Des enfants portant un bracelet d'identificaton dans un camp pour migrants à l'ancien aéroport d'Athènes le 13 juin 2016

Le plan d'hébergement d'Emmanuelle Cosse pourrait notamment aider à loger chez des particuliers des femmes et des enfants. Image d'illustration.

afp.com/LOUISA GOULIAMAKI

Accueillir 1000 réfugiés supplémentaires. C'est le but de l'appel à projets de la ministre du Logement Emmanuel Cosse sur l'hébergement citoyen des migrants. D'ici le mois d'octobre (dernier dépôt des candidatures en septembre), il devrait permettre à des personnes migrantes d'être accueillies chez des particuliers pour une durée de trois mois minimum.

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L'Etat va fournir 1500 euros aux associations chargées de la mise en relation. Dans un communiqué, la ministre révèle quelques conditions: "Cet appel à projets concerne des personnes majeures, volontaires, ayant obtenu le statut de réfugié. Elles seront logées à titre gratuit, sur tout le territoire national et dans des logements comportant au moins une chambre privative. Une convention devra être signée entre le réfugié, le ménage d'accueil et l'association qui les accompagne."

Elle poursuit en insistant sur l'encadrement, avec un "suivi social des personnes hébergées", une veille accrue sur "les conditions matérielles d'hébergement" et une "préparation à la rencontre" pour les personnes migrantes.

Cohabiter, un dispositif lourd

Malgré ces précautions, l'annonce fait tiquer Marion, présidente de l'association Kali qui vient en aide aux femmes migrantes. La jeune femme, contactée par L'Express, y voit une stratégie électoraliste.

"Pour moi, c'est un pied de nez à Hidalgo qui est dans l'embarras parce qu'on voit bien que les rafles (sic) de migrants s'additionnent à Paris, alors que ce n'est pas du tout ce qu'elle avait prévu... Je trouve ça très bien que des gens s'intéressent au projet d'Emmanuelle Cosse, mais je me demande si elle a réfléchi à combien l'hébergement est un processus lourd. Nous avions par exemple mis en place un système de douche chez les particuliers pour les femmes migrantes, mais la cohabitation, c'est encore autre chose."

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Cette militante redoute notamment des accrochages culturels, en termes de ponctualité, d'hygiène voire de sociabilité, "comme le fait de se regarder dans les yeux" par exemple.

L'encadrement, la clé de la réussite?

L'hébergement citoyen des migrants a pourtant déjà fait ses preuves en France. Le concept a été mis en place et médiatisé par le programme Calm de l'association Singa, rebaptisé le "Airbnb des réfugiés". L'organisation est connue pour son important travail de suivi et d'encadrement. "Dans ce cas-là d'accord, explique Marion, c'est un peu le même fonctionnement que l'intérim, il y a une instance qui régule."

Clémence, jeune Montreuilloise dont les parents ont accueilli Toufik, un migrant afghan de 28 ans, se souvient que tout s'est bien passé. Contactée par L'Express, elle raconte:

"Singa était là et nous répétait qu'au moindre souci signalé par nous ou Toufik, ils pouvaient lui trouver un autre logement. Il était parti pour rester trois mois, et finalement, il est resté six. Il s'est même occupé de ma petite soeur un jour où elle était malade! Ça peut super bien fonctionner! Ce qui est déterminant, c'est le rôle que ces assos vont jouer..."

Impossible d'avancer un chiffre sur le nombre de volontaires que devrait mobiliser le plan Cosse. Nathanaël Molle, à l'origine du projet Calm, avait déclaré aux Echos avoir reçu "1100 propositions en quelques jours" après la diffusion de la photo du petit Aylan en septembre 2015.

Sortir du schéma "tu as besoin, je te donne"

Marion, de l'association Kali, reconnaît que l'encadrement devrait pouvoir déjouer beaucoup de problèmes. Elle appelle tout de même à ne pas oublier la racine du problème."Si ces migrants ne trouvaient pas d'obstacles à devenir demandeurs d'asile, ils pourraient avoir un logement! Pour l'hébergement citoyen, il faut surtout leur faire sentir que vous n'attendez pas de contrepartie, comme le ménage ou autre. Les faire sortir du schéma 'tu as besoin, je te donne'!"

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