Quand Beyoncé a sorti Lemonade [en avril], elle a pris l’Amérique par surprise. Non parce que l’album est sorti un samedi soir sans préavis, ni parce qu’il a alimenté les spéculations sur l’état de son mariage [avec le rappeur Jay Z], mais parce que la chanteuse y crachait une colère assumée.
Alors que la musique populaire joue traditionnellement le rôle de baromètre culturel du mécontentement des jeunes, et que presque toutes les évolutions importantes de la pop, du rock et du hip-hop sont nées d’un sentiment de désillusion ou d’indignation, la pop est aujourd’hui l’un des rares domaines de la culture américaine où la colère se fait rare.
La pop fait la fête tandis que le monde brûle
L’électro, cette musique festive, souvent sans paroles, est celle qui attire incontestablement le plus de monde sur les festivals depuis quelques années. Drake, le rappeur le plus connu aux Etats-Unis, est un Canadien consensuel. Et, si vous êtes davantage branché R & B, The Weeknd, lui aussi Canadien, passe en revue tous les moyens de vous sentir nul pour avoir trop festoyé la veille.
La pop réussit à faire la fête tandis que le reste du monde brûle, et pendant ce temps ce sont la télévision et le cinéma qui se chargent de plus en plus souvent de mettre en scène la colère d’une classe moyenne en perte de vitesse (voir Breaking Bad), le racisme institutionnel (voir Selma et Fruitvale Station) et l’abrutissement général causé par une indigestion de mauvaises nouvelles (Mr. Robot, Unbreakable Kimmy Schmidt).
Black Lives Matter, le sursaut ?
“Toute époque a sa musique pour s’évader. Dans les années 1950, ça a été la pop qui a suivi Little Richard”, explique Billie Joe Armstrong, chanteur de Green Day, le dernier grand groupe de rock à avoir, avec American Idiot, en 2004, hissé un album plein de fureur et d’indignation dans le top 10. “Après la turbulence des années 1960, nous avons eu la daube des années 1970 – de la musique tranquille et ennuyeuse, beaucoup de sonorités naturelles –, et puis
- Accédez à tous les contenus abonnés
- Soutenez une rédaction indépendante
- Recevez le Réveil Courrier chaque matin
Le géant de la côte ouest. Créé en 1881, c’est le plus à gauche des quotidiens à fort tirage du pays et le grand spécialiste des sujets de société et de l’industrie du divertissement.
Ce n’est qu’à partir des années 1940 qu’il devient le premier quotidien de Los Angeles. Détenu par des Californiens depuis l’origine, le titre est racheté en l’an 2000 par le groupe Tribune – propriétaire du Chicago Tribune. En 2018, le Los Angeles Times est vendu à un milliardaire des biotechnologies, Patrick Soon-Shiong.
Après des années de baisse des ventes, de valse des directeurs de la rédaction et de coupes dans les effectifs, cet ancien chirurgien entend relancer le titre et lui faire prendre le train du numérique. Avec un objectif très ambitieux : 5 millions d’abonnés numériques. Une gageure alors que le Los Angeles Times en compte début 2019 environ 150 000.