Publicité

Ce qu'il faut retenir du coup de frais estival sur les start-up françaises

¤ Quatre jeunes pousses emblématiques de la French Tech ont déposé le bilan ou liquidé leur activité durant l'été. ¤ Des situations chaque fois différentes, mais qui témoignent d'un coup de vis sur les plus consommatrices de liquidités.

ECH22269091_1.jpg

Par Nicolas Rauline, Guillaume Bregeras

Publié le 5 sept. 2016 à 01:01

Redressements judiciaires, liquidations... L'été a pris des airs de retour de la bulle, pour les start-up. Le belge Take Eat Easy, l'un des acteurs les plus en vue du marché de la livraison de repas, a mis la clef sous la porte. Plusieurs emblèmes de la French Tech, comme Save ou ChicTypes, ont été placés en redressement judiciaire. Et d'autres ont fait part de leurs erreurs et de leurs difficultés, comme Xavier Zeitoun, le patron de Zenchef, qui a publié un billet de blog intitulé « 12 mois ordinaires de la (vraie) vie d'une start-up ».

Le dynamisme est-il brisé ? Ou n'est-ce que le cours normal d'un secteur où le taux de défaillance est de 2,3 % (selon une étude de Coface), les sociétés profitant de l'été pour communiquer sur leurs difficultés, espérant un écho moindre ?... « Le climat s'est rafraîchi depuis un an », concède Jean-David Chamboredon, président du fonds Isai et coprésident de France Digitale.

Un courant d'air venu des Etats-Unis

Un courant d'air qui vient directement des Etats-Unis, selon lui, où le niveau de sélection des projets s'est nettement relevé. Et où depuis les IPO timorées de pépites comme Square ont laissé des traces : « Ceux qui avaient investi juste avant l'introduction en Bourse n'ont pas gagné d'argent et cela a entraîné une baisse des montants dans les tours de table suivants. » D'autres exemples outre-Atlantique continuent d'alimenter cette tension sur les refinancements. Washio, autoproclamé « Uber du pressing », vient tout juste de jeter l'éponge après avoir levé 16 millions de dollars. Tout comme Kitchensurfing, qui, malgré un modèle rentable, n'a pas su atteindre le volume nécessaire pour faire face à la concurrence et a fermé son service de livraison de repas préparés en avril dernier. La question qui brûle les lèvres est à quel moment doit-on arrêter d'alimenter une jeune pousse dont le modèle consume des liquidités en grande quantité pour s'établir sur son marché. Pour Marc Fournier, managing partner chez Serena Capital, le point d'équilibre est devenu complexe à établir : « Dans les secteurs très concurrentiels à faibles marges, comme la livraison, il faut rapidement atteindre des volumes conséquents au risque de périr. Le cap des 100 millions d'euros de chiffre d'affaires est difficile mais indispensable à passer. » C'est une forme de retour à la raison qui traverse l'ensemble du secteur, à l'image d'Uber, qui vient de quitter la Chine après avoir perdu 1,2 milliard de dollars depuis le début de l'année. « C'est la même logique ici, les entreprises veulent réduire leurs pertes quitte à repartir plus petites, mais plus agiles » , explique Jean-David Chamboredon.

Publicité

Des cas très distincts

Pour Antoine Baschiera, cofondateur de l'agence de notation de start-up Early Metrics, il faut distinguer le cas Take Eat Easy des redressements judiciaires en France. « Le modèle de la livraison de repas est moins sain : le sujet du paiement des coursiers a explosé, c'est la première fois que le grand public voit les aspects négatifs de l'économie collaborative. Et le secteur est entré dans une course aux armements, il fallait s'attendre à de la casse. » Juste après la liquidation de Take Eat Easy, son concurrent Deliveroo a d'ailleurs annoncé une levée de 275 millions de dollars. Les start-up françaises en difficulté ont, elles, davantage de points communs. Ce sont des sociétés qui ont connu une forte croissance, puis réalisé une levée de fonds importante, avant de connaître des difficultés. « On avait un mauvais contrôle de nos achats, la finance était approximative, notre gestion de stock était bringuebalante, les vols en corners ont pris une ampleur considérable, l'Allemagne et l'Espagne ont été un échec... », avouait le jeune patron du réparateur de smartphone Save, Damien Morin, dans un billet posté sur Medium cet été. « Clairement, ce qui a posé problème, c'est la gestion de l'hypercroissance, souligne Antoine Baschiera. Ces sociétés n'ont pas su mettre en place les outils adaptés. » Une prise de recul que salue Marc Fournier : « Il y a de très bons entrepreneurs dans ces projets qui ont rencontré des difficultés cet été. Ils n'ont pas de honte à avoir, ils ont fait des paris audacieux dans des domaines très périlleux. » Un constat positif que certains veulent ériger en exemple d'un écosystème qui grandit. « Déjà, on en parle davantage aujourd'hui car ce sont des sociétés visibles, matures, qui n'auraient même pas existé il y a quelques années, affirme Jean de La Rochebrochard, associé chez Kima Ventures. C'est le signe d'un écosystème riche, qui prend des risques. Et cela permet de parler d'échec en France, ce que l'on ne fait pas assez. »

Guillaume Bregeras et N. Ra.

MicrosoftTeams-image.png

Nouveau : découvrez nos offres Premium !

Vos responsabilités exigent une attention fine aux événements et rapports de force qui régissent notre monde. Vous avez besoin d’anticiper les grandes tendances pour reconnaitre, au bon moment, les opportunités à saisir et les risques à prévenir.C’est précisément la promesse de nos offres PREMIUM : vous fournir des analyses exclusives et des outils de veille sectorielle pour prendre des décisions éclairées, identifier les signaux faibles et appuyer vos partis pris. N'attendez plus, les décisions les plus déterminantes pour vos succès 2024 se prennent maintenant !
Je découvre les offres
Publicité