HISTOIRE. Entre 1904 et 1969, les animaux vivants dans le bassin Amazonien ont été les victimes d'une période de chasse intensive destinée à satisfaire le marché de la fourrure et du cuir. Pour la première fois, une équipe de chercheurs a réussi à estimer le nombre d'animaux ayant péri durant cette période grâce à un travail minutieux d'analyses d'archives tels que des registres provenant des ports ou encore des cahiers de comptabilité. Pour cette étude, dont les résultats ont été publiés le 12 octobre 2016 dans la revue Science Advances, les scientifiques ont utilisé un modèle mathématique se basant sur différentes données (poids, espèces composants la cargaison) concernant les peaux embarquées sur les bateaux. Ces éléments ont conduit à une estimation précise de la variation du nombre de spécimens de différentes espèces animales au cours du temps.
En rouge et en jaune : zone de chasse durant les années 50 et 60 © Science Advances / Antunes & all
Des millions d'animaux morts
Ainsi, entre 1904 et 1969, 23.3 millions d'animaux de 20 espèces différentes ont été tués. Plus précisément, les chercheurs ont dénombré la mort de 13.9 millions mammifères terrestres (ocelot, daguet rouge, jaguar...), 1.9 million mammifères aquatiques ou semi-aquatiques (Capybara, loutre à longue queue...) et de 7.5 millions reptiles (caïmans noirs...). Selon Taal Levi, l'un des membres de l'équipe de recherche, "ces résultats sont, sans aucun doute possible, bien en deçà du nombre réel d'animaux tués car certains étaient cachés afin d'éviter les taxes et d'autres n'étaient jamais déposés sur les paquebots. D'autres encore ont été chassés pour sustenter les colons". En 1967, le Brésil a adopté la Faunal Protection Law qui a conduit à un encadrement stricte de la chasse. Plus tard, en 1975, la ratification de la CITES a également permis une réduction drastique du commerce des peaux et des fourrures. Cependant, les chercheurs estiment que de nombreuses espèces tels que les caïmans noirs (Melanosuchus niger) ou encore les loutres géantes (Pteronura brasiliensis) commencent tout juste à récupérer de cette période noire pour la faune sauvage sud américaine.