Madagascar, dernier bastion africain de la polio

Le district de Tsihombe au sud de l'Ile a recensé 4 des 10 cas de polio diagnostiqués à Madagascar. [Tom Maguire/ACTION]

Madagascar est officiellement débarrassé du virus depuis 2005, mais plusieurs cas de polio se sont déclarés ces deux dernières années. En cause, la faible couverture vaccinale et les carences sanitaires.

La polio est officiellement éradiquée en Afrique depuis 2015. Le Nigéria, dernier pays considéré comme endémique sur le continent, a été retiré de la liste de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Mais à peine éradiquée, la polio est revenue par la petite porte à Madagascar, où 10 cas ont été diagnostiqués entre septembre 2014 et fin 2015, notamment dans le sud de l’île. À Tsihombe dans la région d’Androy, pas moins de 4 cas ont été détectés en 2015.

Campagne de vaccination

Pour enrayer la propagation de virus, la grande Ile avait alors lancé une vaste campagne de vaccination ciblant les onze millions d’enfants de moins de 15 ans sans distinction. Le dernier cycle de rappel doit avoir lieu en octobre 2016. Et devrait sortir définitivement le pays de l’ornière sanitaire.

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À Ambovombe, deux campagnes de vaccination contre la polio ont déjà eu lieu au cours de la dernière année. La dernière campagne de rappel se tiendra en octobre 2016. « Nous allons dans un village et on rencontre le chef. C’est lui qui rassemble les enfants et nous les vaccinons sur place »  explique Soavinalie, qui travaille au centre de santé du district.

Ambovombe

Ambovombe [Tom Maguire/ACTION]

« Aujourd’hui, on s’achemine vers la fin de l’épidémie : il n’y a eu aucun cas déclaré en 8 mois» assure Charlotte Faty Ndiaye, la représentante de l’OMS à Madagascar.

Eradication à portée de main

La rechute de Madagascar, qui avait pourtant réussi à éradiquer le virus en 2005, n’est pas totalement isolée : en 2015, le Nigeria, le Laos et l’Ukraine ont également identifié quelques cas de polio.

Cette maladie très contagieuse qui affecte principalement les enfants de  moins de 5 ans peut entraîner en quelques heures des paralysies irréversibles. Si aucun traitement n’existe, la lutte contre la polio s’est organisée depuis les années 60 grâce à une campagne mondiale de vaccination.

>>Lire : L’Union européenne salue l’éradication de la polio en Inde

Avec un succès réel, puisque depuis 1988, la polio a été réduite de 99%, selon l’OMS.  En 2015, il ne restait donc plus officiellement que deux pays endémiques : le Pakistan et l’Afghanistan, qui totalisaient 74 cas.

« L’éradication de la polio n’a jamais été autant à portée de main, avec l’Afrique débarrassée du poliovirus sauvage depuis bientôt 2 ans » s’est récemment félicité la directrice générale de l’OMS, Margaret Chan.

Problèmes sanitaires

Pour certains, la résurgence du virus à Madagascar n’est pas vraiment une surprise, tant le pays présente un terrain sanitaire miné. « L’épidémie de polio n’est pas étonnante » affirme Elke Wisch, représentante de l’UNICEF à Madagascar.

Les cas identifiés de polio proviennent d’une réactivation du virus contenu dans le vaccin anti-polio. À cause des pratiques de défécation en plein air, très courantes dans certaines régions de l’île, le virus réactivé se répand rapidement et facilement.

« La polio se transmet par l’eau », explique Elke Wisch. « Et l’accès à l’eau potable est dramatique à Madagascar, car une majorité de la population pratique la défécation en plein air » poursuit-elle.

« Les gens refusent d’avoir des latrines chez eux, ce qui contamine l’eau. C’est une des causes du retour de la polio », reconnait le ministre de la Santé, Mamy Lalatiana Andriamanarivo. Même la construction de latrines dans certains logements peine à faire évoluer les mœurs. « Les gens préfèrent y conserver leurs économies ou les denrées alimentaires » constate le ministre.

>>Lire : Bruxelles veut lutter contre le retour de la polio en Syrie

Autre explication, la faible couverture vaccinale de certaines régions du pays. « Il y a environ la moitié des enfants qui ne sont pas vaccinés à Madagascar», estime le docteur Charlotte Faty Ndiaye, représentante de l’OMS à Madagascar.

Une faiblesse qui s’explique par la défaillance du système de santé malgache, l’enclavement de certaines régions, mais aussi parfois à la résistance des populations locales. « Ce qu’on ne comprend pas, c’est pourquoi certaines femmes ne veulent pas venir faire vacciner leurs enfants lors des campagnes. Il y a un problème d’information » reconnait la représentante.

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