Pénurie

Au Venezuela, l'armée chargée de remplir les rayons des supermarchés

Un général chargé des haricots, un autre du papier toilette ou des produits laitiers : des hauts gradés reçoivent pour mission de résoudre la pénurie chronique de produits de base.
par François-Xavier Gomez
publié le 11 septembre 2016 à 17h18

Pour parer à une situation de pénurie catastrophique qui touche 80% des biens de première nécessité (aliments, hygiène, médicaments), le président vénézuélien Nicolas Maduro a décidé de faire appel à l'armée. En juillet, il nommait le ministre de l'Intérieur, Vladimir Padrino Lopez, à la tête d'une «Grande mission approvisionnement souverain». Le ministre a depuis désigné 18 hauts gradés pour s'occuper d'autant de filières défaillantes. Dans ce quasi-ministère, quinze postes concernent l'alimentation : l'huile, le riz, la volaille, la viande de bœuf, la viande de porc, le sucre, les haricots noirs, le maïs jaune, le café, la farine de maïs, les produits laitiers, la margarine, le blé, le poisson et le soja. Trois militaires sont en outre chargés des produits pharmaceutiques, des détergents et déodorants, et du papier toilette, tampons hygiéniques et couches jetables. Une seule femme figure dans la liste : la vice-amirale Luisa María Lozada Fergusson, chargée du poisson. Ne sont pas concernés les fruits, les légumes et les féculents.

«Général Café» et «général Volaille»

Les réseaux sociaux n'ont pas manqué d'ironiser sur le «général Café» ou le «général Volaille». Confronté à un mécontentement grandissant, qui s'est traduit par des pillages de magasins et d'entrepôts ces derniers mois, le pouvoir socialiste pointe du doigt la «guerre économique» que mènerait contre lui le secteur privé, avec l'aide des Etats-Unis. Les pénuries viendraient du refus des commerçants de mettre en vente leurs marchandises, afin de provoquer le chaos et de spéculer au marché noir. Les commerçants s'en défendent et soulignent que, faute de dollars, dont le change est strictement contrôlé par le gouvernement, ils ne peuvent se procurer à l'étranger matières premières et pièces de rechange. La véritable raison semble davantage tenir au manque de devises consécutif à la chute des revenus pétroliers, dans un pays qui importe plus de 80% de ce qu'il consomme.

Ruée en Colombie

Les précédents essais du gouvernement pour combattre les pénuries se sont soldés par des échecs : dans les magasins d’Etat qui vendent des produits de base à des prix subventionnés, les étagères sont elles aussi dégarnies, une partie de leurs marchandises étant détournée pour être revendue sur le marché parallèle. La seule mesure efficace a été la réouverture au mois d’août de la frontière avec la Colombie, qui a permis à des centaines de milliers de Vénézuéliens de s’approvisionner dans le pays voisin.

Très contesté par l'opposition qui tente de forcer l'organisation d'un référendum pour le révoquer, Nicolas Maduro, élu en 2013 pour succéder au défunt Hugo Chavez, confie de plus en plus de pouvoir aux militaires. Désormais, tous les ports du pays sont entre les mains de généraux.

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