoire du service national d'observation ICOS-France ne dit pas autre chose, au vu de ses mesures sur la petite île d'Amsterdam, dans l'océan Indien. Selon les chercheurs français, le CO2 a dépassé, pour la première fois en mai, la valeur symbolique des 400 ppm. Or, cette île isolée possède un des airs les plus purs au monde et on y enregistre généralement les concentrations en dioxyde de carbone (CO2) les plus basses de la planète. "Franchir les 400 ppm à Amsterdam signifie que cette valeur est atteinte sur quasiment l'ensemble de notre planète", résument les chercheurs français.

CO2 CNRS

Taux de croissance annuel du CO2 atmosphérique à l'île d'Amsterdam. Les barres rouges indiquent les taux de croissance moyennés sur des périodes de 5 ans.

© / M. Ramonet/CNRS

Le CNRS note que cette augmentation est représentative d'une tendance sur le long terme. Depuis 1981, la concentration de dioxyde de carbone est ainsi passée de 339 à 400 ppm (+18%), soit un accroissement moyen de 1,75 ppm par an. Ces quatre dernières années, la hausse est même de plus de 2 ppm par an. Et selon le Met Office, elle pourrait même dépasser les 3ppm en 2016.

"Il est très important de noter que l'accumulation de CO2 cette année est plus importante qu'avec El Niño de 1997-98, parce que les émissions humaines ont augmenté de 25% depuis. C'est donc un effet naturel qui se cumule à un effet humain", explique encore le Britannique Richard Betts. Et comme la pollution n'est pas près de diminuer, malgré la COP21, il y a fort à parier que le taux de CO2 ne diminue pas dans les prochaines années.

Dans une note de blog publiée en 2015 et rappelée par la BBC, le professeur Gavin Foster de l'université de Southampton, indiquait de son côté que la dernière fois que la Terre avait un taux de CO2 de 400ppm, c'était pendant la période du Pliocène, il y a 3 à 5 millions d'années. A cette époque, les océans étaient 20 mètres plus haut et la température globale plus élevée de 3°. "Ce qui pourrait bien ressembler de près ou de loin à notre futur", s'inquiétait-il.

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