Paris: Une grève «made in china» pour les petites mains d'un prothésiste ongulaire

Paris: Une grève «made in china» pour les petites mains d'un prothésiste ongulaire

REPORTAGE – Sans papiers et employés «au noir», cinq travailleurs chinois se sont mis en grève à Paris (10e), pour réclamer leur paye et leur régularisation …
Quatre des cinq salariés chinois sont en gréve, à Paris (10e) le 12 février 2014
Quatre des cinq salariés chinois sont en gréve, à Paris (10e) le 12 février 2014 - M.GRUEL / 20 MINUTES
Mathieu Gruel

Mathieu Gruel

«Ces travailleurs se sont pris en main». Depuis lundi, quatre femmes et un homme originaires de Chine, qui travaillent dans un institut de prothésiste ongulaire au 50 boulevard de Strasbourg (10e), sont en grève. «Une première», souligne Raymond Chauveau de la CGT, qui indique «qu’il n’y avait jamais eu de mouvement de grève de salariés chinois».

Ce mercredi midi, l'activité était donc suspendue dans la boutique, où les grévistes officient habituellement au rez-de-chaussée. Car depuis décembre, ces cinq travailleurs qui, pour certains vivent en France depuis sept ans, n'ont pas été payés. Quant à leur patron, à qui ils devaient reverser 50% de leurs revenus pour pouvoir exercer dans le local, il a disparu.

Sans papiers et embauchés «au noir», pour certains depuis quatre ou trois ans, ces employés aux revenus oscillant entre 700 et 2.000 euros selon les mois, ont pourtant décidé de médiatiser leur lutte. Et d'occuper le local jour et nuit.

Obtenir la régularisation

Et, au milieu de la petite pièce, encombrée de leurs postes de travail, des drapeaux rouges ont fleuri. A leur côté dans ce combat qui s'amorce, l'union locale CGT du 10e entend, avec eux, «dénoncer les conditions de surexploitation» dans lesquelles ces salariés se trouvent. Et leur apporter un précieux soutien, car la plupart s’exprime dans un français hésitant.

Chaque nouveau client est donc accueilli avec un tract, qui explique la situation. Et pour l'instant, «la solidarité est totale», se félicite Pascale, l'une des militantes CGT présente ce mercredi. «C'est le début, il y a encore de l'espoir», souligne-t-elle. L'objectif affiché est clair. «On veut d’abord que le patron paye les salaires dus», explique Raymond Chauveau, de la CGT. «Ensuite, nous voulons qu’il remplisse les documents nécessaire pour obtenir la régularisation de ces personnes par le travail».

Changement de mentalités

Pour cela -et comme le prévoit la circulaire du 28 novembre 2012 sur les conditions d’examen des demandes d’admission au séjour des étrangers en situation irrégulière- il importe au syndicat d'établir le lien de subordination entre les salariés et le patron. «Cela nous permettra ensuite d’arguer devant la Préfecture de police et permettre la régularisation de ces travailleurs», indique le syndicaliste.

Ce dernier, qui se félicite du mouvement de grève, l’explique par un «léger changement de mentalité chez les salariés chinois». En 2009, un précédent mouvement de sans papiers et clandestins chinois, qui demandaient une modification des critères de régularisation, n’y serait pas étranger. Il aurait contribué à «faire évoluer les mentalités», constate le syndicaliste. Pour lui, cela montre surtout que «la surexploitation n’est plus acceptée».