Primaire à droite : les confidences de Juppé

Le favori de la compétition se veut combatif contre François Hollande et la gauche. Mais aussi contre son principal rival, Nicolas Sarkozy, dont il se méfie, et à qui, en privé, il adresse quelques piques.

Vannes (Morbihan), hier. Alain Juppé, favori de la primaire, connaît un petit tassement dans les sondages. Mais il ne veut pas entendre parler de syndrome Balladur : « Je ne suis pas Balladur et Sarkozy n’est pas Chirac! »
Vannes (Morbihan), hier. Alain Juppé, favori de la primaire, connaît un petit tassement dans les sondages. Mais il ne veut pas entendre parler de syndrome Balladur : « Je ne suis pas Balladur et Sarkozy n’est pas Chirac! » (AFP/Loic Venance.)

    Il repart de Vannes en contemplant le ciel bleu de la Bretagne. « Et dire qu'il pleut à Paris », souffle hier matin Alain Juppé, sur la route qui l'emmène à l'aéroport. La perspective de retrouver la grisaille parisienne n'entame pas pour autant le moral du favori de la primaire à droite, qui préfère repenser au match des Bleus la veille : « Quelle rencontre ! Ils m'ont donné des palpitations cardiaques. Mais comme un c..., j'ai zappé après le premier but », confie le maire de Bordeaux (Gironde), qui n'a donc pas vu le second, marqué dans les arrêts de jeu par Dimitri Payet. Mais qu'à cela ne tienne : « Ne nous privons pas de ce genre de manifestations joyeuses et populaires. On en a bien besoin », lâche Juppé, après avoir pointé la veille, en meeting, la responsabilité du gouvernement et de François Hollande dans la crise sociale qui traverse le pays.

    « Le désordre s'installe dans nos rues et dans nos villes. Il y a urgence à rétablir l'autorité de l'Etat », a-t-il taclé devant 900 supporteurs, en évoquant le drame de Magnanville (Yvelines). « Où sont les 5 000 policiers promis ? Où en sommes-nous sur les services du renseignement territorial ? » a-t-il ajouté. Au passage, il répond à ses détracteurs -- au premier rang desquels Nicolas Sarkozy --, qui lui reprochent d'être « laxiste ». Et rappelle quelques-unes de ses propositions parues dans son livre « Pour un Etat fort » (Ed. Lattès), sorti en janvier. Bref, pas question de se laisser déborder sur sa droite pendant cette campagne interne. Et Juppé a beau dire qu'il n'a que « deux adversaires : le FN et le PS », on sent bien que le patron des Républicains occupe aussi ses pensées.

    Devant des élus et des chefs d'entreprise de son comité de soutien qu'il retrouve mercredi midi dans une auberge bretonne, l'ancien Premier ministre donne d'ailleurs le ton des prochains mois : « C'est une compétition, pas une bagarre. Mais elle comportera des moments chauds, je m'y attends. Et je m'efforcerai de ne pas répondre aux provocations... même si parfois ça me démange », glisse-t-il, en repensant certainement aux attaques de François Baroin il y a dix jours, quand ce dernier a officialisé son soutien à Sarkozy. Le maire de Troyes (Aube) n'a jamais pardonné à Juppé de l'avoir écarté de son gouvernement en 1995. « Etre attaqué par des gens aigris qui ressassent des choses qui remontent à vingt ans, c'est plutôt sympathique pour moi. Cette haine recuite... c'est minable », persifle en petit comité le candidat à la primaire, conscient que son statut de favori fait de lui une cible de choix. « J'entends parler de syndrome Balladur. Mais je ne suis pas Balladur et Sarkozy n'est pas Chirac ! poursuit-il en privé. Balladur en 1995, c'était seulement sa deuxième campagne électorale. Moi, j'ai un peu plus de batailles à mon compteur tout de même... »

    De là à se voir déjà dans la peau du vainqueur en novembre? « La victoire n'est pas acquise », souligne celui qui connaît depuis peu un tassement dans les sondages. « Et je ne sous-estime pas la puissance de mobilisation de Sarkozy. Je connais son énergie et la façon dont il utilise contre toute éthique les moyens du parti pour faire campagne.  » Hier, la haute autorité de la primaire a d'ailleurs enjoint le patron des Républicains de clarifier sa situation. « Quand je l'entends dire qu'il n'est pas encore candidat, c'est juste une aimable plaisanterie! Il y a là un vrai problème de morale », enfonce Juppé.

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