Jean-Pierre Corniou : « Dans 15 ans, on n’entendra plus parler du Diesel en ville »
LE CERCLE/INTERVIEW - Un an après l’affaire des moteurs truqués de Volkswagen, seul un tiers des consommateurs français achète de la technologie Diesel. Pour Jean-Pierre Corniou, associé chez Sia Partners et spécialiste en mobilité, la technologie Diesel devrait peu à peu laisser sa place à l’électrique.
Par Kévin Badeau
L’affaire Volkswagen, qui a éclaté il y a un an, a-t-elle tué le Diesel ?
Les constructeurs n’ont plus les moyens d’équiper les voitures entrées de gamme avec une motorisation Diesel. Les autorités sont devenues plus vigilantes sur les tests antipollution depuis le scandale Volkswagen. Les pots d’échappement des véhicules Diesel rejettent des microparticules, reconnues comme étant cancérigènes, et de l’oxyde d’azote (NOx), un gaz toxique. Les filtres à particules fines et les pièges à NOx engendrent des coûts supplémentaires pour les constructeurs automobiles. Et ces surcoûts rognent sur leurs marges. Ainsi, il devient moins rentable de vendre ces véhicules à bas coûts.
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Il faut aussi reconnaître que la menace pesant sur le diesel ne date pas du « VWgate ». Le diesel n’est pas une solution globale. L’Europe est le seul continent à avoir misé de manière aussi importante sur cette technologie. Près de 40 % des 213 millions de véhicules roulent au gazole sur le Vieux Continent. Aux Etats-Unis et en Chine, les motorisations Diesel sont très peu utilisées. Au Japon, elles sont interdites.
Comment expliquer ce désamour des Français pour le Diesel ?
Depuis le scandale Volkswagen, les Français ont compris que le Diesel n’était pas si avantageux. D’abord, il est dangereux pour la santé. Les particules fines provoqueraient 42.000 morts prématurées par an en France . Ensuite, l’entretien d’un véhicule Diesel coûte cher pour un usage courant. Enfin, conscient de ces deux paramètres, le consommateur a compris que la valeur de revente de son véhicule Diesel d’occasion risquait de baisser fortement. Il s’en est donc détourné.
La France est en train de revoir sa fiscalité avantageuse sur le Diesel. Certains centres-villes restreignent la circulation aux véhicules trop polluants. A quel rythme le Diesel va-t-il décliner ?
Nous entrons dans un processus de dé-diésélisation qui va durer plusieurs années. Les véhicules de logistique urbaine et les autobus commencent à basculer vers l’électrique. A terme, il n’y aura plus de citadines roulant au gazole... Je pense que d’ici à 15 ans, on n’entendra plus parler du Diesel en ville.
Faut-il pour autant miser sur le véhicule électrique ?
Pour l’heure, il n’y a pas beaucoup de solutions alternatives. Ces véhicules sont appelés à se développer de manière vertueuse dans les pays produisant leur électricité grâces aux sources d’énergies vertes. Je pense aux pays scandinaves, en particulier. Car pour les autres, sauf la France et son parc nucléaire, l’électricité est souvent produite à partir de combustibles fossiles.
Il y a une deuxième solution : l’hydrogène, qui permet de générer de l’énergie grâce à une pile à combustible qui fabrique de l’énergie électrique et rejette de l’eau. Cela semble être une bonne alternative pour les poids lourds. Enfin, l’hybride rechargeable commence à se faire une place sur le marché automobile.
Propos recueillis par Kévin Badeau