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INDONESIE

Après 1700 kilomètres en mer, des demandeurs d’asile tamouls interdits de débarquer en Indonésie

Le vice gouverneur d'Aceh, Muzakir Manaf, lors de sa visite aux passagers du bateau tamoul le 15 juin
Le vice gouverneur d'Aceh, Muzakir Manaf, lors de sa visite aux passagers du bateau tamoul le 15 juin
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Le 11 juin, une embarcation de fortune s’est retrouvée bloquée au large des côtes d’Aceh en Indonésie. À bord se trouvaient environ 45 Tamouls en provenance du Sri Lanka. Ils avaient déjà traversé 1 758 kilomètres d’océan et ils leur restaient encore 3 800 kilomètres à parcourir pour rejoindre l’Australie, où ils comptaient demander l’asile. En chemin, le moteur de leur bateau a lâché et ils avaient épuisé leur stock de carburant.

Le gouvernement indonésien n’a pas autorisé le bateau tamoul à accoster ni les passagers à son bord à demander l'asile, faisant valoir qu'ils n'avaient pas les papiers requis. Les passagers attendent donc sur leur embarcation de pouvoir repartir, à quelques mètres des côtes. Les autorités indonésiennes exigent que les tamouls poursuivent leur voyage jusqu’en Australie dès que possible. Une destination qui n'a rien d'un eldorado pour les clandestins : Canberra a une politique d'immigration très restrictive et a été critiqué pour maintenir les demandeurs d’asile dans des centres de rétention installés sur de petites îles à des centaines, voire des milliers, de kilomètres des côtes australiennes.

Les Tamouls sont une minorité ethnique au Sri Lanka et font l’objet de discriminations de la part du gouvernement sri lankais depuis des décennies. La guerre civile a officiellement pris fin en 2009, mais depuis deux mois, selon les tamouls, la répression s’est intensifiée. Amnesty International et d’autres ONG ont rapporté des cas de viols et de harcèlement de femmes tamouls, ainsi que des cas de disparitions forcées et d’autres violations des droits de l’Homme.

"Nous n’étions qu’à cinq mètres du bateau et avons vu des familles, dont une femme enceinte et environ sept enfants"

Hermanto Hasan est le co-fondateur de l’organisation humanitaire indonésienne Yayasan Geutanyoe, qui a tenté de rentrer en contact avec les Tamouls à bord de l’embarcation.

Le 13 juin, notre équipe humanitaire a tenté d’approcher leur embarcation de fortune, qui était à environ deux kilomètres au large de Lhoknga. Ils étaient bloqués en mer depuis plusieurs jours déjà. Impossible pour eux de rejoindre les côtés d’Aceh avec leur moteur en panne.

Nous sommes arrivés à cinq mètres du bateau mais les autorités nous ont empêchés de monter à bord et même de leur parler. Ils étaient environ 45 sur l'embarcation. Nous avons vu des familles, dont une femme enceinte et environ sept enfants. Ils semblaient fatigués mais nous n’avons pu savoir si certains étaient malades et avaient besoin de soins.

Membres de l'ONG Yayasan Geutanyoe lors de leur visite du bateau

"Leur bateau n’est pas conçu pour traverser un océan"

On nous a dit qu’ils n’avaient pas accosté depuis leur départ d’Inde le 2 mai dernier. Un mois et demi de traversée ! Le bateau avec lequel ils naviguent est un petit bateau de pêche. Il n’est pas conçu pour traverser un océan et encore moins avec 45 personnes à bord. Les conditions d’hygiène doivent être très précaires. Je ne sais pas comment ils peuvent bien cuisiner.

Un jour avant notre visite du bateau, les autorités indonésiennes avaient rapporté que les passagers avaient reçu du carburant et une assistante technique pour réparer le moteur, qu'ils étaient en bonne santé et disposaient de denrées alimentaires suffisantes pour poursuivre leur voyage jusqu’en Australie. Les autorités avaient l’intention de les encourager à repartir sans même toucher terre. Mais comme ils sont restés au large d’Aceh nous nous sommes dit qu’ils avaient sans doute encore des besoins urgents à résoudre, ou peut-être avaient-ils besoin d’accoster de façon temporaire.

Le lendemain, le bateau était amarré à cinq mètres de la plage de Lhoknga. Nous avons tenté d’obtenir du vice-gouverneur de la province d’Aceh, Muzakir Manaf, qu’il visite le bateau, ce qu'il a fait le 15 Juin. Manaf a demandé au chef de la police d'Aceh de permettre au bateau de débarquer dans le Nord d’Aceh, mais il n’a pu outrepasser le refus de Jakarta. La police, des officiels de l’immigration et un certain nombre de soldats étaient sur place pour s’assurer que les Tamouls ne débarquaient pas.

Le bateau tamoul sur la plage

"Les Tamouls devraient au moins être autorisés à attendre que les conditions météorologiques s’améliorent"

Les autorités avaient ordonné au bateau de quitter Aceh jeudi. [Vendredi, le bateau n’était toujours pas parti mais les autorités locales préparaient son départ, NDLR].

C’est l’hiver en Indonésie et les prévisions météorologiques annoncent du mauvais temps pour les prochains jours. Les Tamouls devraient au moins être autorisés à attendre que les conditions météorologiques s’améliorent.

Les autorités indonésiennes considèrent que les Tamouls n’ont droit ni au statut de réfugié ni à celui du demandeur d’asile. Pourtant, c’est le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) des Nations unies qui est habilité à décider si une personne a droit ou non d’accéder au statut de réfugié. Jusqu'à présent, le gouvernement indonésien n’a pas permis au HCR de s’entretenir avec les passagers du bateau pour déterminer leur statut. Le droit d’asile est pourtant un droit fondamental inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme.

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