L’annonce par Volkswagen (VW) du lancement de 30 modèles de véhicules 100% électriques d'ici 2025 est à première vue une excellente nouvelle. Mais une étude présentée par Shell et le constructeur automobile allemand, réalisée par Roland Berger pour la coalition européenne des carburants automobiles, initialement destinée aux seuls lobbyistes de Bruxelles, montre qu’il est en réalité bien plus réticent face à cette technologie. Décryptage. 

L’étude de 138 pages révélée par le Guardian se lit comme un argumentaire contre les véhicules électriques : une technologie non mature, une infrastructure de recharge trop coûteuse ou encore un prix d’achat plus élevé que leurs équivalents thermiques. Des raisons qui, selon l’étude, font craindre le pire sur le taux d’adoption des véhicules électriques et hybrides rechargeables. La solution proposée ? Développer les biocarburants. Outre Volkswagen et Shell, la coalition européenne des carburants automobiles réunit Daimler, Honda, Toyota et un certain nombre de compagnies pétrolières et d’entreprises issues de la filière des biocarburants.

Une crédibilité en miettes



La publication de cette étude renforce le fort scepticisme qui règne en Allemagne quant à l’annonce par Volkswagen de son repositionnement stratégique sur les véhicules électriques. "Est-ce que Volkswagen cherche à détourner l’attention et à faire beaucoup de bruit pour rien ?", s’interroge le quotidien économique Handelsblatt. D’autant que ce n’est pas la première annonce de ce genre de la part du constructeur : "déjà en 2012, l’ex-patron Martin Winterkorn annonçait que VW allait se concentrer sur les véhicules électriques. Non seulement rien n’a été entrepris dans ce sens mais en plus le scandale des manipulations a éclaté au grand jour", observe Anja Smetanin, de l’organisation VCD, qui s’engage pour une mobilité durable.
De fait, Volkswagen déploie actuellement beaucoup d’énergie à regagner un peu de  crédibilité : jamais le terme confiance fut autant employé que lors de la dernière assemblée du constructeur le 22 juin dernier par les dirigeants de la firme. Mais la stratégie employée semble douteuse. "Volkswagen veut retrouver sa crédibilité, mais alors qu’il devrait s’engager auprès des autorités européennes pour un plafond ambitieux des émissions de CO2 par les véhicules thermiques, on constate que c’est l’inverse qui se produit, poursuit Anja Smetanin. VW et les autres constructeurs allemands se battent pour un abaissement des plafonds d’émissions et le maintien de méthodes laxistes de contrôle anti-pollution, à Bruxelles comme à Berlin".

Retard technologique



Pourquoi ce double jeu ? Selon les experts cités par le quotidien britannique, les constructeurs, compagnies pétrolières et producteurs de biocarburants tentent désespérément de dissuader la Commission européenne de promouvoir le développement de véhicules électriques plus performants. Parce qu’ils sont en retard sur cette nouvelle technologie.
"VW mais aussi les autres constructeurs allemands ont complètement raté la case hybride et véhicule électrique", confirme Anja Smetanin. Une erreur stratégique monumentale qui n’est pas sans rappeler celle des énergéticiens allemands, qui ont laissé passer le train des énergies renouvelables, mettant en péril leur modèle économique.
De fait, le marché des véhicules électriques se développe rapidement dans des pays comme la Chine, la Norvège ou encore les Pays-Bas. Une observation confirmée par les 400 000 commandes du nouveau Model 3 de Tesla, l’annonce par Apple de la sortie en 2019 de son premier véhicule connecté 100% électrique ou encore l’intention du parlement néerlandais d’interdire les moteurs à l’essence et au diesel d’ici 2025.
Le 28 avril dernier, Berlin a également promis une subvention d’un milliard d’euros pour encourager l’achat de véhicules électriques. 

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