Essonne : ce feu rouge que la mairie veut reprendre aux malfrats

À Viry-Châtillon, près de la Grande Borne, où la moitié des habitants vivent sous le seuil de pauvreté, un carrefour est devenu un haut lieu du "carjacking".

Source AFP

La Grande Borne
La Grande Borne

Temps de lecture : 3 min

« T'arrête pas au feu de ma ville, mec, si tu tiens à ta vie. [...] T'arrête pas au feu, mets pas ton sac sur le siège passager, on te pèta (vole, ndlr) ton sac à main, tu subiras un arraché », chantaient en 2011 les membres du groupe Black Automatik, originaires de Grigny. À un feu rouge de Viry-Châtillon (Essonne), au fameux « carrefour du Fournil », le vol à la portière avec violence était devenu une spécialité. Depuis plus d'un an, la mairie tente de reprendre le territoire aux agresseurs.

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À chaque attaque le même stratagème. Bloqués à ce feu rouge de la départementale 445, des automobilistes, presque toujours des femmes, reçoivent une pluie de pierres lancées par des agresseurs cagoulés, souvent mineurs. « On a déjà interpellé un gamin de 12 ans », souffle une source policière. Le butin est à prendre sur le siège passager : sacs à main, portables, ordinateurs, manteaux... Puis les agresseurs disparaissent à pied à la faveur des allées tortueuses de la Grande Borne, cette zone de sécurité prioritaire (ZSP), au bord de l'autoroute A6, où près de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté.

« Tout se passe en cinq secondes. C'est hyper violent », raconte une victime, encore « très traumatisée », deux ans après son agression. Cette kinésithérapeute de 39 ans emprunte désormais un nouvel itinéraire et laisse « toujours plusieurs mètres d'écart » avec la voiture qui la précède lors d'un ralentissement, pour pouvoir se dégager en cas de nouvelle attaque. En 2013, plusieurs personnes avaient été interpellées pour une vingtaine d'agressions de ce type. Mais fin 2014, les vols se sont multipliés. « Une vingtaine d'agressions pour une quarantaine de victimes en six mois », précise Jean-Marie Vilain, le maire UDI de Viry-Châtillon.

La caméra de surveillance incendiée au cocktail Molotov

En avril 2015, la municipalité débloque alors 12 000 euros et installe une caméra de vidéosurveillance. Depuis, « plus une seule attaque sur ce carrefour », assure l'édile. Sauf qu'elles ont repris au feu rouge précédent et sur un axe voisin. Les dernières remontent à la mi-septembre. Samedi dernier, c'est la caméra elle-même du fameux carrefour qui a été ciblée, détruite à l'aide d'une fourgonnette volée, utilisée comme voiture-bélier, puis incendiée au cocktail Molotov. La scène, violente, s'est déroulée à l'heure du déjeuner, sous les yeux de nombreux passants. Juste avant, les agresseurs, très déterminés, avaient tenté de braquer un poids lourd, déjà au cocktail Molotov, mais le chauffeur avait réussi à leur échapper.

La caméra, fixée à une dizaine de mètres de hauteur sur un lampadaire, était en sursis depuis plusieurs mois. Au printemps, un camion-poubelle volé avait raté l'objectif et fini sa course dans un arbre. Une tentative de découper le candélabre à la tronçonneuse thermique avait également échoué. « Ils veulent montrer qu'ils sont chez eux, que c'est leur quartier, leur carrefour », selon M. Vilain. « C'est une guerre de territoire. La vidéo dérange leurs trafics. Dès qu'on démantèle un réseau, on a des représailles », affirme Claude Carillo, secrétaire départemental du syndicat de policiers Alliance. « On a besoin d'un renfort de 300 gradés et gardiens de la paix » en Essonne, estime-t-il.

La caméra endommagée doit être remplacée. « Au même endroit », promet le maire. « Pas question que les délinquants imaginent que l'on va baisser les bras. » Mais l'édile voit plus loin : « Il ne faut pas s'arrêter à ce carrefour. Il faut sécuriser toute la D445. » « Des aménagements, comme du barrièrage et peut-être de la vidéoprotection sur l'ensemble de l'axe », seront discutés lors d'une prochaine réunion, a indiqué la préfète de l'Essonne, Josiane Chevalier, à l'issue d'une visite mardi dans la commune.

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Commentaires (24)

  • hurlevon

    Le système incriminé par la plupart des commentateurs ? Ils n'osent le proclamer avec virulence et pourtant c'est ENORME. C'est la "Justice", oui, la justice de base, le BA. BA. Son inefficacité est sous tendues par ses logiques pernicieuses depuis des décennies. La solution n'est pas ou peu dans des budgets ou des effectifs plus importants. C'est peine perdue si on ne change pas la logique même de ce système pernicieux et indécoinçable qui est à la solde des "hommes politiques" (ces gens qui mandat après mandat "arrangent les choses").
    Le premier problème des français ce n'est pas le chômage (il en est une conséquence) c'est sa "Justice" aux mains de politiques aux "valeurs" flexibles. La solution est de rendre la supervision de la Justice au peuple, c'est à dire que celui-ci élise directement ses magistrats et notamment les Procureurs.
    La preuve que c'est bien là LA solution ? Aucun candidat aux primaires de gauche, de droite ou des extrêmes ne le propose !
    Ensuite il faudra 20 ou 30 ans pour remonter la pente, car la délinquance en banlieu s'y est enracinée, c'est devenu une culture.

  • Clairevoix

    Il est clair qu'il faudrait nettoyer les secteurs concernés avec des méthodes plus dures, y compris, dans les cas les plus irréductibles, avec le concours de l'armée (même Ségolène y avait songé, vous vous souvenez ?).

    Pourtant, à la première oreille entaillée, chacun criera à la bavure, contre un pauvre innocent qui ne pouvait être là que par hasard ! Bien entendu, ce sera le policier qui sera poursuivi, et à l'issue de l'affaire, il aura intérêt à demander une mutation pour éviter toutes représailles contre lui-même ou ses proches !

    Car plus que la violence de cette pègre aux manières mafieuses (en tout cas, au moins autant !), c'est bien notre propre inconséquence qui crée nos problèmes !

  • blédina

    Il y a vingt ans des bandes du même type sévissaient entre Saint Denis et La Courneuve sur la Nationale, de préférence en hiver à la tombée de la nuit. Il fallait attendre 4 heures pour déposer plainte au commissariat de Saint Denis tellement il y avait de femmes qui venaient d'être attaquées, dévalisées au feu rouge. Nous avions toutes les mains en sang à cause de leurs pierres utilisées pour casser les vitres de la voiture et il fallait rentrer ensuite, parfois bien loin de là sans un centime, sans l'ordinateur du travail et sans papiers.
    Le système perdure... Bravo la justice incapable, Fleury Mérogis n'est pourtant pas loin de Grigny, mais cette prison est sans doute pleine à craquer !