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«C'était mieux avant» : 46% des Français se sentent déclassés

Selon une enquête menée par la Drees, le nombre de personnes considérant que leur situation personnelle est moins bonne que celle de leurs parents est en forte hausse : + 10 points en dix ans.
par Amélie Quentel
publié le 11 juillet 2016 à 13h38

«C'était mieux avant» était la phrase préférée de Francis Cabrel dans l'émission Les Guignols, sur Canal + (quand elle était encore clair). C'est aussi ce que pensent un certain nombre de Français, à en juger le baromètre d'opinion de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees). D'après ses résultats, près de la moitié des personnes interrogées (46%) considéraient en 2014 leur situation globale moins bonne que celle de leurs parents. En une décennie, ce sentiment s'est considérablement renforcé : en 2004, seuls 36% des Français pensaient qu'ils vivaient moins bien que la génération précédente.

Les jeunes actifs plus pessimistes que les étudiants

Un «sentiment de déclassement inter-générationnel» à mettre en perspective en fonction de la place occupée par les individus interrogés sur le marché du travail, mais aussi de leur âge. Ainsi, selon l'étude, les personnes de 60 ans et plus «ont une bien meilleure opinion de leur situation que de celle de leurs parents», a contrario de la majorité des 25-59 ans, qui estiment que leur situation s'est dégradée par rapport à leurs aïeux. Les moins de 25 ans, eux, seraient 44% à juger leur situation moins bonne, même si ce résultat recouvre plusieurs réalités : parmi eux, les jeunes actifs sont plus pessimistes que les étudiants (respectivement 51% contre 36% considèrent être déclassés).

Un constat à mettre en lien avec ce que l'étude nomme «un moment de désenchantement», depuis les années 1990 : l'insertion professionnelle. En cause, des «liens entre diplôme et salaire à l'entrée [qui] se sont distendus» : en gros, les personnes ayant fait de longues études (au moins niveau licence) se sentent «de fait déclassées», car «leurs attentes salariales ne correspondent pas à la rémunération effectivement obtenue». Et pour cause : entre 1995 et 2007, le salaire médian des diplômés niveau licence a baissé de 7,5%.

La crainte de basculer dans la pauvreté

Mais c’est la précarité sur le marché du travail qui reste, logiquement, le principal facteur d’explication du sentiment de déclassement. 67% des chômeurs ont l’impression que la situation de leurs parents étaient meilleure, contre 48% pour les personnes travaillant à temps plein. Celles exerçant à temps partiel ou en intermittent pensent également en majorité être déclassées (respectivement 55% et 61%). A noter que le niveau de vie des ménages est également un élément important : les 20% les plus aisés ont un risque de se sentir déclassé moindre de 13 points par rapport aux 20% les moins riches.

Autre conclusion de ce baromètre : 45% des Français qui pensent que leur situation est moins bonne que celle de leurs parents craignent de basculer dans la pauvreté au cours des cinq prochaines années. C’est seulement le cas de 28% des personnes estimant que la situation de leurs parents étaient moins bonne ou identique à la leur.

Les gens qui se sentent déclassés et les optimistes sont toutefois d'accord sur un point : les trois-quarts de chaque groupe considèrent que la méritocratie à la française ne fonctionne pas, et que la société est «plutôt injuste».

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