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Pétition

Une «licence IV» pour les lieux de culte ?

Au-delà de la question du burkini, l'écrivain David Emton lance une pétition adressée à Bernard Cazeneuve pour "obliger les religieux à signer une charte républicaine".
par David Emton, écrivain
publié le 1er septembre 2016 à 15h59

N’en déplaise aux partisans de la raison, la controverse au sujet du Burkini ne s’éteindra pas avec la récente décision du Conseil d’Etat car elle est, à l’évidence, un prétexte à l’affrontement entre deux franges enflammées de l’opinion. A ceux qui voient un «attentat culturel» dans le burkini, on pourra toujours conseiller un bref séjour à Bagdad, afin de préciser leur vocabulaire… A ceux qui soutiennent que les interdictions locales du burkini annoncent l’apartheid, un séjour parmi les malheureux Coptes serait également vivement conseillé. Mais ne nous leurrons pas: l’appel au bon sens sera insuffisant dans les temps qui viennent, précisément parce que le burkini n’est qu’un prétexte.

Pour ses détracteurs, c’est un nouvel épisode de l’islamisation du pays, du recul du féminisme, du christianisme, ou de bien d’autres choses encore; leur angoisse se nourrit de ce qu’ils ont eux-mêmes renoncé au prosélytisme et aux familles nombreuses – à croire et à croître.

Les défenseurs du Burkini, eux, forment un camp largement aussi hétéroclite, où les libéraux comme les salafistes constatent les dérapages: en l’absence de loi, les arrêtés municipaux frappent ici une femme en paréo, là une autre portant un simple voile. Il n’est pas nécessaire d’être aveugle aux dérives de l’islam pour déplorer que la République se retrouve ainsi déboussolée. Et dans cette atmosphère belliqueuse, toute sera bientôt prétexte à la confrontation: les terrasses après les plages, les écoles de nouveau, les rues -et les restaurants déjà… En attendant les pistes de ski ?

Alors, puisque la raison ne ramènera pas la confiance à court terme, le mieux est de se comporter en adultes rationnels: en signant un contrat. Fixer des règles claires, c’est-à-dire un cadre strict dans lequel la liberté de chacun serait indiscutée, voilà qui pourrait sinon désamorcer l’animosité, du moins diminuer les soupçons permanents et donc les tensions. Le gouvernement consulte, ces jours-ci. Suggérons-lui de commencer par l’engagement que devraient prendre tous les prédicateurs du pays de signer, de respecter et d’afficher à leurs portes une charte religieuse.

Le climat étant ce qu’il est, on ne proposera pas un décalogue (trop hébraïque), ni un texte en trois points (trop trinitaire) ni même en cinq (nombre des piliers de l’islam). Quatre points devraient suffire, que voici:

1. Nous proclamons que les seules lois qui s’appliquent en France sont celles de la République.

2. Nous condamnons toute incitation à la violence et au terrorisme.

3. Nous reconnaissons aux femmes exactement les mêmes droits et devoirs que les hommes.

4. Nous admettons que tout individu a le droit absolu de changer de religion ou de ne point en avoir.

Une telle proclamation, aux dimensions assez réglementées pour être inévitable à l’entrée des églises, mosquées, pagodes, synagogues et autres, contribuerait certainement plus que toutes les injonctions rituelles au «vivre-ensemble» – et c’est d’ailleurs là le but de tout contrat. Naïveté ? Certes pas : le défaut d’affichage ou de respect de ce contrat entre l’Etat et les cultes pourrait être sanctionné par une amende, la fermeture des lieux ou l’expulsion du contrevenant s’il est étranger. Le Contrat Social est un éternel chantier: il est désormais nécessaire d’en préciser le volet religieux.

facebook.com/davidemton @davidemton

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