Le luxe presque ordinaire du sous-préfet Vacher

Jean-René Vacher, secrétaire général de la Zone de défense Sud : "Ce sont des achats, pas des dépenses personnelles".

Jean-René Vacher, secrétaire général de la Zone de défense Sud : "Ce sont des achats, pas des dépenses personnelles".

Photo DR

Marseille

Vaisselle et draps de prix, mobilier à volonté : le carrosse de l'Etat roule sur l'or

De la vaisselle comme s'il en pleuvait, des achats à volonté chez Darty, une parure de draps à prix d'or : dans la préfectorale, on continue de mener grand train, même si les temps sont durs. Le sous-préfet Jean-René Vacher, secrétaire général de la zone de défense et de sécurité Sud, 64 ans, ancien élève de l'ENA, promotion "Liberté Égalité Fraternité" (1 987), enseignant de formation, ne recule devant rien. Ses frais d'installation à Marseille, à son retour de la Martinique, ont en tout cas été fort coûteux pour le contribuable français, a-t-on appris de source confidentielle.

Pour se meubler, il n'a pas hésité, le 15 novembre 2012, à acheter pour 10 396 euros de vaisselle Villeroy et Boch. Un vase à 199 euros, 315 euros de couteaux à poisson, dix assiettes dites "d'accueil" moyennant 690 euros, 18 assiettes plates à 684 euros, des tasses à moka, un set antipasti, des gobelets à whisky pour 106 euros, un plateau à 238 euros... La liste est longue -- plus de 80 articles différents achetés-- et même très longue. Pas question de passer chez Ikea, ce n'est pas le style de la maison...

Quelques jours plus tard, le 4 décembre, le sous-préfet fait un détour par Darty où il passe commande de 8 503 euros d'électroménager et hi-fi pour meubler son logement intermittent du Vieux-Port: TV LCD, balance de ménage, hachoir, pèse-personne, robot multifonctions, générateur vapeur, sèche-linge... Le trousseau de la famille Vacher est presque complet... Entre-temps, le 27 novembre, le sous-préfet a fait un petit détour par la fameuse maison Descamps, où il a acheté une seule parure de draps avec nappes et serviettes. Une seule, mais de qualité, pour la modique somme de 4 244 euros.

"Je suis resté dans l'enveloppe"

Interrogé hier par La Provence, Jean-René Vacher, qui gère aujourd'hui près de 40 000 policiers et gendarmes, ne nie pas ces achats. "C'est tout à fait vrai, nous a-t-il même confié. Dans le corps préfectoral, vous êtes logé et meublé".

Seulement voilà, nous explique-t-il, quand il est arrivé en 2012, "la préfectoraleétait en pleine restructuration". Un préfet de police s'en allait, un autre, de plein exercice, arrivait, deux autres étaient nommés. "Il n'y avait pas de logement, pas de mobilier. Il n'y avait rien du tout", assure Jean-René Vacher.

23 000 € de dépenses

Pourquoi le sous-préfet ne s'est-il pas installé dans les locaux de l'administration de la police, chemin de Sainte-Marthe (14e) ? "Le préfet de région de l'époque Hugues Parant ne l'a pas souhaité. C'eût été complètement invivable, glisse-t-il. La sécurité aurait été assurée par des chiens. Et en dehors des heures de service, on était obligé d'appeler le gardien". Pour un peu, l'État était obligé de loger M. Vacher à l'accueil de nuit du chemin de la Madrague-Ville...

"On a reçu de Paris une dotation", précise-t-il. Le Secrétariat général pour l'administration de la police (Sgap) aurait selon lui, "avancé l'argent" --15 à 20 000 euros--, puis "cela a été remboursé par le ministère", assure-t-il. En l'occurrence, on estime à plus de 23 000 euros le total des frais engagés. "Je suis resté dans l'enveloppe qui m'avait été donnée", fait observer Jean-René Vachet, avant de préciser : "Ce sont des achats, mais ce ne sont pas des dépenses personnelles ! Il n'y a pas eu d'abus. Je suis dans le cas de tout le monde". Tout le monde ? Tout le monde qui sort de l'ENA, promotion "Liberté, Égalité, Fraternité", la bien nommée...