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Incendies : à Vitrolles et aux Pennes-Mirabeau, « c’était l’apocalypse »

Les feux qui se sont déclarés, mercredi, dans le sud-est de la France, ont surpris par leur intensité et leur vitesse de propagation. Dans les Bouches-du-Rhône, les pompiers ont affronté une situation « hors de contrôle ».

Par  (Marseille, correspondant)

Publié le 10 août 2016 à 23h09, modifié le 11 août 2016 à 08h16

Temps de Lecture 5 min.

De très violents incendies, attisés par un vent extrêmement fort et favorisés par une grande sécheresse de la végétation, ont ravagé, mercredi 10 août, plus de 2 000 hectares de garrigues et de pinèdes dans les Bouches-du-Rhône, selon un bilan encore incomplet.

Plusieurs foyers ont éclos durant l’après-midi de mercredi dans différentes zones autour de l’Etang de Berre, à Rognac, Vitrolles, Fos-sur-Mer, Istres, Les Pennes-Mirabeau et ont provoqué l’évacuation de nombreuses personnes, la préfecture estimant à 600 le nombre d’habitants temporairement accueillis dans des gymnases ou des salles polyvalentes. Beaucoup d’autres ont trouvé un hébergement dans leur famille ou chez des amis.

Deux pompiers ont été « assez légèrement blessés » et un véhicule des services d’incendie et de secours du département du Var a été détruit, selon la préfecture. Un bilan sur le nombre d’habitations détruites est en cours.

« C’est un incendie de grande ampleur, qui a ravagé déjà plus de 2 000 hectares. La mobilisation des secours est totale, a déclaré le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve. La situation a été rendue difficile en raison de la météo, avec un fort vent et une sécheresse qui dure depuis plusieurs semaines. »

Dès le milieu de l’après-midi, une fumée noire voilant le soleil avait obscurci le ciel de Marseille où régnait une odeur âcre ; de la cendre voletait dans les rues.

Au nord de Marseille, le 10 août 2016.

Moyens aériens

Jeudi matin à 7 heures, cinq Canadair – dont les deux appareils qui sont traditionnellement positionnés l’été en Corse – devaient reprendre leurs rotations, venant en appui aux quelque 800 sapeurs et marins pompiers engagés sur un front qui, au cœur de la nuit, menaçait de franchir la crête d’une colline et d’atteindre les quartiers Nord de Marseille où se situent des zones habitées boisées, mais aussi de grandes cités comme celle de La Castellane. Deux avions Trackers, un Dash 8 et un hélicoptère Milan ont également été réengagés.

Durant de longues heures, les secours ont affronté « une situation hors de contrôle, un feu extrêmement puissant, rapide, explosif continuant à brûler tout sur son passage, même les maisons », selon un communiqué des pompiers. Ils espéraient une accalmie à la faveur de la nuit grâce à la baisse des températures et à une hygrométrie plus favorable, malgré un vent toujours très tumultueux.

En milieu de nuit, Yves Rousset, le préfet délégué, confiait que les autorités avaient dû faire face à « une situation très compliquée avec des incendies dans différents secteurs ».

Confrontés à des sautes de feu de plusieurs centaines de mètres à même de passer par-dessus les dispositifs mis en place – les flammes ont ainsi franchi l’autoroute A7 –, les secours « ont avant tout cherché à protéger les points sensibles, selon le capitaine de frégate Guy Velu, officier supérieur du bataillon des marins-pompiers de Marseille. On anticipe, on essaie d’avoir un coup d’avance sur le feu. Sachant qu’il sera sur telle position une demi-heure ou une heure plus tard, nous positionnons nos forces pour protéger les zones habitées. On ne peut pas se permettre d’avoir des morts ».

Evacuations préventives

Des évacuations avaient été ordonnées préventivement afin que les habitants ne se retrouvent pas coincés sur des routes envahies de fumée et à contre-courant des véhicules de secours.

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A Fos sur-Mer, les craintes étaient grandes en raison de la propagation des flammes sur le terrain des installations pétrolières, mais le front du sinistre a pu être maîtrisé grâce à l’addition des forces du Service départemental d’incendie et de secours (SDIS) et les moyens de lutte propres aux entreprises.

« Nous avons évacué le personnel situé dans la zone longée par l’incendie. Nos installations ont été mises à l’arrêt ou ralenties (…). Une cellule de crise a été déclenchée immédiatement », a ainsi communiqué le groupe ArcelorMittal à Fos.

Vitrolles compte parmi les communes les plus éprouvées par ce premier grand feu de l’été. « Le feu part de partout, c’est incontrôlable », constatait un policier chargé de réguler la circulation. Des quartiers ont été rapidement vidés de leurs habitants.

« Les pompiers nous ont demandé de partir vite. C’était l’apocalypse. On a juste eu le temps de prendre la chienne et la voiture et rien d’autre. On est arrivé, sans rien, nu et cru, chez une amie dans le centre-ville », a raconté au Monde une Vitrollaise du quartier des Pinchinades, une zone de villas bordée de pinèdes.

« Le feu nous a pris en tenaille »

Près de Vitrolles dasn la nuit du 10 au 11 août.

« J’ai la moitié de ma commune qui brûle, déplorait, mercredi soir, Michel Amiel, maire des Pennes-Mirabeau, une cité de 22 000 habitants mitoyenne des quartiers Nord de Marseille. C’est une catastrophe, je n’ai jamais vu cela », ajoutait l’élu qui a fait ouvrir trois lieux pour abriter les habitants. L’hôtel de ville s’est ainsi transformé en abri où des lits de camp ont été positionnés jusque dans le hall et des tapis de sol de gymnase empilés.

En début de nuit, une centaine de personnes espéraient pouvoir rapidement regagner leur domicile, avec la crainte de le retrouver incendié. « La police est venue nous chercher pour nous mettre en sûreté, ça flambait partout dans la colline. On a fermé les maisons, on était dans la fumée », témoignaient deux personnes âgées, amies et voisines du quartier dit le village.

Norddine Zergua, 62 ans, a, lui, vu brûler la maison qu’il était en train de retaper dans le quartier de l’Infernet Ouest. « Je suis parti juste à temps, les branches des arbres tombaient. Je n’ai plus rien que le jean que je porte, ma voiture et, montrait-il sur les photos de son téléphone portable, deux tondeuses à gazon » épargnées par les flammes.

Dans une ambiance calme mais très tendue, les habitants présents dans la salle du conseil municipal des Pennes-Mirabeau, se sont regroupés entre voisins. « J’ai juste pris un sac avec les papiers, l’acte de propriété et l’attestation d’assurance », confiait une habitante qui a eu le sentiment que « le feu nous a pris en tenaille ».

Entre voisins, ils énuméraient les pins présents sur leurs propriétés pour évaluer les risques. Jennyfer, une étudiante de 24 ans, pensait, elle, à ce qu’elle pouvait perdre : « Je suis étudiante et peut-être que mon ordinateur, mes cours sont en train de brûler. C’est quand même six ans de ma vie. ».

D’importants renforts partis d’autres départements – un millier d’hommes environ – devaient rapidement épauler les secouristes des Bouches-du-Rhône, notamment en assurant des missions classiques afin de libérer des effectifs pour la lutte contre le feu. Une fois l’incendie maîtrisé, il faudra encore des jours pour noyer les dernières braises et empêcher toute reprise de feu.

  • Scène d’incendie à Vitrolles, d’où plus d’un millier de personnes ont été évacuées mercredi 10 août.

    Scène d’incendie à Vitrolles, d’où plus d’un millier de personnes ont été évacuées mercredi 10 août. BORIS HORVAT / AFP

  • Les incendies se sont notamment propagés près des sites industriels de Fos-sur-mer.

    Les incendies se sont notamment propagés près des sites industriels de Fos-sur-mer. BERTRAND LANGLOIS / AFP

  • Une vue impressionnante de l’incendie au nord de Marseille.

    Une vue impressionnante de l’incendie au nord de Marseille. PHILIPPE LAURENSON / REUTERS

  • L’A8 a été coupée dans les deux sens dans le secteur de Coudoux, entre Coudoux et Aix-en-Provence. L’A55 a été coupée en direction de Lyon au départ de Marseille.

    L’A8 a été coupée dans les deux sens dans le secteur de Coudoux, entre Coudoux et Aix-en-Provence. L’A55 a été coupée en direction de Lyon au départ de Marseille. PHILIPPE LAURENSON / REUTERS

  • Le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, s’est rendu sur place. « C’est un incendie de grande ampleur, qui a ravagé déjà plus de 2 000 hectares. La mobilisation des secours est totale », a-t-il déclaré.

    Le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, s’est rendu sur place. « C’est un incendie de grande ampleur, qui a ravagé déjà plus de 2 000 hectares. La mobilisation des secours est totale », a-t-il déclaré. SYLVAIN THOMAS / AFP

  • « 1 800 pompiers sont mobilisés et 400 policiers et gendarmes pour assurer la sécurité des biens et des personnes », a déclaré Bernard Cazeneuve mercredi soir.

    « 1 800 pompiers sont mobilisés et 400 policiers et gendarmes pour assurer la sécurité des biens et des personnes », a déclaré Bernard Cazeneuve mercredi soir. PHILIPPE LAURENSON / REUTERS

  • Un hélicoptère bombardier d’eau au dessus de l’incendie près l’autoroute A7 en fin de journée le 10 août.

    Un hélicoptère bombardier d’eau au dessus de l’incendie près l’autoroute A7 en fin de journée le 10 août. BORIS HORVAT / AFP

  • « La situation a été rendue difficile en raison de la météo, avec un fort vent et une sécheresse qui dure depuis plusieurs semaines », a dit le ministre de l’intérieur.

    « La situation a été rendue difficile en raison de la météo, avec un fort vent et une sécheresse qui dure depuis plusieurs semaines », a dit le ministre de l’intérieur. BORIS HORVAT / AFP

  • Des habitants dans la nuit près de Vitrolles.

    Des habitants dans la nuit près de Vitrolles. BERTRAND LANGLOIS / AFP

  • Aux Pennes-Mirabeau, le 11 août.

    Aux Pennes-Mirabeau, le 11 août. BORIS HORVAT / AFP

  • Un homme constate l’ampleur des dégâts sur sa maison ravagée par les incendies, le 11 août.

    Un homme constate l’ampleur des dégâts sur sa maison ravagée par les incendies, le 11 août. BERTRAND LANGLOIS / AFP

  • Des sapeurs-pompiers sur les lieux des incendies, aux Pennes-Mirabeau, au matin.

    Des sapeurs-pompiers sur les lieux des incendies, aux Pennes-Mirabeau, au matin. BORIS HORVAT / AFP

  • Des véhicules calcinés d’un concessionnaire à Vitrolles, le 11 août.

    Des véhicules calcinés d’un concessionnaire à Vitrolles, le 11 août. BERTRAND LANGLOIS / AFP

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  • Hérault : quatre pompiers blessés

Dans l’Hérault, un violent incendie, circonscrit peu après 20 heures, a ravagé mercredi environ 200 hectares près du village de Gabian, à 20 kilomètres au nord de Béziers, selon le service départemental d’incendie et de secours de l’Hérault. Quatre pompiers, dans un véhicule cerné par les flammes, ont été brûlés, dont trois grièvement. « Nous sommes très inquiets », a déclaré le lieutenant-colonel Yannick Rebillon, des sapeurs-pompiers de l’Hérault. Les quatre hommes ont été transportés vers des hôpitaux de Montpellier.

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