“Œil pour œil, dent pour dent : voilà l’ambiance en Turquie au début de la quatrième semaine après le putsch manqué”, écrit Yavuz Baydar dans un article publié par la Süddeutsche Zeitung. Le journaliste turc revient sur les rassemblements géants “pour la démocratie” du 7 août en Turquie, où plusieurs centaines de milliers de manifestants sont descendus dans les rues – plus de 3 millions selon les journaux progouvernementaux.

“Alertée par la chasse aux soi-disant putschistes et opposants, par des razzias aléatoires et des actions de nettoyage dans les institutions, la meute ne renonce pas à ses cris pour le rétablissement de la peine de mort. Le président, lui aussi, continue à l’exiger.” Devant la foule à Istanbul, Recep Tayyip Erdogan a ainsi lancé :  

Un rétablissement de la peine capitale abolie en 2004 sonnerait le glas des négociations, déjà très compromises, d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne. Une telle décision aggraverait aussi l’inquiétude à l’étranger quant à une dérive autoritaire du président Erdogan, qui concentre les pouvoirs d’une manière inédite dans la République.

Dans le quotidien allemand pour lequel il tient une chronique sur son pays, Yavuz Baydar relève deux autres événements qui corroborent ce constat : la confiscation du passeport d’un confrère récemment rentré en Turquie, ami du journaliste assassiné Hrant Dink et journaliste pour différents médias indépendants, tous disparus de la circulation aujourd’hui ; et la “mise en congé” de 21 professeurs et maîtres de conférences de l’Université Anadolu qui avaient signé une pétition pour appeler à de nouvelles discussions afin de mettre fin aux rebellions kurdes. “Comment s’étonner que beaucoup d’intellectuels pensent à une carrière à l’étranger ?” écrit le journaliste. 

Et il reste la question de savoir ce qui se passe dans les prisons et les camps où les putschistes […] sont détenus. Le quotidien de gauche ‘BirGün’ a cité des avocats affirmant que des soldats ayant participé au putsch ont été brutalisés dans la prison de Silivri. Si c’est vrai, cela nourrira les inquiétudes exprimées par Amnesty International, selon lesquelles la torture aurait fait son retour comme moyen d’oppression.”