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Antoine Leiris : « Le jour où nous n’allumerons plus de bougies, nous serons devenus comme eux »

Le journaliste Antoine Leiris a perdu sa femme, Hélène, au Bataclan, emportée par les attentats du 13 novembre. Face à la violence, dit-il, certains rituels reprennent leur sens, dont celui d’allumer une bougie en signe de solidarité.

Publié le 17 juillet 2016 à 20h34, modifié le 17 juillet 2016 à 19h58 Temps de Lecture 1 min.

A Nice le 15 juillet.

Le journaliste Antoine Leiris a perdu sa femme, Hélène, au Bataclan le 13 novembre. Il signe ce texte écrit après l’attentat de Nice le 14 juillet.

Par Antoine Leiris

Je ne supporte plus l’odeur des bougies. Elle me donne envie de vomir. À Nice, à Paris, à Orlando, à Istanbul, à Bruxelles, et partout où ils ont semé la mort, ce sont les mêmes scènes. Les mêmes portraits accrochés. Les mêmes fleurs déposées. Les mêmes bougies allumées. Et cette odeur âcre qui me laisse dans la bouche le goût du sang versé.

Je pensais ne plus avoir assez de larmes. Je pensais que le pire était passé. Je pensais m’être habitué. Je me trompais. À chaque nouvelle attaque j’ai pleuré. Ils étaient des hommes, des femmes, des enfants. Ils avaient des envies, des peurs, des désirs, une vie. Ils sont morts. Et nous allumons une bougie.

Contre un camion lancé à pleine vitesse, contre des Kalachnikovs chargées de rancœur, contre des explosifs prêts à sauter, c’est peu une bougie. Pourtant c’est une arme plus puissante que toutes celles qu’ils pourront utiliser. Parce que le jour ou la mort de l’autre nous laissera sans réaction, le jour où nous n’allumerons plus de bougies, nous serons devenus comme eux.

Des êtres sans peur face à la mort. Mais pour ne pas craindre la mort, il faut trembler de peur devant la vie. Alors craignons la mort et embrassons la vie. Dès le lendemain j’ai allumé une bougie que j’ai posée sur le rebord de ma fenêtre. Elle brûle encore aujourd’hui. Elle me rappelle l’odeur de la peur, de la haine, du renoncement. Elle me rappelle l’urgence de la vie.

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