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Entre deux chaises

Plus de la moitié des Français disent oui à la PMA pour toutes

Un sondage sur les questions d'infertilité et les techniques de procréation médicalement assistée en Europe révèle une France mi-éprouvette, mi couette.
par Catherine Mallaval
publié le 7 juillet 2016 à 16h06

Les Français sont-ils favorables à l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux femmes célibataires ? La réponse est oui à 60%. On enchaîne : sont-ils aussi en faveur de la PMA pour les couples de femmes ? C’est encore oui, à 54%, un pourcentage qui ne dépassait pas les 24% dans les années 90, avant d’atteindre un 50/50 dans les années 2000, puis de monter à nouveau avec l’avènement du mariage pour tous en France et ailleurs.

Révélés par un sondage Odoxa sur «les Européens et l'infertilité» (1) pour la clinique espagnole Eugin – qui accueille moult Françaises privées de PMA -, ces chiffres forcément interpellent. A quand la PMA pour toutes chez nous, comme c'est le cas en Espagne ou en Grande-Bretagne ? A quand une vraie réforme et pas un petit coup de lingette comme le fut cette semaine l'abrogation d'une circulaire rappelant les sanctions encourues par les gynécologues orientant leurs patientes vers un pays étranger ne réservant pas la PMA aux couples hétéros ? Euh.

Si la France, dès 1982, a su applaudir la naissance du premier bébé-éprouvette, Amandine, puis se doter parmi les premiers d'Europe d'une loi de bioéthique (en 1994), depuis «quasiment rien n'a bougé» souligne Laurence Brunet, juriste et chercheuse à l'Université Paris-I Panthéon-Sorbonne. Et si les Français (comme 9 Européens sur 10) voient la PMA comme «un vrai progrès pour les couples infertiles», nous ne sommes pas les plus «libéraux» d'Europe sur le sujet. «Il me semble qu'il y a deux groupes en Europe. D'un côté, le Royaume Uni et l'Espagne, qui considèrent la PMA comme un mode autonome et alternatif de reproduction, avec la femme qui choisit à sa guise. De l'autre, la France, l'Italie, l'Allemagne qui ont en tête un modèle naturaliste, l'idée que la PMA répare un dysfonctionnement de la nature, et s'adresse à un couple "naturel" composé d'un homme et d'une femme», ajoute la juriste.

Une France de l’entre-deux

La preuve par les chiffres : 36% des Français vont encore jusqu’à évoquer la PMA comme une technique contre nature. En outre, 58% des Français ne sont pas prêts à donner leur sperme et 67% des Françaises ne s’imaginent pas permettre à une autre femme d’utiliser leurs ovocytes. On notera que le don d’ovocytes est carrément interdit en Allemagne.

Et quid de la possibilité pour les femmes de congeler leurs ovocytes pour éviter le coup de gong de leur horloge biologique? Si 67% des Européens en ont entendu parler, ce pourcentage en France tombe à 65%. Parmi ceux-là, 51% sont favorables à ce que l'on appelle une «vitrification sociétale» et 49% contre. Dans le camp des opposés, les Allemands disent non à 55% et les Italiens à 62%. Dans celui des pour, les Espagnols y sont favorables à 77%, et les Britanniques à 54%. A l'arrivée, ce sondage révèle une France de l'entre-deux. Mi-couette, mi-éprouvette.

(1) Sur un échantillon de 2986 Européens (France, Grande-Bretagne, Espagne, Allemagne et Italie) âgé de 18 ans et +, réalisé du 26 au 30 mai 2016

Pour aller plus loin :

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