Une des plus importantes organisations musulmanes d'Allemagne a dénoncé jeudi une hausse sans précédent des agressions islamophobes dans le pays, s'inquiétant de voir le racisme s'ancrer dans la société.

« Les attaques contre les mosquées se sont multipliées entre 2014 et 2015. Le nombre d'attaques contre les centres de réfugiés grimpe dans des proportions inédites. Même chose pour les agressions physiques et verbales contre les musulmans dans la rue. Sans parler des délits haineux sur l'internet », a énuméré le président du Conseil central des musulmans d'Allemagne (ZMD), Ayman Mazyek, dans le quotidien Die Welt.

Pour le patron du ZMD, attribuer cette tendance aux inquiétudes suscitées par la politique migratoire de la chancelière Angela Merkel « méconnaît l'ancrage profond du ressentiment raciste » dans la société allemande.

Mais pour lui, le succès croissant de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD), formation de droite populiste qui vient d'entrer dans un neuvième parlement régional sur les 16 que compte le pays, contribue encore à « rendre le racisme tolérable en société ».

Le récent débat sur le voile intégral, que le ministre conservateur de l'Intérieur prévoit d'interdire partiellement, « ne sert finalement que l'AfD », estime Ayman Mazyek, pour qui « les extrémistes musulmans comme non musulmans soufflent sur les braises pour diviser la société ».

Comme Angela Merkel l'avait fait mercredi face aux députés, il a mis en garde contre la tentation des grands partis de surenchérir sur les propositions de l'AfD, les appelant plutôt à mettre en avant « les nombreux exemples d'intégration réussie » et les « forces » de l'Allemagne, dont l'économie « se porte bien ».

Aucune statistique officielle n'existe concernant les violences islamophobes, mais selon le rapport annuel des services de renseignement intérieur du pays, les violences xénophobes ont fortement augmenté ces dernières années, passant de 473 faits enregistrés en 2013 à 512 en 214 puis 918 en 2015.

Les blessures corporelles, en particulier, sont passées de 464 en 2014 à 756 l'an dernier alors que les incendies ont explosé, visant particulièrement les centres de réfugiés, passant de 16 en 2014 à 83 en 2015, année qui a vu l'Allemagne accueillir plus d'un million de demandeurs d'asile.

Espagne: agression d'une femme enceinte portant le niqab

BARCELONE - Deux ultras de l'Espanyol Barcelone, club de soccer de première division espagnole, ont été arrêtés pour avoir agressé une femme enceinte de huit mois portant un niqab, a-t-on appris jeudi auprès de la police municipale.

L'agression s'est produite le 29 août, alors que la femme se promenait dans le centre de Barcelone accompagnée de son mari et de leurs deux enfants et a été prise à partie par les deux hommes qui ont critiqué sa tenue, un voile intégral ne laissant apparaître que les yeux, selon la police.

Le mari de la femme a réagi aux provocations et a été agressé par les deux individus, liés aux Brigadas Blanquiazules (Brigades Bleu et blanc), groupe de supporteurs ultras d'extrême droite de l'Espanyol, interdits d'entrée dans le stade depuis 2010.

La femme, tentant de s'interposer, a reçu un coup de pied dans le ventre. Des agents de la police municipale ayant vu la scène sont alors intervenus et ont arrêté les agresseurs, précise la police municipale dans un communiqué.

Elle a été transportée à l'hôpital, où des examens gynécologiques ont confirmé l'absence de lésions pour la mère et le foetus, ajoutent les forces de l'ordre.

Les deux ultras sont accusés de « délit de haine », « discrimination » et « délit de blessures ».

Pour Mounir Benjelloun, président de la Fédération espagnole d'entités religieuses islamiques (FEERI), de tels actes arrivent « tous les jours en Espagne ».

Selon un rapport publié en avril par la plateforme citoyenne contre l'islamophobie, les actes islamophobes ont été multipliés par dix en un an, passant de 48 en 2014 à 534 en 2015.

Selon les données du gouvernement, les agressions à motif religieux ou raciste sur cette période sont passées de 538 à 575.

Peu après les attentats djihadistes qui ont frappé Bruxelles le 22 mars, des militants d'une association néonazie de Madrid ont lancé des fumigènes devant une mosquée de la capitale espagnole, et quelques jours plus tard, des croix gammées ont été peintes sur la porte d'une autre mosquée dans un village proche de Madrid.

Norvège: une coiffeuse jugée pour avoir refusé une musulmane voilée

OSLO - Une coiffeuse a comparu jeudi en Norvège pour avoir éconduit une musulmane portant le hijab, dans la première affaire sur le port du voile à être jugée dans le pays.

Merete Hodne encourt en principe jusqu'à six mois de prison pour avoir refusé Malika Bayan dans son salon de Bryne, village du sud-ouest de la Norvège, en octobre, affirmant selon l'acte d'accusation qu'« elle devait se trouver un autre endroit parce qu'elle ne prenait pas (les personnes) comme elle ».

Pour sa défense, la coiffeuse de 47 ans a expliqué concevoir le hijab comme un emblème politique d'une idéologie dont elle dit avoir peur, plutôt qu'un simple effet religieux.

« J'y vois un symbole totalitaire. Quand je vois un hijab, je ne pense pas à la religion, mais à des idéologies et des régimes totalitaires », a-t-elle expliqué devant les juges, selon le journal Verdens Gang (VG). « Un hijab, ce n'est pas religieux, mais politique », a-t-elle ajouté.

Présentée dans les médias norvégiens comme une ancienne militante de mouvements islamophobes tels que Pegida, Mme Hodne avait estimé dans un récent entretien avec la chaîne TV2 que le voile était un symbole de « l'idéologie islamique » - « le Mal » selon elle - comme « la croix gammée est celui du nazisme ».

Elle affirmait également qu'accepter une femme voilée l'aurait obligée à refuser des clients masculins à qui la cliente n'aurait pu selon elle montrer ses cheveux.

Après l'incident, elle avait refusé d'acquitter une amende de 8000 couronnes (environ 1265 $ CAN), et l'affaire a ainsi atterri devant le tribunal de Jaeren.

Tout en admettant qu'elle aurait pu éconduire Mme Bayan de façon plus courtoise, Mme Hodne a rejeté le chef de discrimination religieuse.

« J'ai connu le racisme et la discrimination avant cela, des petits regards et des trucs du genre, mais jamais jetés aussi clairement au visage », a témoigné jeudi Mme Bayan, citée par l'agence NTB.

« Cela m'a fait mal à plusieurs égards. Je me suis sentie petite, stupide, pas intégrée, endolorie. Je ne pouvais pas comprendre pourquoi un foulard sur la tête pouvait provoquer cela », a-t-elle dit.

La police a demandé à ce que l'amende soit portée à 9600 couronnes (1512 $) ou, à défaut de paiement, que la coiffeuse soit condamnée à 19 jours de prison.

Le verdict est attendu lundi.