
POLITIQUE - C'est par un oui massif que les habitants de Loire-Atlantique ont répondu à la consultation départementale organisée dimanche 26 juin au sujet du possible transfert de l'aéroport de Nantes vers la commune de Notre-Dame-des-Landes. Les résultats définitifs communiqués dans la soirée par la préfecture donnent le oui à un peu plus de 55%.
En clair, et selon la rhétorique du couple exécutif: il n'y a plus d'obstacle à la construction de cette nouvelle plateforme aéroportuaire dont l'idée remonte au milieu des années 60. En milieu de semaine, Manuel Valls avait en effet affirmé que si "le non l'emporte, le projet sera abandonné et si le oui gagne, il sera lancé". Reste à savoir si cette conclusion théorique tirée par le premier ministre sera aussi simple à mettre en pratique. Et à première vue, on peut en douter.
Illustration avec la taille de l'aéroport. C'est normalement un site à deux pistes qui doit voir le jour dans les prochaines années, l'entrée en service en 2017 étant désormais exclue. Cela figurait dans le dossier adressé aux électeurs pour qu'ils fassent leur choix avant ce dimanche. Mais au printemps, un rapport d'experts remis à Ségolène Royal préconisait de ne construire qu'une seule piste; une idée qui a séduit la ministre de l'Environnement qui défend désormais ce scénario.
Aller dans son sens pourrait peut-être permettre d'achever de convaincre des opposants déterminés, même si Manuel Valls semble, pour l'heure, écarter l'hypothèse. "La démocratie a parlé. Elle a validé le projet de transfert d’aéroport déclaré d’utilité publique en 2008 (2 pistes), tranchant définitivement le débat sur l’opportunité de ce transfert. Le premier ministre se félicite de ce choix qu’il a toujours défendu avec les élus du territoire", peut-on lire dans un communiqué qui ne va pas ramener beaucoup de sérénité sur place.
"S'il faut continuer le combat pendant un demi-siècle..."
Car la grande majorité des militants au projet ont toujours affirmé que, même s'ils perdent sur le terrain électoral, leur bataille juridique et idéologique ne sera pas terminée. Le sentiment de cet élu EELV résume parfaitement la situation.
En déplacement en milieu de semaine en Loire-Atlantique, l'ancienne ministre écologiste Cécile Duflot a, elle aussi, promis de ne rien lâcher. "Il y a une contradiction intrinsèque, on dit: 'c'est l'aéroport du Grand Ouest' mais on fait une consultation limitée à Nantes et au département de Loire-Atlantique. Donc, de toute façon, cette consultation est critiquable, quel que soit son résultat. Ce qui est sûr, c'est que les arguments qui nous conduisent à nous opposer à ce projet seront les mêmes lundi, quoi qu'il arrive", a lancé la députée EELV.
Elle faisait référence au périmètre de la consultation qui est critiqué par les détracteurs; mais le Conseil d'Etat a validé le choix du gouvernement de ne l'organiser qu'en Loire-Atlantique, là où l'enquête publique a été menée.
Elu de la région, l'eurodéputé Yannick Jadot rappellait pour sa part que des recours juridiques sont toujours en cours. Les arrêtés préfectoraux dits "loi sur l'eau" et "espèces protégées doivent notamment être examinés d'ici à la fin de l'année par la cour administrative d'appel de Nantes. Or, François Hollande avait affirmé en 2015 que rien ne se passerait tant que la justice n'aurait pas définitivement tout tranché. Les militants anti-aéroport se réfugient donc derrière cette parole présidentielle bien que le Chef de l'Etat a proposé depuis un compromis avec cette consultation.
Une Zad qu'il va falloir évacuer
Et même si l'exécutif (Manuel Valls, François Hollande et surtout Jean-Marc Ayrault étant des soutiens du transfert) se trouve politiquement conforté à l'issue de cette consultation décidée pour tenter de sortir par le haut d'un dossier polémique, l'exécution des résultats ne sera pas simple. Sur place, ils sont nombreux à ne pas vouloir laisser la place aussi facilement. "Il faudra faire en sorte qu'on respecte le choix des électeurs. Ceux qui occupent cet espace de manière totalement illégale devront être évacués. C'est ainsi que l'autorité de l'Etat se fait respecter", a réaffirmé le premier ministre au cours de la semaine écoulée. Il a répété à l'issue du référendum que les occupants illégaux "devront partir" d'ici le début des travaux "à l'automne". "Le gouvernement fera appliquer le verdict des urnes", promet le chef du gouvernement.
En février, quand le chef de l'Etat avait annoncé le référendum, il se fixait comme objectif de faire débuter le chantier à l'automne. "Les travaux doivent commencer au mois d'octobre. Ils se feront si le référendum aboutit à ce résultat", promettait alors François Hollande.
La pression de la droite ne va aller qu'en s'accentuant. "Il reste au gouvernement à respecter le vote", dit notamment le député Les Républicains Eric Ciotti. "C'est la victoire du développement, de l'emploi, la défaite des zadistes. Désormais il faut que le gouvernement tranche, rien ne serait pire si rien ne se passe. Je demande donc l'évacuation de la #ZAD et le commencement des travaux de l'aéroport", a abondé le président LR de la région Pays-de-la-Loire, Bruno Retailleau.
Seulement, sans le bon vouloir des opposants, c'est par la force qu'il faudra évacuer les dizaines d'hectares sur lesquels le futur aéroport doit voir le jour. Avec tous les risques que cela comporte pour l'image d'un pouvoir au plus bas dans les sondages, et pour la sécurité des militants sur place. Pour s'en convaincre, il suffit de se remémorer le fiasco de l'opération César lancée en 2012 pour déloger les zadistes.