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La Niña : l'autre phénomène météo scruté par les marchés

¤ La « phase négative » d'El Niño a plus d'une chance sur deux d'émerger. ¤ Elle a le pouvoir d'exacerber la volatilité des cours des matières premières.

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Par Muryel Jacque

Publié le 17 août 2016 à 01:01

Du Brésil à la Malaisie, les producteurs de café ou d'huile de palme se remettent à peine d'El Niño qu'un autre phénomène climatique menace leurs cultures. La Niña, qui refroidit les eaux à la surface de l'océan dans le Pacifique équatorial, a, comme son « opposé », le pouvoir de perturber la météo dans de nombreuses régions du monde. Il peut ainsi multiplier les tempêtes tropicales et les ouragans se formant dans l'Atlantique, provoquer des inondations en Afrique australe, en Asie du Sud-Est et en Australie, tandis qu'il assèche l'Afrique de l'Est, la Californie ou le sud du Brésil.

La Niña pourrait se former dès ce mois-ci et jusqu'en octobre, a fait savoir l'Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique (Noaa) jeudi dernier. Ce service de météorologie, particulièrement à la pointe sur le sujet, estime ses chances entre 55 et 60 %. Pour l'heure, l'événement, s'il se concrétise, s'annonce « faible », assurent ses experts. Mais les prévisions restent délicates : au printemps, ces derniers avaient prévu une arrivée plus précoce. Si La Niña se développe, « il devrait connaître un pic vers la fin de l'année 2016, puis décliner au début de 2017 », précise, de son côté, le service météo des Nations unies.

Société Générale rappelle que, entre mars et septembre, l'évolution de la météo est particulièrement cruciale pour la production agricole mondiale et pour les prix, puisqu'il s'agit de la saison clef pour les semis et le développement de nombreuses cultures dans l'hémisphère Nord.

Les agriculteurs attendent

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D'ores et déjà, l'éventualité du phénomène La Niña influe sur les comportements des producteurs tout autour du globe. En Australie, Reuters a rapporté récemment que les agriculteurs attendaient pour vendre leurs stocks de blé, préférant ne pas s'engager dans des transactions sur des ventes futures, dans l'idée que La Niña, en affectant la production, pourrait faire monter des prix au plus bas depuis dix ans (à Chicago). « Il y a un tas de blé dans le monde. Nous avons besoin d'un désastre quelque part pour que les prix dépassent les coûts de production », lâche l'un d'eux. En Colombie, après la sécheresse provoquée par El Niño, des planteurs de café redoutent de perdre jusqu'à un tiers de leur production à cause des pluies de fin d'année. Ils se souviennent qu'en 2012, lors de la dernière grosse manifestation de La Niña, la récolte avait chuté au plus bas depuis dix ans.

Les Etats-Unis et le Brésil en première ligne

Chez BMI Research, les analystes préviennent que « La Niña pourrait affecter la météo dans deux des plus grandes régions nourricières de la planète, les Etats-Unis et le Brésil, créant un risque non négligeable de baisse de la production de maïs, de soja, de blé, de sucre, de coton et de café. » A l'inverse, il pourrait offrir une récolte de cacao record en Côte d'Ivoire.

Mais le phénomène a surtout le pouvoir d'exacerber la volatilité des cours des matières premières. « Les Niñas passées ont secoué les marchés agricoles, faisant valdinguer les prix des cultures, pointe Erik Norland, senior économiste chez CME Group. Les cours finissaient par chuter dans un contexte de volatilité exceptionnellement élevée », poursuit-il, stipulant toutefois que les réactions ont été très variées au cours des huit derniers épisodes qu'il a étudiés.

Parmi les grands négociants de produits agricoles, on se veut rassurant. Le géant asiatique Olam balaie tout impact sur l'approvisionnement des différentes régions du monde qu'il fournit, notamment en huile de palme... dont le prix a grimpé au plus haut depuis deux ans après l'un des plus forts El Niño jamais enregistrés.

« Si les matières premières sont les plus exposées à un risque de conditions météo défavorables, l'activité minière - charbon, minerai de fer et étain en particulier - pourrait également être gênée par La Niña dans les trimestres à venir », reprend BMI Research. En 2010 et 2011, les prix du charbon avaient fortement progressé après les inondations qui avaient frappé l'Indonésie et l'Australie, deux des plus gros producteurs.

Muryel Jacque

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