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Expositions

Les prodigieuses illustrations naturalistes sur vélins s'exposent au public

L'exposition s'est ouverte au Cabinet d'histoire du Jardin des Plantes, à Paris. Le reportage vidéo de Sciences et Avenir.

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L'ara rouge

Un corbeau d'Inde aux couleurs chatoyantes : il s'appelle aussi ara, le nom sous lequel nous le connaissons aujourd'hui.

© MNHN

Bien beau, ce maître corbeau sur son arbre perché ! Un corbeau d’Inde, aurez-vous noté, dont les couleurs chatoyantes étonnent moins quand on lit, en bas à droite du dessin, qu’il s’appelle aussi ara, le nom sous lequel nous le connaissons aujourd’hui. Rouge, bleu, jaune, multiples plumes d’une longue queue joliment recourbée, bec finement ourlé, le tout a fière allure, presque martiale. Cet oiseau à l’indéniable prestance, le public pourra le découvrir, c’est une grande première, lors de l’exposition "Précieux Vélins –trois siècles d’illustration naturaliste", qui va s’ouvrir au Cabinet d’histoire du Jardin des Plantes le 5 octobre 2016 (1). C’est l’une des 120 magnifiques aquarelles ou gouaches peintes sur de la peau de veau mort-né (d’où le nom de vélins) que le Museum d’histoire naturelle a choisi de présenter parmi les 7000 de sa prestigieuse collection, débutée en 1630 et jamais exposée. Mais vous pourrez aussi voir un majestueux ours blanc, un homard bleu, de rigolos polatouches mieux connus comme écureuils volants, une inquiétante mandragore, des colchiques, des tulipes "veuve violette"… Gouaches et aquarelles de couleurs exceptionnelles.

"L’exposition changera tous les mois", rappelle Pascale Heurtel, commissaire de l’exposition, conservateur en chef au Muséum, "car les vélins détestent la lumière, qui les altère". Pas question de dénaturer pareil trésor, à ne pas reléguer au rang restrictif de belles images, mais dont la production a toujours été "liée à un processus scientifique", souligne-t-elle. Habituellement, ces illustrations de plusieurs dizaines de centimètres de hauteur sur une trentaine de large, demeurent soigneusement cachées dans d’élégants portefeuilles recouverts de cuir, mode de conservation traditionnel qui leur a réussi. Il leur faut de surcroît une pièce climatisée et une hygrométrie suffisante pour que "les vélins vivent leur vie de peau".

Nicolas Robert, un "immense peintre et excellent coloriste"

Tout a commencé au 17e siècle, quand Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII, passionné par son jardin botanique au château de Blois, décide de faire représenter des plantes rares par le peintre et graveur Nicolas Robert. "Un immense peintre, excellent coloriste", selon Pascale Heurtel, qui avoue également son admiration pour "son talent d’observation et son exactitude scientifique", et aussi "ses qualités de mise en scène". Il a su donner de la personnalité aux plantes, alors qu’en botanique, les canons sont souvent figés…

GRAAL. A la mort du prince, plusieurs portefeuilles ont déjà été remplis de peintures répertoriant fleurs, plantes rares ou encore oiseaux de ses volières. "La série est léguée à Louis XIV et attire l’attention de Colbert, qui convainc le roi de faire continuer la collection", écrivent Pascale Heurtel et Michelle Lenoir, directrice honoraire des bibliothèques au Muséum. Toutes deux, à l’occasion de cette exposition inédite, ont en effet dirigé un ouvrage exceptionnel, doté de 830 illustrations couleurs, grâce à des photos réalisées par Tony Querrec (2). "Les Vélins du Museum, c’est notre Saint-Graal", avoue Geneviève Rudolf, la directrice éditoriale.

Après ses débuts prestigieux, la collection va devenir celle des Vélins du roi puis passera la Révolution sans encombre – le Jardin et le Muséum, vus comme des lieux destinés à l’élévation des citoyens furent protégés. Elle s’enrichira d’oeuvres de Pierre-Joseph Redouté, elles aussi parmi les plus subtiles, "des aquarelles à la transparence inégalée", et se poursuivra au 19e siècle. En 1814, le grand explorateur et naturaliste prussien Alexandre de Humboldt, qui a fréquenté Cuvier, Jussieu, Lamarck etc. plaide pour que cette collection ne soit pas altérée lors de l’entrée des troupes prussiennes dans Paris. Ultérieurement, le Muséum s’inquiète de la possible dispersion des vélins par les professeurs qui les empruntent pour leur enseignement. Miracle, sur toute la collection, un seul a disparu ! Après un relatif déclin, il y aura deux « renaissances » au 20e, au début des années 1950, puis entre 1980 et 1990. L’idée étant de "remettre en place des techniques perdues" mais la vingtaine d’œuvres qui en sont sorties "ne sont pas les plus réussies", selon Pascale Heurtel. Aujourd’hui, c’est à la photo que les naturalistes font appel mais le dessin d’histoire naturelle continue de présenter un intérêt. Car il oblige, comme jadis, à une observation particulièrement rigoureuse et permet d’ancrer certaines visions, sur le terrain. Aux visiteurs que nous sommes, les vélins d’hier, outre les flamboyantes tulipes et pivoines, le coloré toucan ou les tremblantes fritillaires, permettent aussi de retrouver des plantes ou animaux qui ont disparu, telle cette sous-espèce de zèbre, un curieux couagga. Emouvant.

1) Cabinet d’histoire. 57, rue Cuvier, 75005 Paris. Tarif plein : 3€ ; réduit : 1€. Tous les jours sauf le mardi, 10h-18h. Jusqu’au 2 janvier 2017.

2) En librairie le 14 octobre. Collection « Art et nature », 624 p., co-édition Citadelles&Mazenod, Muséum national d’histoire naturelle, 430€.

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