Photo fournie par le CNRS montrant les ondulations d'un feuillets de graphène et un film conducteur souple.

Photo fournie par le CNRS montrant les ondulations d'un feuillets de graphène et un film conducteur souple.

Centre Paul Pascal/CNRS

Dans un futur proche, ce matériau servira peut-être à fabriquer vos smartphones, vos écrans d'ordinateurs, vos vêtements, voire à créer l'avion ou la voiture du futur. Son nom? L'oxyde de graphène. Si l'on savait déjà que cet élément était très rigide, on sait maintenant, grâce à une étude de Philippe Poulin, Cécile Zakri et leurs collègues du centre de recherche du CNRS Paul Pascal, qu'il est aussi très flexible.

Publicité

"L'oxyde de graphène a une rigidité, une résistance à l'étirement comparable voire même supérieure à celle de métaux comme l'acier. De façon très surprenante nous avons découvert que malgré cette rigidité extrême il peut être courbé très facilement. La force nécessaire pour le courber est presque 100 fois inférieure à ce que l'on pourrait attendre par comparaison à d'autres matériaux", indique à L'Express Philippe Poulin. L'oxyde de graphène ondule "presque comme un liquide", ajoute Cécile Zakri.

Des perspectives pour l'électronique flexible

C'est le seul matériau, à ce jour, qui présente une telle combinaison de qualités: grande rigidité et superflexibilité. Ce qui devrait permettre de l'utiliser pour renforcer des matériaux composites tout en préservant leur souplesse. "On pense notamment à une utilisation en mécanique, mais surtout en électronique puisque l'oxyde de graphène peut être rendu facilement conducteur d'électricité". De quoi imaginer de nouveaux objets légers, conducteurs électriquement et thermiquement tout en étant robustes, dans des domaines aussi variés que l'électronique, les fibres, le textile.

Les écrans dits souples ou flexibles par exemple, s'ils existent déjà depuis quelques années, pourraient être améliorés. Aujourd'hui, ils sont fabriqués avec d'autres matériaux "qui sont soit moins flexibles, soit moins solide", souligne Philippe Poulin.

"Il reste encore beaucoup à découvrir"

Mais comment expliquer qu'un matériau soit aussi solide que l'acier quand on le tire ou le compresse et à la fois aussi flexible quand on le tord? "C'est paradoxal, reconnaît Cécile Zakri. Mais il faut comprendre la composition de l'oxyde de graphène. Il est issu du graphène, un objet plan constitué d'atomes de carbone et de l'épaisseur d'un seul atome. L'oxyde de graphène est sa forme oxydée, parce qu'on y a ajouté quelques atomes d'oxygène. Si ce procédé dégrade ses propriétés en terme de résistance, il augmente sa flexibilité, et donc son utilisation".

oxyde de Graphène

En bas, les feuillets de graphène vue en microscopie électronique. En haut, un schéma qui montre leurs ondulations au repos, et l'aplatissement des ondulations quand les feuillets sont dans un liquide qui coule.

© / CNRS/université de Bordeaux

Résultat, si on tire sur l'oxyde de graphène "on va jouer sur les liaisons entre les atomes de carbone, ce qui fait que le matériau reste très solide. Mais quand on va le courber, on va jouer sur les angles. Or le fait d'introduire quelques défauts dans le graphène avec des atomes d'oxygène augmente cette possibilité de tordre les angles et de faire des flexions", ajoute Philippe Poulin.

Les deux chercheurs espèrent maintenant que leur étude, qui a nécessité trois ans de travail et qui est publiée dans la prestigieuse revue américaine PNAS, "amènera bien d'autres études". Car si le graphène et l'oxyde de graphène "sont très étudiés car très prometteurs", il reste encore beaucoup à découvrir pour l'exploiter pleinement.

Publicité