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Sans bureaux ou sans boss, 4 sociétés qui font bouger les lignes

Ces 4 sociétés repérées par Les Echos START ont inventé chacune à leur manière de nouvelles façons de travailler. Startup ou grand groupe, elles ont décidé de sortir des sentiers battus pour le plus grand bonheur de leurs salariés.

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Publié le 8 août 2016 à 14:00Mis à jour le 10 août 2016 à 14:55

1 - Sogilis, l'entreprise sans manager

Les 35 salariés de cette petite PME grenobloise fondée en 2008 qui conçoit des logiciels sur mesure, n’ont pas de chef. Ni d’horaires ou de lieu de travail imposés.

Dans cette “entreprise libérée”, les ingénieurs (des trentenaires en majorité) se regroupent en “cellule” pour travailler sur un projet client donné et chacune de ces équipes ainsi constituées s’autogère complètement. “Elles n’ont que trois règles”, précise Christophe Baillon, trente-cinq ans, fondateur et dirigeant de Sogilis. “Enthousiasmer le client (et pas seulement lui rendre un logiciel sans bugs à temps) ; être rentable (pour pouvoir payer les salaires de l’équipe et participer aux frais fixes de la société), et s’amuser !”

Les salariés choisissent les projets sur lesquels ils ont envie de travailler ce qui conduit Sogilis à refuser parfois des clients si personne n’est intéressé. Loin de créer du chaos, cette liberté a plutôt l’air de faire des merveilles. Contrairement aux autres SSII (société de services et d’ingénierie en informatique), le turnover est très faible chez Sogilis (moins d’un départ par an) et la société connaît une croissance moyenne de 30 % chaque année depuis 2012. Mais l’ingrédient secret de Christophe Baillon, c’est surtout la confiance : “Les plus légitimes pour prendre une décision sont ceux qui sont proches du terrain. Mon rôle de dirigeant, c’est d’aider les gens à s’épanouir et à prendre des initiatives.”

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Beaucoup de projets sont ainsi nés de discussions entre salariés à la machine à café, comme la création d’un accélérateur de start-up ou l’ouverture de nouvelles filiales à Lyon, Paris… et en Australie ! Un peu trop Bisounours ? “Forcément, il y a parfois des frictions comme partout, raconte Luc Jeanniard, qui travaille chez Sogilis depuis 2013. A chaque nouveau projet, les équipes doivent réapprendre à bosser ensemble mais finalement, elles s’autorégulent. Si quelqu’un a un comportement nuisible pour le projet, les autres le lui disent très vite.” Et pour éviter les erreurs de casting, la PME fait très attention au recrutement. Pas d’entretien formel, ce sont les salariés qui rencontrent les candidats en bossant sur un cas concret et décident ensuite s’ils ont envie de travailler au quotidien avec eux. “Ce qui freine notre croissance finalement, c’est le recrutement parce qu’on préfère prendre le temps de trouver des gens qui partagent vraiment nos valeurs”, explique Christophe Baillon.

2 - Buffer, la startup sans bureau ni horaire

Une photo publiée par Buffer (@buffer) le

Travailler où l’on veut quand on veut… Une utopie ? Non, c’est ce que fait déjà cette start-up anglo-autrichienne.

Fondé en 2011, Buffer a créé un outil permettant de programmer ses posts sur les réseaux sociaux. Aujourd’hui, la start-up emploie plus de 100 personnes. Ses particularités ? Zéro bureau, zéro opacité, zéro horaire. Chez Buffer : “Chacun vit où il le veut”, souligne Rodolphe Dutel, directeur des opérations. “La moitié de nos collaborateurs sont aux Etats-Unis, l’autre vit partout dans le reste du monde, nous sommes tous sans aucune exception en télétravail… Du dernier-arrivé au patron, il n’y a de bureau pour personne !”

Pour créer de la cohésion dans les équipes et avoir des temps de travail en face-à-face, les membres de Buffer se retrouvent tous les six mois pendant une semaine. Hawaï, Berlin ou encore l’Islande… De jolies destinations pour ces working holidays, intégralement payées par l’entreprise pour le salarié et sa famille.

Avec le décalage horaire et l’absence de locaux, “impossible de badger et donc de contrôler le temps de travail”, plaisante le directeur des opérations. “On s’organise avec des feuilles de route. Chacun a des objectifs et des missions à plus ou moins long terme. Nous faisons des points de vérification de l’avancée des projets régulièrement. La flexibilité des horaires demande d’avoir à la fois confiance en chacun des collaborateurs mais aussi d’être totalement structuré dans les objectifs”, souligne Rodolphe Dutel. Pour rejoindre Buffer, ce n’est d’ailleurs pas une mince affaire. Le recrutement y est très sélectif et un candidat sur trois est remercié après sa période d’essai de six semaines.

Chez Buffer, rien n’est secret, même pas les mails des collègues auxquels les salariés ont accès. La start-up revendique une transparence totale. Sur son site Internet, on peut retrouver son chiffre d’affaires, le salaire de chaque salarié, le nombre de clients… Mais aussi les avancées technologiques que Buffer décide de partager avec le plus grand nombre. “Etre transparent, c’est aussi être équitable. Chez Buffer, le salaire est régi par des critères clairs (fonction, expérience, ancienneté, lieu de résidence)”, fait-on savoir.

3 - Décathlon, priorité à la promotion interne

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En seize ans, Nicolas Cabaret a eu sept professions très différentes. Plus surprenant encore, il n’a jamais quitté l’entreprise qu’il a rejointe directement après ses études.

Aujourd’hui, Nicolas Cabaret est directeur des ressources humaines de Decathlon France. Mais avant d’occuper ce poste, le quadra a voyagé dans l’entreprise : “Après un master en management du sport, je suis entré en tant que chef de rayon chez Decathlon à Brest. Après, j’ai pas mal bougé aussi bien dans l’entreprise que dans le pays ! J’ai été directeur de magasin, puis responsable communication et marchandiseur de la marque de vélo Btwin, responsable des RH pour la région Ouest, et directeur régional dans le Sud.”

Un parcours insolite ? Pas chez Decathlon ! Tous les postes, que ce soit dans les magasins ou dans les marques du groupe (sauf les postes techniques), sont issus de la promotion interne. “Lors du recrutement, on recherche des personnalités en adéquation avec les valeurs de l’entreprise plus que des diplômes. Des passionnés de sport, altruistes et qui ont l’esprit d’entreprise !” Et si l’alchimie se fait, les jeunes recrues peuvent prendre du galon très vite.

“En moyenne, un chef de rayon, le poste le plus bas chez les cadres, peut devenir directeur de magasin en moins de cinq ans”, confie le DRH. Cette progression rapide dans l’entreprise est due à une politique de responsabilisation à tous les échelons : “Que l’on soit en CDI, CDD, à temps partiel ou en stage, notre but est de responsabiliser au maximum nos équipiers pour valoriser leur travail.” 38 % des responsables de rayon ont d’ailleurs commencé en stage ou en job étudiant.

Chaque nouveau collaborateur est formé et suivi tout au long de sa carrière. Tous les mois et demi, il rencontre l’un de ses supérieurs. Une façon de connaître les aspirations de chacun des salariés car les possibilités de carrière et de mobilité sont nombreuses : “Pour un jeune, rejoindre Decathlon aujourd’hui, c’est entrer dans un groupe international implanté dans 25 pays avec plus de 300 métiers qui lui seront accessibles lors de sa carrière”, rappelle Nicolas Cabaret.

4 - Seed-Up, mi-coloc mi-startup

Les poules dans le jardin, la table de ping-pong, les chaises longues, le barbecue et le grand salon convivial parquet au sol… Rien ne fait penser que cette grande maison de banlieue parisienne abrite dix jeunes passionnés de technologie et leur startup.

Et pourtant, c’est ici que s’est installé Seed-Up, la première hacker house lancée en France par Paul Poupet et Benjamin Poilvé en novembre 2015. La start-up regroupe quatre projets technologiques qu’elle développe en même temps. Leur spécificité ? Les dix codeurs, designers et business développeurs vivent sur leur lieu de travail… Et travaillent sur leur lieu de vie ! Un nouveau modèle d’organisation du travail tout droit venu des Etats-Unis. Après une mauvaise expérience dans la banque, Paul Poupet a lancé Seed-Up, une sorte d’hackathon permanent. “Il fallait toujours demander des autorisations pour mettre en place une innovation. Tout ça par mail, avec dix personnes en copie !” se souvient-il.

Le jeune homme de 24 ans a voulu rompre avec cette hiérarchie pesante : “Chaque personne que nous avons recrutée excelle dans son domaine d’expertise et donne son avis. On discute chaque décision, rien ne s’impose”. Pour lui, cette responsabilisation de chacun permet une liberté d’innovation et une meilleure implication des salariés de Seed-Up. “Et le fait d’habiter ensemble change tout !”s’enthousiasme-t-il. “Nous sommes plus que des collègues, une réelle amitié s’est développée”, rigole Paul Poupet en évoquant les soirées dans le jardin ou dans le salon rempli de coussins à regarder des films.

Les salariés et stagiaires qui ont entre 19 et 27 ans sont logés, nourris et blanchis, en plus d’un vrai salaire. Les habitants de la grande colocation passent 30 % de leur temps sur des projets externes réalisés pour d’autres entreprises. De quoi faire tourner la maison. Les 70 % restants sont consacrés aux quatre projets internes (Be the Sound, service de synchronisation et partage de musiques ; Hawker, application qui donne voix aux articles de journaux ; Elo, un jeu vidéo éducatif et Carter). Le nombre de personnes allouées à un projet se fait en fonction de son évolution et des centres d’intérêt de chacun. “Les projets ne sont pas en compétition. Comme ça, personne n’a intérêt à avantager un projet plutôt qu’un autre”, explique le cofondateur. Et cela permet aussi de ne pas s’ennuyer.

Seed-Up fait un chiffre d’affaires de 200.000 euros et la start-up a déjà gagné plusieurs prix. Mais Paul Poupet ne veut pas recruter plus de 12 personnes dans la maison : “Au-dessus, on serait trop gros et on aurait besoin d’une hiérarchie et de process. On pense plutôt répliquer le modèle avec de nouvelles maisons.” Et de nouveaux projets.

Clémence Boyer, Nolwenn Mousset et Théa Ollivier

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