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Quel pays européen a fait 26% de croissance l'an dernier ?

L'Irlande a enregistré une croissance de 26 % grâce à son attractivité fiscale, mais s'inquiète du Brexit.  

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Les irlandais ne sont pas que les meilleurs supporters du monde ! (Sipa)
Publié le 13 juil. 2016 à 13:17

C'est une performance sans équivalent au monde dans un passé récent. La croissance économique de l'Irlande a atteint 26,3 % l'an dernier, selon des données révisées diffusées mardi par l'Office central des statistiques, contre une évaluation de « seulement » 7,3 % il y a quelques mois. Seul l'Azerbaïdjan a fait mieux, avec 34,6 % en 2006, grâce à la flambée des cours du pétrole. Nul or noir, toutefois, pour expliquer ce chiffre irlandais spectaculaire, mais des... changements d'adresses fiscales. Des entreprises, surtout américaines, ont domicilié l'an dernier en Irlande leur siège social, dont le capital a automatiquement été comptabilisé dans le PIB du pays. Un jeu d'écriture ne correspondant donc pas à un flux financier réel. En revanche, l'opportunisme fiscal (le taux d'impôt sur le bénéfice est de 12,5 %, contre 29 % en moyenne dans l'Union... et bientôt 15 % au Royaume-Uni) a aussi poussé des entreprises à faire des acquisitions en Irlande, ce qui s'est traduit par des rentrées d'argent. Le PIB a aussi été gonflé par l'importation de nombreux avions en raison de l'explosion du leasing de longs courriers en Europe.

Même en défalquant ces illusions d'optique, l'économie irlandaise n'en demeure pas moins très dynamique, sept ans après une crise financière qui avait failli la mettre à genoux. Le Brexit menace-t-il cette prospérité retrouvée ? Dublin ne cache pas sa préoccupation, illustrée par la déclaration du Premier ministre, mardi, Enda Kenny, qui a demandé avec son homologue allemande, Angela Merkel, lors d'une rencontre à Berlin, que la nouvelle chef du gouvernement britannique, Theresa May «  clarifie rapidement » ses intentions sur la sortie de l'Union. Thibault Cezanne, spécialiste de l'Irlande à Natixis, souligne que «  le rétablissement de barrières commerciales du Royaume-Uni aura forcément des conséquences négatives sur l'Irlande à court terme, puisque ses exportations et ses flux d'investissements vers le Royaume-Uni représentent respectivement 18 % et 28,6 % de son PIB ». En outre, la chute de la livre sterling va rendre moins compétitifs les produits irlandais par rapport à leurs concurrents du Royaume-Uni, notamment dans l'agroalimentaire et la pharmacie. Au total, estime Ludovic Subran, chef économiste d'Euler Hermes, «  le Brexit devrait faire perdre 1,3 milliard d'euros par an aux exportations irlandaises et 2 milliards à ses investissements internationaux. En cumulé sur deux ans, cela représente une perte de 1,5 % du PIB, soit le deuxième impact le plus négatif derrière les Pays-Bas et devant la Belgique. A plus long terme, l'Irlande pourra profiter toutefois d'être la seule porte d'entrée anglophone dans l'Union européenne, voire la zone euro. Ludovic Subran ne croit toutefois pas que la place financière de Dublin ait la taille suffisante pour disputer à Francfort, Paris ou Milan la récupération des activités fuyant Londres.

Yves Bourdillon

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