
POLITIQUE - C'est un chiffre qui ne trompe pas. En un mois, la part des Français qui font de l'insécurité leur première préoccupation a été multipliée par trois. Selon la vague d'août du baromètre YouGov pour Le HuffPost et iTélé, ils sont désormais 29% (contre 10% en juillet) à le mettre tout en haut de leur liste.
Les deux attentats survenus à Nice et Saint-Etienne-du-Rouvray ont même fait de l'insécurité la question numéro un, devant l'emploi et le chômage qui sont habituellement en tête (28% contre 32% en juillet). C'est donc dans un climat extrêmement lourd que les Français tentent de profiter de leurs vacances.
Face à ces craintes, ils semblent en attente d'une réponse sécuritaire forte bien qu'ils soient dubitatifs sur l'efficacité des dispositifs.
Un sentiment d'efficacité en chute libre par rapport à janvier
Illustration avec l'état d'urgence qui a été prolongé une quatrième fois après l'attentat de Nice et renforcé par plusieurs dispositifs administratifs. Cette prolongation, largement validée par les parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat, l'est aussi par 76% de la population: c'est sept points de plus qu'en janvier dernier pour la deuxième prolongation après les attentats du 13 novembre.
Dans le détail, 69% des 18-34 ans y sont favorables (+13 par rapport à janvier), 75% des 35-54 ans (+9) et même 81% pour les plus de 55% (+4). Le consensus est le même quand on interroge les sympathisants des partis politiques. Si les proches de l'extrême-gauche sont les plus réticents (52% d'approbation), la part des Français favorables à la prolongation de l'état d'urgence oscille entre 80 et 88% pour les proches du PS ou des Républicains.
"Il faut accepter une certaine limitation des libertés fondamentales des individus pour mieux garantir la sécurité de tous" considèrent ainsi 64% des personnes interrogées. Elles ne sont que 18% à estimer que "l'état d'urgence porte atteinte aux libertés fondamentales des individus".
Et pourtant, derrière cet unanimisme se cache une certaine désillusion. Moins d'un Français sur trois (27%) estime que l'état d'urgence est efficace dans la lutte contre le terrorisme. "En janvier dernier, 58% des Français le considéraient comme efficace, soit 31 points de plus qu'aujourd'hui", note YouGov. Le fait que l'attentat de Nice ait été commis alors même que ce régime d'exception était en vigueur explique en grande partie cette baisse de confiance dans le dispositif.
Le fait aussi que des attentats touchent également la Province (la Côte d'Azur puis la Normandie) et plus seulement la région parisienne participe d'une diffusion de la peur à toute la population.
Un grand oui à l'enfermement des fichés S
Dès lors que ce constat est fait, que réclament les Français? Quand on leur demande s'il faut en faire plus, ils sont très partagés. 40% sont d'accord avec François Hollande quand il déclare que "les lois que nous avons fait voter donnent la capacité d'agir" et 42% sont en désaccord. Mais quand on leur fait des propositions concrètes, toutes rencontrent un franc succès, y compris celles qui sont juridiquement très délicates (impossibles?) à mettre en oeuvre.
Sans surprise, 80% des personnes interrogées sont favorables à la décision de maintenir l'opération Sentinelle à son maximum. 10.000 soldats resteront ainsi mobilisés pour sécuriser le territoire.
Dans les mêmes proportions ou presque (76%), les Français aimeraient que le gouvernement réponde favorablement à la volonté de l'opposition de placer en centre de rétention les personnes fichées S. Figurant dans une proposition de loi que Les Républicains vont déposer à la rentrée, la mesure est pourtant rejetée par l'exécutif qui voit des motifs d'incompatibilité avec la Constitution et la Convention européenne des droits de l'homme.
Enfin -et même si cela aurait une portée très limitée sur la lutte antiterroriste- une nette majorité des personnes questionnées par YouGov (65%) se disent pour la constitution d'un "gouvernement d'unité nationale, constitué de représentants de toutes les forces politiques du pays". À voir les réactions dans les heures suivant le drame de Nice, on se dit que ce scénario n'est vraiment pas près de devenir réalité.