Le milieu Messin Renaud Cohade avec le nouveau maillot du club, le 27 août contre Angers.

Le milieu Messin Renaud Cohade avec le nouveau maillot du club, le 27 août contre Angers.

AFP PHOTO / JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN

C'est l'affaire d'un contrat de sponsoring qui suscite quelques interrogations jusqu'au sommet de la Ligue. Cette saison, les joueurs du FC Metz arborent un maillot floqué du message promotionnel "Tchad, Oasis du Sahel", invitant le public à se rendre dans un pays pourtant peu réputé pour son tourisme de masse.

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Officiellement, ce partenariat s'inscrit "dans le cadre du lancement d'une chaîne de télé au Tchad." Le groupe média africain LC2 "a convenu d'assurer la promotion du pays à l'étranger", selon le président Bernard Serin, interrogé par le Républicain Lorrain.

Risque terroriste

Lors de l'annonce du partenariat, le 27 août, une large délégation africaine s'était rendue au siège du club lorrain. Autour du président Serin, deux ministres tchadiens prenaient la pose: celui des sports, mais aussi celui des mines et de la géologie. Intrigant, d'autant que le montant du contrat serait compris entre deux et 12 millions d'euros selon Le Monde. "La Direction nationale de contrôle de gestion (DNCG) a demandé des précisions au FC Metz concernant ce partenariat", fait savoir à L'Express la Ligue de football professionnel (LFP).

Problème, en arborant ce nouveau sponsor maillot, le FC Metz fait la promotion d'un Etat classé orange sur la liste du ministère des Affaires étrangères. Le Quai d'Orsay déconseille en effet de se rendre au Tchad "sauf pour raison impérative", le pays ayant été frappé à de nombreuses reprises par des attentats terroristes. Interrogé, le ministère estime toutefois qu'il "n'a pas à se prononcer sur ce contrat privé. Notre liste n'a pas valeur de loi ou de règlement. Les Français sont libres de voyager où ils veulent. Le Tchad n'est pas un pays fermé et il n'est pas non plus sous le coup de sanctions internationales". La question du terrorisme et de la présence de Boko Haram sur les rives du Lac Tchad reste tout de même une réalité à prendre en compte.

Carte des pays à risque en Afrique établie par le ministère des Affaires étrangères

Carte des pays à risque en Afrique établie par le ministère des Affaires étrangères

© / Ministère de Affaires étrangères

Une incohérence commerciale

"Le Tchad est un très grand pays, avec des zones très différentes, nuance Philippe Hugon, directeur de recherche à l'IRIS en charge de l'Afrique. Il faut vraiment distinguer le risque réel du risque perçu. Les occidentaux confondent les zones dangereuses et la situation dans l'ensemble du pays". Une autre source à N'Djaména, la capitale tchadienne, qui souhaite garder l'anonymat, pointe toutefois l'incohérence du partenariat.

"Le pays n'est pas dangereux, même s'il y a des zones à éviter à l'Ouest. Mais il y a surtout un manque de communication entre les différentes régions du pays, que ce soit par route ou par avion". Dans la région du Sahel, aucun pays ne fait l'objet d'un tourisme de masse. "On y trouve plutôt un tourisme sportif pour randonneurs en quête essentiellement de sites naturels magnifiques", confirme Philippe Hugon.

Créer d'abord un championnat tchadien

Notre source à N'Djaména revient tout de même sur le sentiment des locaux concernant ce partenariat. "Ici, les gens trouvent ça ahurissant. La visibilité du pays passe par le sport, oui. Mais les Tchadiens pensent qu'il faudrait d'abord développer un réel championnat national, qui n'existe pas du fait de problèmes financiers importants. Au lieu d'investir à Metz, le gouvernement devrait le faire ici". Le futur Japhet N'Doram aurait alors une chance d'éclore.

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