La Marianne de Leonard Cohen est vraiment partie

“So long, Marianne”, disait la chanson. Juste avant la disparition de sa muse norvégienne des sixties, rencontrée sur l’île grecque d'Hydra, le poète canadien lui a adressé une dernière lettre.

Par François Gorin

Publié le 08 août 2016 à 14h30

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 02h55

Les muses meurent aussi. On a fait connaissance avec Marianne Ihlen quand Leonard Cohen déja lui disait adieu, sur une chanson de son premier album, paru en 1967. So long, Marianne, peut-être pas une de ses plus belles, mais tout le monde l'a en tête. « Il est temps que nous nous mettions à rire et pleurer et pleurer et rire de tout cela à nouveau… » L'entrain de la mélodie cachait donc une rupture et quelques mots glacés : « Tu es partie quand je t'ai dit que j'étais curieux / Je ne me suis jamais prétendu courageux. » 

Au dos de la pochette de l'album suivant, Songs from a room (1969), la muse envolée apparaît sur une photo en noir et blanc, malicieuse, assise à la machine à écrire du poète, sa blondeur sculpturale enveloppée d'une simple serviette blanche. Marianne est donc toujours un peu là, elle inspire encore les chansons de son ex-amant, écrites, tel le fameux Bird on the wire, dans cette pièce de la maison qu'ils partageaient à Hydra.

Sur l'île grecque a eu lieu la rencontre, au début des années soixante. Marianne Ihlen, délaissée par l'écrivain Axel Jensen, Norvégien comme elle, y vit alors avec le jeune fils de celui-ci. Leonard Cohen, ébloui par « la plus belle femme qu'il ait jamais connue », la ramène à Oslo, puis lui propose de s'installer à Montréal. Leur liaison passera aussi par New York et encore Hydra, car le Canadien, même amoureux, reste le « Gypsy boy » errant de sa chanson.

Passé le temps d'un adieu définitif, Marianne demeurera un fantasme pour le fan de Leonard, et un souvenir jamais envolé pour celui-ci. Apprenant qu'elle était mourante, le musicien lui a adressé une lettre poignante, dont l'extrait suivant a été rendu public par le documentariste Jan Christian Mollestad, fidèle ami de Marianne Ihlen, sur une radio canadienne : « Eh bien Marianne, voici venu le temps où nous sommes vraiment si vieux que nos corps partent en morceaux, et je crois que je vais te suivre très bientôt. Sache que je suis si près derrière toi qu'en tendant ta main, tu peux toucher la mienne. » A ces mots, précise le témoin des derniers instants, Marianne a fait le geste de tendre la main. Deux jours après, elle perdait conscience. Elle s'est éteinte à Oslo le 29 juillet, à 81 ans, un âge que Leonard Cohen dépassera, si tout va bien, le 21 septembre prochain. 

 

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